Une carrière et un engagement dans sa musique assez étonnants : c’est ce qui frappe d’entrée chez l’artiste italienne Tying Tiffany. Vu sa carrière, on sent instinctivement que chez elle, faire de la musique et la présenter à un public est quelque chose de tout à fait naturel, qui ne répond à aucun calcul. Inspirée par le punk et l’électronique, elle commence par sortir deux premiers albums purement alternatifs (et assez inaudibles pour l’auditeur peu averti) avant de se calmer progressivement sur les deux suivants. Le dernier en date, Dark days, White nights, s’avérait même étonnamment doux mais aussi très réussi et abouti. Dès lors, il est clair que la chanteuse s’inscrit dans la longue lignée de ces artistes hétéroclites, qui n’hésitent pas à aller explorer, sans complaisance aucune envers le public, ou dit autrement, sans aucun plan de carrière préalable. Nouveau virage avec son nouvel EP One, qui s’avère particulièrement aérien, et qu’elle a présenté récemment à Paris lors d’un concert aux Combustibles.
« One second » évoque Dead Can Dance par moments, avec ses chœurs qui ouvrent le titre de façon presque électro-folk. Un nouveau visage qui va bien à l’artiste, d’autant que la chanson, bien que relativement minimaliste, entraîne l’auditeur qui accepte de se laisser embarquer dans des brumes vaporeuses très années 80 du meilleur goût. Les amateurs de la bande originale de Drive risquent d’apprécier, même si les synthés vintage restent discrets. Sur cet EP, Tiffany continue d’explorer de nouveaux sons, cherchant cette fois un rendu épuré. Les mélodies restent toujours inspirées par l’alternatif (« One Girl ») tout en étant cette fois résolument plus accessibles. C’est sûrement là toute la difficulté qui peut éventuellement attendre la chanteuse : trouver le bon équilibre entre l’alternatif et un côté plus mainstream. Car si les compositions sont de bonne facture, elles ne sont pas non plus particulièrement marquantes.
Gardons-nous de tirer des conclusions hâtives : l’album précédent (voire les deux précédents) avaient globalement atteint cet objectif, et les EP sont aussi là pour explorer, tenter de nouvelles choses, quitte à ce que le résultat ne soit pas aussi fort qu’escompté. Il y a du potentiel dans cette nouvelle approche, comme le montre l’ambiance à la fois douce et lourde de « One End ». Il y a sûrement quelque chose à faire, et on serait bien inspirés de garder une oreille sur cette artiste versatile, qui a partagé la scène aussi bien avec Eels que les Buzzcocks, avec Iggy Pop aussi bien qu’avec dEUS ou Alec Empire de Atari Teenage Riot. Car si ce One est avant tout un bon moyen d’expérimenter de nouvelles sonorités, le caractère touche à tout de la jolie brune pourrait bien l’emmener dans une toute autre direction la prochaine fois. Une personnalité à suivre, et l’on ne saurait trop vous conseiller de jeter une oreille sur son dernier véritable album qui vaut franchement le détour.