Le voilà donc ce premier album de Heartbeat Parade. Après deux EP qui laissaient deviner un fort potentiel, on a désormais droit à un long format, un beau bébé de pas loin d'une heure. Ce groupe, c'est toute une histoire. Ses 3 membres n'habitent pas dans le même pays (ils sont tous frontaliers entre la France, la Belgique et le Luxembourg), ce qui ne les empêche pas de former un groupe sous la forme power trio, à ce léger détail qu'il n'y a globalement pas de paroles, tout juste quelques mots déclamés ici et là, quand ce ne sont pas des samples judicieusement placés qui dénoncent les pires travers de la société de consommation. Ces phases ont un véritable intérêt dans le sens où sans prétendre remplacer un chant véritable, elles n'en brisent pas moins une certaine monotonie qui peut parfois s'installer face à une musique entièrement instrumentale. Encore que la monotonie n'est certainement pas le mot qui convient le mieux pour décrire la musique de ces frappadingues.
A la croisée du hardcore, du post-rock et de l'alternatif, qu'on accroche ou pas, il paraît en tous cas impossible de s'ennuyer à l'écoute de Hora de los Hornos. Le groupe a pris son temps depuis qu'il a été sélectionné parmi les découvertes du printemps de Bourges 2011. Les dates effectuées avec des cadors comme Ez3kiel, Kyuss lives !, And so I watch you from a Far ont certainement porté leurs fruits. Le groupe a affûté son propos et réussit l'exploit de proposer un album instrumental moderne, exigeant et de haute volée. Si les formations qui proposent un rock instrumental influencé par le hardcore et le post-rock se sont multipliées ces dernières années, le genre n'en demeure pas moins délicat à pratiquer. Parvenir à éviter la répétition n'a rien d'évident, mais force est de reconnaître que la formation y parvient avec brio, grâce à des breaks judicieux, un souci constant de la mélodie qui n'est pas sans évoquer par moments God is an Astronaut, des arrangements électro ou quelques notes de piano qui viennent épicer la sauce, ou une basse sautillante sur laquelle plane le spectre de Tool.
On l'a dit, l'album dure une petite heure. Pourtant, difficile de voir le temps passer tant le groupe prend soin de ne pas lasser par un excès de compos rentre-dedans ou de réutilisation abusive des mêmes ficelles. Au final, c'est donc un véritable voyage musical que nous propose le groupe, au mépris des conventions en vigueur et des exigences radiophoniques. Ce Hora de los Hornos est donc tout aussi appréciable pour sa volonté farouche de s'éloigner des conventions et de proposer un résultat sinon foncièrement original, en tous cas bien loin des sentiers battus, que pour le savoir-faire dont il fait preuve. Voulir proposer quelque chose d'original c'est bien, mais combien de groupes s'y sont cassés les dents ? Ce n'est pas le cas des Heartbeat Parade qui prouvent avec cet album qu'ils ont su développer leur potentiel et se montrer à la hauteur des espoirs placés en eux. On leur souhaite donc désormais de poursuivre sur leur lancée, d'aller défendre cet album autant que possible sur scène et de continuer à s'améliorer encore et encore jusqu'à imposer leur nom parmi les meilleurs de cette scène à laquelle ont peut plus ou moins les rattacher, celle des fortes têtes talentueuses.