White Lies + Serpent au Trabendo de Paris (15/06/2022)

Cela fait vingt ans que le groupe britannique d’indie rock White Lies évolue dans un univers post post punk sombre et pourtant relativement dansant. S'il n'a jamais atteint une célébrité immense dans nos contrées, il peut compter sur la ferveur d'un public dévoué qui le suit depuis longtemps, comme l'a montré son dernier concert au Trabendo.

Les choses ont été compliquées pour le trio anglais : si tous les groupes sont désormais hélas habitués aux reports liés à la crise sanitaire, les White Lies ont subi quant à eux les affres du Brexit. Alors que leur concert était initialement prévu le 7 avril, le groupe n'a pu se produire... car son matériel était coincé à la frontière franco-britannique, à cause d’un manque de personnel aux douanes. Mais le groupe avait promis de revenir, et c'est donc chose faite ce soir.

Serpent

Le Trabendo a déjà doucement commencé à se remplir quand attaque le groupe Serpent. Il faut dire que la forte chaleur parisienne, qui devient presque suffocante dans la salle, incite une partie du public à rester au bar extérieur pendant la première partie.

Cela n'empêche pas le groupe français d'attaquer son set avec entrain. Le quintette attaque avec un morceau très groovy, assez dansant, où la basse est très en avant. Le son est assez minimaliste, mais les guitares explosent ponctuellement dans des sonorités beaucoup plus massives. Le public est relativement attentiste mais se laisse aller à de petits déhanchements çà et là.

Le second morceau, "Dysfunktion", a en plus un petit côté funk, ce à quoi les musiciens ajoutent des cris aigus presque simiesques. Progressivement, le son prend de l'ampleur, le tempo accélère, et le morceau finit dans un maelstrom sonore dans lequel se noient les cris de singe.

Dansants et expérimentaux à la fois, avec une basse très en avant et un sens du groove indéniable : ces deux premiers morceaux résument bien l'ensemble du concert. Le troisième morceau ajouté en plus des chœurs éthérés et un effet sur la guitare qui donne un son ultra transformé, comme si elle était passée dans un vieux clavier vintage.

Le tempo varie d'un morceau à l'autre, la batterie est parfois plus mise en avant, notamment sur les introductions, mais le groupe ne dévie pas de sa formule étrange et néanmoins qui fonctionne parfaitement, certains morceaux prenant même une coloration psyché.

Les musiciens semblent pris par leur musique, bougent en rythme, surtout le chanteur, Matthieu Lescop, connu depuis plusieurs années pour sa carrière solo, qui improvise des danses avec l'un des deux guitaristes. L'air souvent halluciné, il joue de sa voix éthérée, et prend plaisir sur plusieurs titres, quand le tempo se met soudain à ralentir, à se mettre à chuchoter, quasiment arrêter la chanson, puis relancer brusquement le morceau. Le groupe se retire après une première demi-heure qui a parfaitement échauffé le public présent.

White Lies

Après une grosse demi-heure de changement de plateau - durant laquelle on retrouve la batterie de Serpent à l’entrée de la salle – le noir se fait de nouveau et les acclamations fusent.

Les quatre musiciens des White Lies – le trio de base plus un claviériste de tournée – s'installent en toute simplicité, et retentissent les premières notes de « Fairewell to the Fairground », probablement l'un des morceaux les plus iconiques du groupe, issu du premier album. C’est peu dire que la foule apprécie : elle reprend en chœur vociférant, certains spectateurs se mettent à sauter dans tous les sens, la ferveur est palpable.

Le groupe déroule son rock post punk, cold wave, froid et pourtant porté par une émotion palpable, les guitares et le clavier se répondant et s’alliant pour porter une obscure énergie sur scène.

Le public est largement acquis à sa cause, le son est bon, les conditions sont idéales. En cinq albums, le combo britannique a construit une discographie solide, relativement homogène, creusant son sillon sans grande révolution mais avec authenticité.

Les morceaux passent tous parfaitement l'épreuve du live, que ce soit ceux du dernier opus, As I try not to fall appart (« Am I Really Going to Die », « Step Outside », « There Is No Cure for It »), ou les classiques des premiers albums, tels que « To Lose My Life », titre éponyme du premier album, ou encore « First Time Caller », issu du troisième album Big TV et qui n’avait pas été joué depuis des années. Les derniers morceaux ont souvent quelque chose de plus dansant, moins mélancolique, tout en gardant une certaine froideur.

Le groupe reste sobre, les musiciens bougent relativement peu, le chanteur et guitariste Harry McVeigh ne parle pas énormément, et pour être sincère, sa prestation n'a rien de spectaculaire, le groupe ne cherche pas à se lancer dans des débauches de virtuosité.

C'est à l'instar de sa musique, qui n’a pas pour ambition d’être particulièrement technique – même si c'est très bien exécuté – mais plutôt à transporter dans des ambiances, métalliques, sombres, planantes, avec une sonorité assez old school – le groupe étant parfois décrit comme « post punk revival ». Cela suffit pour proposer une succession de morceaux envoutants, qui séduisent sans difficulté le public.

Vers la fin du concert, le chanteur ‎interagit un peu plus avec l'auditoire, il s'approche du bord de la scène, demande au public de taper des mains. Surtout, même sans grande effusion - comme tout Britannique qui se respecte ? - les musiciens laissent voir à quel point ils sont contents d'être là. Le frontman a d'ailleurs l'air ému à plusieurs reprises, et remercie plusieurs fois le public d'être venu malgré le report. Il ajoute au passage que le groupe aime beaucoup jouer en France, notamment à Paris, estimant que le public a beaucoup de chance d'y vivre.

Le combo joue dans les derniers titres « Unfinished Business », une chanson « très importante pour nous, la première écrite en tant que White Lies et notre tout premier single. C’est une des raisons majeures qui fait que nous sommes toujours là ». Après deux titres plus récents, « I don’t Want to Go to Mars » du dernier opus et le dansant « Tokyo » de l’avant-dernier album Five, puis de nouveaux remerciements au public qui s’est déplacé ce soir, le quatuor s’éclipse puis revient pour le rappel.

D’abord avec « Death », issu du premier album, durant laquelle toute la fosse saute en rythme. Puis avec « As I Try not to Fall appart », éponyme du dernier album, plus dansant, qui incite la fosse à se déhancher. Finalement, « Bigger than us », premier single du deuxième opus Rituals, vient clôturer le set, alors que le public s’enflamme de plus belle.

Après des retrouvailles ratées en avril dernier, les White Lies sont revenus communier avec leur public parisien, et tous les obstacles ayant précédé ce concert n’ont rendu cette célébration que plus belle.

Setlist

Farewell to the Fairground
There Goes Our Love Again
Am I Really Going to Die
To Lose My Life
Hurt My Heart
Time to Give
Is My Love Enough
Step Outside
First Time Caller
Big TV
There Is No Cure for It
Unfinished Business
Tokyo
I Don't Want to Go to Mars

Rappel :
Death
As I Try Not to Fall Apart
Bigger Than Us

Photo : Hasna Ben Brahim. Reproduction interdite sans autorisation de la photographe.



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