Voilà, c’est l’été. Pas ou peu de concerts à se mettre sous la dent. Coté nouveautés et sorties d’albums, la réponse des labels est invariable : « Revenez en septembre mon bon monsieur, les patrons sont tous à la plage ». Résultat des courses, pour occuper un rocker pendant l’été, rien de tel qu’un bon bouquin.
Celui qui a en partie assouvi ma soif de rock estivale n’est pas une nouveauté. Ca aurait pu être le Bruce de Peter Ames Carlin ou le Who Am I de Pete Townshend auxquels je porterai un œil attentif rapidement. Mais j’ai préféré jeter mon dévolu sur un bouquin à la couverture alléchante façon Jack Daniels intitulé Cent Contes Rock signé Patrick Cazengler (ou Patrick Cazes pour Amazon) sorti en aout 2011.
Oublions le fait que la bête vaut près de 40 euros. Du haut de ses quelques euros près de huit cent pages vous contemplent. Paru chez Camion Blanc, superbe boite de littérature rock ‘n’ roll, pas d’édition poche. Donc attention pavé. Faut pas se le coller sur la tronche par inadvertance, ça pourrait piquer.
L’idée est simple et en grande partie évoqué dans le titre. Le sieur Cazengler s’est mis en tête d’écrire une centaine (exactement 101) de nouvelles sur des artistes qui l’ont marqué. On va vite s’apercevoir que le mec est pointu et balaye tout ce qui est rock ‘n’ roll surtout si c’est bien énervé. Les garageux y sont à l’honneur et côtoient les pointures de la musique rock depuis les pionniers jusqu’à des gars comme Jon Spencer ou encore d’autres bien plus obscurs.
Il est donc intéressant pour apprécier pleinement le bouquin d’avoir une culture musicale certaine. Cette phrase me permet par ailleurs de me la péter un peu, car comme j’ai aimé, cela laisse sous entendre que j’ai une culture musicale correcte. Néanmoins, je pense qu’il est beaucoup plus marrant lors de la lecture des nouvelles de connaitre un peu le caractère de la star mise en scène pour voir si l’auteur a voulu insister sur un trait de la personnalité ou si l’histoire est totalement romancée (ce qui est rarement le cas).
Si vous osez donc attaquer de front ce recueil de 800 pages, vous rencontrerez un Frank Black des Pixies en chef de l’église catholique. Vous apprécierez (ou pas) sa gestion des affaires pontificales. On retrouvera Screaming Lord Sutch à la tête du gouvernement britannique, lui qui s'y était présenté un peu à la manière de notre Coluche national. On croisera Lux Interior en docteur Frankenstein. Là, l’histoire colle tellement au personnage qu’on pourrait se croire dans la rubrique fait divers de n’importe quel canard local. Vous saurez tout sur le combat de titans que se sont livrés Jerry Lee Lewis et Little Richard pour la couronne de roi du rock ‘n’ roll. Vous connaitrez la vision du monde sous acide des Small Faces. Ce n’est pas triste. Vous verrez comment Johnny Cash joue le desperado. Vous partagerez aussi quelques instants de la vie paisible de Neil Young dans sa cabane au fond des bois canadiens. On retrouvera Henry Rollins en pirate sanguinaire guerroyant contre les espagnols au XVIIème siècle. On croisera Jimmy Page en train de livrer un combat de magie noire avec Kenneth Anger, auteur du mythique Hollywood Babylon, tous deux se disputant le titre de meilleur disciple d’Aleister Crowley. Les bluesmen sont aussi à l’honneur avec le récit de la rencontre entre Hubert Sumlin et Howlin’ Wolf ou encore avec les tribulations de Jon Spencer dans l’univers de RL Burnside qui donneront naissance au génial album de blues trash Ass Pocket Of Whiskey.
Le bouquin se lit ultra facilement. Rarement plus d’une dizaine de pages, souvent beaucoup moins, et on connait déjà le dénouement de l’histoire. Pas le temps de s’ennuyer ou de se perdre dans des récits alambiqués. Génial pour l’été. Une vraie bouffée de fraicheur, ce truc là. On sort des sentiers battus et ça fait du bien de voir un gars exploiter un nouveau filon. De plus chaque saynète est illustrée par une pleine page dessinée mettant en scène les personnages de la fiction à suivre. Enfin les dernières pages nous présentent une discographie sélective des artistes afin de permettre au lecteur de les découvrir (ou redécouvrir). Bien joué.
Je ne peux donc que vous conseiller d’y jeter un œil attentif. Je pense que vous ne serez pas déçu. Renseignements pris, il se murmure qu’un volume deux serait sur le point d’arriver. Moi, j’achète !!!
â–º Acheter Cent Contes Rock de Patrick Cazengler