La princesse, c'est cette petite créature fragile qu'il faut sauver. Les Kill The Princess se sauvent très bien toutes seules, et ça tombe bien, on n'a pas envie de le faire (on n'a pas leur ardeur !), surtout après s'être mangé leur rock costaud dans les oreilles.
Partant du constat qu'on n'entend pas assez les femmes sur les scènes rock, les quatre artistes composant Kill The Princess font du bruit pour cent. Retournant dans tous les sens les scènes depuis 2019, elles balancent également leur énergie communicative ébouriffante dans l'album Bitter Smile, sorti le 17 mai 2023.
Il s'agit d'un artefact magique, destiné à donner la rage combative à quiconque l'écoutera. Mêlant dans sa formule magique les guitares du rock, les sonorités du Metal et les arrangements de la pop, l'album Bitter Smile est un redoutable remède à la résignation. Abordant les thèmes qui les énervent, les quatre musiciennes cathartisent leurs démons, et on est bien heureux de les assister.
La basse grondante de Céline et la guitare acérée d'Émilie portent les mélodies, tandis que la batterie d'Eva impulse le rythme, menant à la baguette la joute contre les violences et les défis. La voix de Nell (qu'on avait fortement appréciée sur son EP solo The Pace of Life en 2021), enveloppante et grave, campe le style des Kill The Princess : chaleureux et énergique. Et de l'énergie, il en faut, pour lutter sur tous les fronts.
Des textes à pogoter
On ouvre l'album avec des guitares bien poilues, un fuzz parfaitement adapté au morceau « Inanimate Toy » qui incite à déconstruire les stéréotypes. Puis sans descendre en intensité, la batterie nous presse sur la chanson suivante, « Running after time ». On est malgré nous emportés dans ce tourbillon des choses auxquelles penser, ces mémos à ne pas oublier, ces rappels incessants que le temps passe, que le temps presse.
Quand est-ce qu'on souffle ? Eh bien, juste après, quand l'arpège de « Dreamer Knight » vient nous câliner les cils auditifs. Le morceau ralentit le tempo et insiste sur les effets d'écho, faisant durer les sons pour bien imprégner l'auditeur de toutes les compétences des artistes, et enchérir le message : l'art, c'est un peu un combat à mener pour conserver le droit de vivre ses rêves.
Passons au rock indus, aux effets de voix, grondements gutturaux et riffs électriques. « To the Grave », c'est l'exutoire de la rage, c'est l'appel à la vengeance, et sur ces sonorités-là, on est effectivement bien motivés.
Entraînés, on l'est aussi, de manière plus vigoureuse, par « Nightmares », dans le monde des traumatismes d'enfance, et on y plonge sous les coups groovy d'une batterie impressionnante.
Tandis que le chatoyant « Snakes » ondule, nous enlise dans les on-dits et les fausses réputations à l'aide de distorsions.
Mais les Kill the Princess ne s'arrêtent pas aux splendides sonorités brut(al)es de leurs grattes et au grunge parfois rocailleux de leur chanteuse-parolière. Avec « Changemakers », les artistes nous donnent à entendre sans paroles un vigoureux thème électro qui enjaillera les plus puristes. Elles peuvent également aborder des sonorités plus planantes, comme dans « Lies » ou « The Weak Man ». Leur guitare parfaitement dosée nous entraîne dans sa spirale envoûtante, on s'y laisse prendre, et on ne veut pas repartir du château.
Kill the Princess - Bitter Smile
Sortie le 17 mai 2023
Titres :
- Inanimate toy
- Running after time
- Dreamer Knight
- To the grave
- Lies
- Nightmare
- Snakes
- Changemakers
- Playing Dolls
- The weak man