Le lac d'Annecy doit être paisible et reposant. À l'image de l'album The Lake, qui fait direcrement référence à cette étendue au bord de laquelle il a été composé. Voici le concept : on s'assoit au bord du Lake et on s'y allonge les yeux fermés. Le duo d'Aalik et Fred Traverso nous invitent alors à voyager dans nos histoires passées et futures, au son d'un bateau qui navigue entre M83, The Cure et The XX. Un voyage rétro-futuriste pour les rêveurs.
Comme un chercheur d'or dans un lac, il faut avoir les sens bien aguerris pour saisir les pépites de cet EP. La guitare lancinante (coucou Romy Madley Croft) du titre éponyme de l'album couvre de multiples nappes électroniques qui viennent mystifier l'univers du morceau. Difficile de distinguer les synthés des guitares bourrées d'effets. Puis la voix, vocodée, nous fait définitivement quitter le monde réel. On pense forcément à quelques vieux titres de Daft Punk en écoutant "Like A Game", que le duo décrit comme "un bilan cynique d’après love story". Dans "A Special Kind of Loveliness", la guitare se met en retrait pour faire place aux rythmes lourds d'une basse synthétique. Les coups de kick marquent un tempo pesant, qui évoque une sombre poursuite. Ce morceau évoque "le trouble qui s’empare du chasseur à la vue de celle qu’il pourchasse". Un univers macabre et fantaisiste qui n'est pas étranger aux influences cinématographiques du groupe, qui puise dans les séries telles Six Feet Under ou Les Revenants.
Dans une alchimie bien dosée, "Shapeshifting" entonne un gimmick électro qui collerait parfaitement à un mauvais tube techno. Et pourtant, le groupe arrive à lui donner une dimension intéressante dans un morceau à la fois rythmé et teinté d'une lourdeur commune au reste de l'album. La voix devient accessoire à l'univers des morceaux, au point que l'instrumentale "SPCTRM" coule tout naturellement dans nos oreilles. Certains choeurs résonnent comme une lointaine plainte. La chanteuse suisse Sika pose sa voix sur la ballade "Nola", sûrement le titre le plus efficace de l'EP. Selon l'artiste, "SPCTRM" et "Nola" sont en fait "deux visions de la même histoire ; celle d’un homme obsédé par son passé qui se réfugie dans ses souvenirs". En tout cas, pas besoin d'être obsédé par la détente pour se réfugier dans The Lake. Le voyage est un peu court (6 titres pour cet EP), vivement le prochain départ…