Delbi est-il un groupe ? Oui et non. Delbi, c'est avant tout le pseudo d'un jeune multi-instrumentiste dont le style est assez difficile à catégoriser. Pour faire vite, disons qu'on pourrait le rapprocher de Beck : un univers très personnel, qui brasse de nombeuses influences, tout en restant dans le pop / rock. Mais alors que Delbi avait déjà sorti un EP et un premier album, le voilà qui choisit de s'entourer d'un groupe pour faciliter ses projets et surtout leur reproduction sur scène. Au passage, voilà tout un éventail de possibilités qui s'ouvre, et histoire de voir ce que ça peut donner, Delbi (le bonhomme et le groupe désormais) a préféré commencer par écrire un nouvel EP, histoire de vérifier que l'alchimie fonctionne et s'avère satisfaisante. Le but n'est quand même pas de pousser les amplis à 11 sous prétexte que c'est le bordel en studio. Mais il faut bien reconnaître que la musique de l'artiste et ses sbires reste tout à fait singulière, à la fois familière et particulière. Familière, car il n'y a rien ici qui risque de choquer les oreilles de qui que ce soit. Pas d'expérimentations particulières, pas de rythmes barrés, pas de sons distordus. Et pourtant, pas besoin d'être un génie pour piger très vite qu'il y a de la personnalité là-dedans.
Le talent de Delbi tient directement à ses capacités de multi-instrumentiste : les mélodies s'entremêlent avec une aisance très agréable. Les élements viennent s'ajouter délicatement pour des chansons qui sans chercher la montée en puissance à tout prix, parviennent à capter l'attention sans efforts, en ajoutant de nouveaux éléments avec beaucoup de goût. Pas de remplissage, juste une mélodie de synthé entêtante, des guitares qui se font saturées quand le besoin d'en fait sentir, un chant assez simple de prime bord mais qui n'hésite pas à se payer quelques petites envolées pas si éloignées d'un Jeff Buckley (avec parcimonie, les styles pratiqués étant bien distincts). Bien sûr, reste à voir si vous êtes amateur de cette couleur un peu particulière, à la croisée de plusieurs chemins. Personnellement, sans être fou de la musique du présent EP, je dois reconnaître de solides qualités d'écriture et bien assez de personnalité pour trouver le projet intéressant.
On sera plus ou moins sensible aux particularités de chaque chanson, reste que le savoir-faire est indéniable. Une chanson comme "Seven Rays" est un caméléon à elle toute seule, capable d'enchaîner sans heurts plein d'ambiances différentes, du clownesque au mystère avant de conclure sur un refrain énergique, tout en se payant le luxe de jouer sur ses arrangements pour finir sur une petite montée en puissance. Le mystère, "Sinners die in Silence" en est remplie jusqu'à la gueule et conclut cet EP avec une indéniable mëstria. Aussi, pour peu que vous soyez un tant soit peu sensible à la sensibilité/personnalité musicale de Delbi, vous ne resterez certainement pas insensible aux qualités d'écriture du groupe (de l'homme ? et puis merde). Il ne s'agit encore que d'un EP, mais vu le talent de l'artiste, l'intégration réussie d'autres musiciens dans son fonctionnement (et l'enrichissement qui pourrait en découler) et une musique qui a de la gueule, Delbi devrait pouvoir prétendre à une petite carrière pas piquée des hannetons.
