Tu en veux des ambiances série Z ? Et bien, tu devrais bien aimer le nouvel opus des Mothra Slapping Orchestra ! Les gens de Run Booking & Management viennent de nous envoyer ça en provenance de l’Ile Bourbon ! « Who Is Mothra » qu’ils nous disent en ouverture de l’album avec ce titre instrumental ! Et bien, c’est ce qu’on va essayer de découvrir avec ce quatrième effort long format des Réunionnais que l’on a déjà pas mal croisés dans les colonnes de la Grosse Radio.
Les Mothra nous ont habitués à un son hérité du boogie blues sauvage croisé avec du rockabilly puissant. Un rockab’ façon « Reverend Horton Heat meets Brian Setzer ». Pas mal non ? Alors pourquoi changer ? Hé bien certainement pour rajouter une touche « crampesque » à la mixture ! Forcément qu’avec leur style, ils ont été biberonnés aux Cramps ! Un titre d’album comme The Swamp Thing Assault, Lux Interior aurait adoré, c’est certain… Et que dire du titre éponyme ? On voulait du « crampesque », on en aura ! Eric, le gratteux-hurleur du combo, et Poison Ivy partagent cet amour de la Gretsch 6120 ! Alors pourquoi pas un petit instrumental pour nous amener au fin fond des marais ? On attend le combat entre le « Swamp Thing » et la « Creature of The Black Leather Lagoon ». Que le meilleur gagne ! Et puis pas étonnant que le riff de « Ain’t Got The Same » puisse rappeler Poison Ivy et sa Grestch rutilante…
Comme les Cramps, les Mothra sont fans du garage boogaloo exotica. Ça tombe bien ! Parce que dès l’intro de « Sweet O’ My Jane », on est transporté dans la jungle et on se dit que les gars ont dû écouter quelques compils garage avec force bruit d’animaux comme les Jungle Exotica par exemple ! Et puis, les Réunionnais n’ont pas hésité à sampler le cri du Tarzan de Johnny Weismuller ! Respect !
On cause aussi de poupées vaudous chez les Mothra ! On aime bien toute ces créatures ! Faut bien dire que quand on porte le nom du papillon ennemi de Godzilla, on ne peut pas s’attendre à faire dans la dentelle. Les monstres divers et variés, c’est leur fond de commerce aux Mothra. On s’en apercevra tout au long de ce nouvel opus.
Une ligne de basse en furie, Eric qui éructe, s’époumone ! La batterie martiale de Nico. Bob saute sur sa contrebasse ! N’est-ce pas la recette d’un morceau réussi des Mothra Slapping Orchestra ? Et force est de constater que ça fonctionne ! Alors pourquoi changer une équipe qui gagne ? Et ils savent aussi installer les ambiances, les Réunionnais, avec des titres qui montent en puissance comme ce « A Coin To Pay Charon ». Les gars ont potassé La Divine Comédie de Dante. Des érudits, on vous dit. Apparemment, c’est la partie Enfer qui les a le plus intéressé ! Pas étonnant ! Et en prime, un petit clin d’œil au riff ultime de « Baby Please Don’t Go » plutôt dans la version revue par le petit diable d’AC/DC, Angus Young ! La boucle infernale est bouclée… Well done !
En parlant d’AC/DC… Grace aux Mothra, si on vous demande si vous connaissez un morceau qui commence par des cloches, vous tenez enfin votre opportunité de ne pas citer « Hells Bells » ! « Jack The Lover » par les Mothra Slapping Orchestra. Un petit morceau mid-tempo où le gang nous montre le côté « lover » du tueur londonien Jack The Ripper. Ils sont fous ces Mothra !
Et si cette folie s’expliquait par le titre « Lost My Brain » ? Ça part comme une blague et ça finit comme un titre façon Suicidal Tendencies à Venice Beach ! Les Mothra ont décidemment plus d’une corde à leurs arcs ! Pas mal pour des décérébrés ! Ah ! Ah !
Sur ce nouvel opus 2024, il est important de s’arrêter sur le morceau « Mama » ! Un des premiers titres écrit par Eric à son arrivée sur l’Ile Bourbon en provenance directe d’Armissan (11110) à coté de Narbonne ! A cette époque, il officie chez les Z’ears (les locaux et les initiés 974 comprendront la blague), un groupe qui regroupe des influences diverses et variées allant d’AC/DC à Bobby Lapointe en passant par Bob Dylan et Michel Sardou. Alors, même si le titre était déjà hyper gonflé dans la version des Z’ears (avec un clip terrible, trouvable sur internet pour les plus aguerris aux méandres de la toile), cette version 2024 botte littéralement le cul ! Les fans de la première heure apprécieront à sa juste valeur et les nouveaux découvriront ce titre comme un potentiel single.
Les Mothra sont aussi fans de blues. Plutôt du blues trash si possible. Et de temps en temps, leur musique lorgne vers des choses que les fans du Blues Explosion de Jon Spencer pourraient bien apprécier. Si vous êtes dans ce cas tentez une approche avec « Is There Anobody On The Phone »…
Parfois les Mothra calment le jeu comme le temps d’une petite intro cool sur « Ghost In My Bed » mais très vite le chant possédé d’Eric, hurleur et six-cordiste de la maison Mothra nous rappelle qu’on n’est pas ici pour enfiler des perles. La contrebasse de Bob envoie toujours furieusement. Je viens de vérifier sur les notes de pochettes, le gang n’a pas, malgré ce qu’on pourrait croire, débauché Lee Rocker de chez les Stray Cats, c’est bien Bob qui gère de main de maitre cette furieuse ligne de basse !
« Hold My Beer » pour finir ! Ça part comme une balade acoustique. Un rien dans l’esprit cajun mais croisé avec un son boogie un peu crade, façon rock sudiste. Le titre fait écho chez moi au « Free Bird » de Lynyrd Skynyrd ! Un début super entrainant ! On est au bar entre pote et la soirée s’annonce bien ! Morceau de bravoure des Mothra avec près de 5 minutes 30, on pourrait aussi le rapprocher des Creedence Clearwater Revival… Eric a préféré garder sa six-cordes là où on attendait un banjo ou un accordéon façon Billy String ou Mama Rosin ! Rockabilly bordel ! Mais le titre est méga accrocheur. On voyage à travers les états les plus reculés des Etats-Unis mais avec un petit accent insulaire réunionnais ! Une belle réussite pour clôturer cette recherche de la créature des marais.
Résultat des courses, un très bon album de rock ‘n’ roll ! De swamp rock ? De rockabilly ? De boogie blues ? De garage crampesque ? Il y a de tout ça, digéré et régurgité sauce pimentée réunionnaise par les trois trublions du gang ! Que du bon ! Alors vous pouvez y aller les yeux fermés avec ce Swamp Thing Assault ! Par contre gardez bien les esgourdes ouvertes, ça serait dommage de ne pas en profiter ! Pour finir, sur un côté esthétique, la pochette est magnifique, signée par le dessinateur Hippolyte (payez-vous au passage sa collection de fausses affiches de concerts rock. C’est génial ! Ma préférée : les Doors live à Mafate le 10 mars 1969). Alors ne passez pas à coté de l’édition limitée en vinyle du nouveau Mothra Slapping Orchestra !
Sortie le 13 avril 2024. Not On Label