Quelle belle idée que la fusion quand même ! A bas tous les racistes musicaux, vive le métissage ! Malgré l'immense succès de certains artistes, le courant est complètement tombé en désuétude. Les locomotives ont soit connu d'énormes galères, soit laissé tomber d'une façon ou d'une autre (le guitariste de Fishbone qui devient alcoolique et fou, RATM qui splitte, les Red Hot et No Doubt qui se dirigent vers la pop aseptisée), et le reste du mouvement s'est fait vampiriser par le néo-métal. Depuis, si le métissage musical a effectivement pris le pouvoir et ne choque plus grand monde, les groupes de fusion se font rares. En effet, les programmateurs sont particulièrement frileux vis-à vis de ces formations dont ils ne savent pas vraiment quoi faire, ce qui aboutit souvent au split de formations pourtant intéressantes (Intact Element entre autres). Il en fallait plus pour décourager les 4 gars de Nada Collapse qui ont décidé de faire fi des mauvais présages et de laisser libre cours à leurs influences.
Un batteur métal, un bassiste jazz-rock/funk, un guitariste branché reggae/rock/funk et un chanteur branché électro, forcément ça risque de partir dans tous les sens. C'est un peu le cas ici, avec des titres qui n'hésitent pas à passer de passages légers pour ne pas dire clownesques à des riffs acérés bien plus sombres. Mais à la base, Nada Collapse propose surtout une fusion très orientée vers la scène des années 1990. A ce titre, il est limite troublant de constater à quel point le grain de voix du chanteur nous rappelle celui de Corey Glover de Living Colour. Ses lignes de chant impeccables cimentent la folie musicale de ses comparses qui peuvent dès lors se faire plaisir (et qui ont les capacités instrumentales pour ça). On a donc un jeune groupe vraiment sympa, qui s'il collectionne bon nombre d'atouts n'en traîne pas moins quelques casserolles, également assez typiques des débuts de la scène fusion. Les titres comportent parfois des passages assez bordéliques. Sans doute le revers de la médaille avec la fougue de la jeunesse : grosse patate, mais le tout manque encore d'huile pour casser la baraque.
Cela étant dit, il ne s'agit encore que des premiers pas d'une formation qui dispose d'une confortable marge de progression. Si le groupe parvient à gommer quelques aspects superflus pour se concentrer sur l'essentiel de son propos, le tout sans perdre ce qui fait sa folie, il pourra alors confirmer son potentiel et s'imposer comme un vrai bon groupe de fusion. Le pari est difficile, mais qui a dit que faire de la bonne musique était simple ? Si notre beau pays ne s'est que rarement distingué par ses groupes de rock, nous pouvons tout de même nous targuer d'avoir eu de nombreux groupes de fusion qui ont su n'en faire qu'à leur tête et imposer de fortes personnalités. C'est tout le mal que l'on souhaite à Nada Collapse, qui s'il a encore du boulot, pourrait finir par s'imposer aux côtés des incontournables No One is Innocent, One eyed Jack, Boost, Stroll, Lofofora etc, et renvoyer Pleymo aux oubliettes d'où il n'aurait jamais dû sortir.