Et voilà un groupe de plus qui s’affirme dans la grande famille qu’est le progressif : Sakya, formé en 2005, nous propose tout juste son nouvel album sorti ce 12 Novembre, Cella, disponible ici et distribué par Jarring Effects Label. Se qualifiant « d’inclassable » les aquitains oscillent, plus précisément, entre rock brut, électro, folie ainsi qu’un brin de dubstep témoin des débuts de la formation. En résulte une musique énigmatique, sombre et à part, aux effets hypnotiques (Ms 10 et séquences) projetant l’auditeur au sein d’un univers étrange mais ô combien stimulant.
Comme une suite de Pré, leur premier EP, bien que moins varié au niveau des influences mais aussi moins dispersé, Cella s’en trouve un peu assagi, même si l’absurde et les intermèdes loufoques sont toujours présents. Un gros changement sur le chant est évidemment à noter puisque Laurène Pierre Magnani a rejoint la troupe en n’oubliant pas d’apporter dans ses bagages un grain de voix sensuel donnant une touche de féminité, ainsi qu’une véritable présence scénique. Il faut d’ailleurs souligner au passage que l’instru, joliment ficelée, sert remarquablement les paroles comme par exemple sur « Haïhu » qui surprend également par son côté classique et évidemment poétique.
En parlant de ficelles, il semblerait justement que chaque chanson soit guidée par un fil invisible dont on a à peine conscience. Les cinq musiciens veulent nous emmener quelque part, ce qui donne un aspect linéaire au disque malgré la diversité des pistes. Certaines sont chantées (« Condenses »), sur d’autres la voix oscille entre chant et parole comme « La Flaque », un rock lourd un peu à la Fauve, mais en moins facile et racoleur, qui se finit sur un anglais brûlant et énervé. D'autres encore sont complètement instrumentales (« Le Bruit De La Rouille »), compositions sur lesquelles l’aspect expérimental de Sakya se révèle. Il est cependant regrettable qu’on n’entende pas davantage la chanteuse, car sans être monotones ces pistes auraient gagné en profondeur si le chant avait été présent sur une ou deux d’entre elles.
« Bache », plutôt dub/éléctro et aux basses percutantes, attire l’attention sur la production maison de ce nouvel opus de très bonne qualité. Comme une piqûre de rappel pour que l’on n’oublie pas qu’il n’y a pas que les gros labels qui sont en mesure de proposer un son professionnel, et que tous les groupes plus underground n’enregistrent pas leurs morceaux dans leur garage. Un mixage qui contribue également à l’évasion et au repli sur soi-même de l’auditeur, en le confinant dans une bulle intimiste. Ce n’est donc pas un hasard si l’on constate, sans pour autant le reprocher, que les musiciens semblent être, eux aussi, complètement absorbés et que la complicité n’a pas l’air de déborder entre eux pendant qu’ils jouent. Constat probablement dû au sérieux et à la fragilité qui se dégage de leur musique.
Si, comme dit précédemment, l’arrivée d’une nouvelle chanteuse a redynamisé les shows du groupe, Sakya n’en est pas pour autant taillé pour le live, et Cella reste un album qu’on préférera écouter tranquillement chez soi. Même si leur projet Ventilo, un concert surround mêlant images et son, public et musiciens sous un dôme de 13 mètres sur 8, ayant eu lieu en Octobre 2012 à Biarritz a apporté un angle d’approche très original.
Setlist
La Flaque
Le Bruit De La Rouille
Bâches
Sur Lilas Enragés
Condenses
Haïku