Depuis la bonne baffe infligée par leur premier album, dont vous pouvez retrouver la chronique ici-même, on a gardé un œil (voire deux) sur les Los Disidentes del Sucio Motel. Parce que le dit album compensait allègrement ses défauts (notamment des voix un peu limite, et des influences pas encore parfaitement digérées) par un grand nombre de trouvailles en tous genres. A commencer bien sûr par une certaine science du riff qui tue et du refrain qui accroche, mais aussi (et surtout ?) par des bruitages et idées d’arrangements délirants qui conféraient une véritable identité à chaque chanson, malgré un côté un peu bordélique. On se laissait donc rapidement gagner par un album qui se révélait au fil des écoutes et qui affichait haut et fort une personnalité haute en couleurs, ce qui n’est somme toute pas si fréquent dans cette scène passionnante mais hyper fréquentée qu’est le stoner. Un split CD avec Flashfalcon plus tard, et les voici qui nous reviennent avec Arcane, leur « véritable » deuxième album et une pochette qui déchire et annonce la couleur.
De l’humour, il y en a moins, le groupe s’est concentré sur la composition de morceaux solides. Peut-être ont-ils vu les limites de leur approche dans le sens où le danger était de passer pour les éternels clowns de service, au risque de voir leur musique ne pas être prise au sérieux. Au rayon satisfactions, il y a notamment eu un très gros travail sur les voix (car ils sont plusieurs) pour remettre le chant au niveau et surtout au centre de compositions moins délirantes, mais bien plus cohérentes et compactes. A ce niveau, rien à dire, Los Disidentes del Sucio Motel a créé un album hyper costaud, bardé de refrains, de sons de guitare fumés à souhait et de structures qui s’éloignent juste ce qu’il faut de l’éternel couplet/refrain pour ne pas lasser. On avait déjà eu l’occasion de découvrir « Z », mais « A.T.A.R.I. », « Santa muerte » ou encore « Mojo » sont de bons gros tubes en puissance qui ne laisseront personne indifférent.
Si on ajoute qu’il y a plusieurs mid-tempos bien sentis qui sont l’occasion de balancer des riffs de guitare pachydermiques, on pourrait commencer à croire qu’on est proches du sans-fautes. C’est le cas, en un sens. Los Disidentes del Sucio Motel a pondu le 2e album qu’il fallait, plus accrocheur, plus mature, mieux écrit, mieux interprété et mieux produit, plus « bombastique », et on ne peut que lui souhaiter d’en récolter les lauriers. Mais où sont passés tous les bruitages délirants que l’on trouvait sur le premier album, et qui étaient là bien plus pour enrichir les compositions que pour servir de cache-misère ? Quand un groupe parvient à générer un petit buzz, il sort souvent un 2e album assez bourrin. Ne nous en cachons pas, c’est souvent ce qu’on lui demande. Mais de nombreux groupes y ont laissé une partie de leur âme (The Answer notamment, mais la liste est longue). Et autant Arcane est un excellent album et on est donc loin des déceptions évoquées, autant on a le sentiment que le groupe a quelque peu succombé à ce syndrome.
Les motifs de satisfaction sont bien là, le groupe devrait récolter d’excellentes chroniques un peu partout dans la presse et recevoir un accueil public favorable. Mais attention à ne pas tomber dans le piège et à ne pas oublier à l’avenir cet humour décalé, auquel plus personne ne peut désormais réduire le combo, mais qui lui conférait indéniablement un truc en plus. Encore une fois, les signes avant-coureurs ne laissent nullement présager un tel cas de figure, surtout qu'Arcane reste une belle réussite, un palier important. Le collectif est désormais bien rôdé, les musiciens ont progressé et il n'y a plus aucune raison que les LDDSM s'arrêtent en si bon chemin. Avec une grosse tournée de plus dans les pattes et l'expérience qui va avec, on pourrait très rapidement avoir à faire à du très lourd.
