Franchir la ligne - rouge pour certains - entre chanson et rock n’a jamais fait peur à la volcanique Béatrice Demi MondAine. Si ce septième album lui permet d’explorer des contrées plus apaisées musicalement, ses thèmes d’écriture demeurent ancrés du côté de chez Eros et Thanatos. Sulfureuse un jour, sulfureuse toujours, la Demi mondAine !
Son pétaradant “Paris Désert” date déjà de 2017 et nous étions sans nouvelles - d’un point de vue discographique s’entend - de la plus glamour de nos chanteuses-rockeuses nationales. Pas de traversée du désert pour autant pour notre DemiMondaine préférée. Durant toutes ces années, Béatrice a méchamment dévergondé l’émission de télé-crochet The Voice, électrisé de sa présence magnétique le Fashion Freak show de Jean-Paul Gautier et surtout donné vie à son projet le plus personnel, son somptueux Cabaret des Monstres. Ces différentes expériences ont sans nul doute nourri ce septième opus. Toujours réalisé par Laurent Jaïs, “Lignes Imaginaires” peut paraître plus pop et de fait moins rock n’roll ; les guitares saturées ont perdu du terrain au profit des claviers et d’arrangements mêlant envolées de cordes et touches électro. Mais qu’on se rassure, l’esprit frondeur, rock donc, indissociables du style Demi mondAine est toujours bel et bien présent. Celle à qui Iggy Pop a offert un titre (le fameux “Private Part”), n’a plus besoin de démontrer la puissance de sa voix, elle peut donc la jouer plus feutré et au service de ses textes.
© Photo Christophe Chaumanet
En 2021, nous avions eu un avant-goût de l’album avec le voluptueux “La Source” et son clip sensuel en diable. Si les précédents disques de Demi mondAine étaient terriens, voire flamboyants, c’est l’eau, sa force tranquille et évidente qui draine le récit de ses lignes imaginaires (“Le Fleuve”, “Le vent, la vague”). Navigatrice dans l’âme, Béa Demi mondAine a jeté l’ancre sur l’île d’Oléron il y a quelques années déjà. Le navire évoqué dans “Le Klomp”, qui n’a pas de phare et la mène d’une écluse à l’autre, serait-il le sien ? Notons également que son amour, qu’elle “a sorti de sa ferraille”, elle l’a tué dans l’eau (“Je t’ai tué mon amour”). Plus de doute donc sur le pouvoir que l’eau exerce sur elle… Par deux fois, il est également question d’anges. Peu importe leur sexe, car ce qui compte manifestement, c’est le sentiment amoureux qu’ils semblent inspirer. Des anges déchus donc, la faute manifestement à la blonde pécheresse (“Mon ange pardonne”)… Si la guitare de Mystic Gordon, son acolyte de toujours, est toujours au rendez-vous - on l’entend chanter sur le bluegrass “Aquarium” - le violon d’Emilio Castellio, l’ex complice de Johnny Montreuil s’invite lui aussi. Le courant qui traverse ces lignes imaginaires, est peut-être moins tumultueux que les précédentes traversées discographies de Demi mondAine. Mais méfiez-vous, cette eau dans laquelle se baigne cette sirène, ne dort pas et à l’instar d’une Ophélie, vous aurez vite fait de vous laisser bercer, puis carrément emporter.
1 La Source
2 Les Anges
3 Tout autour regarde
4 L’oiseau de papier
5 Je t’ai tué mon amour
6 Le Fleuve
7 Que feras-tu de moi
8 Mon ange pardonne
9 Thank you kindly
10 Le klomp
11 Aquarium
12 Le vent, la vague
13 Every bone in my body
14 Kilométrique