Un album hyper rafraîchissant, un artiste qui a des choses à dire... L'album de Thomas Dove mérite vraiment qu'on y jette une oreille ou deux. Par contre, on ne peut pas dire que le bonhomme soit un grand communiquant. Peu d'infos sur sa précédente carrière, même si on parle bien de premier album solo. Dès lors, on ne saura pas ce qu'il a fait avant. Ce qui n'est après tout pas plus mal, afin de pouvoir appréhender ce Noonmares les oreilles affranchies de tout préjugé. Pour faire simple, Thomas propose des compositions globalement un poil mélancoliques et revendique haut et fort ses deux influences principales, à savoir The Cure et Sonic Youth. Là où ça devient intéressant, c'est que notre homme ne s'y arrête pas, et s'est notamment passionné pour le post-rock et le shoegaze, ce qui se ressent notamment dans le mixage et la production.
En effet, se contenter d'écrire de bonnes compos avec des gimmicks entêtants, c'est bien, mais le faire en se démarquant des glorieux aînés qui ont inventé la recette, c'est mieux. Voilà donc Thomas qui ajoute quelques arrangements pas piqués des vers, qui s'appuie sur sa voix, souvent mixée en retrait avec pas mal de réverb', ce qui pourrait être cheap mais qui est ici tout à fait à propos, puisque le reste de l'espace sonore est ciselé à l'avenant. Le son des guitares, mais aussi de la batterie ont été amoureusement bichonnés, pour un résultat qui a franchement de la gueule, surtout au vu des moyens limités dont l'homme a dû disposer. Ajoutez un petit côté épique, et on n'est même pas si loin de Type O Negative sur "Serotonin", qui fait office d'intro. Le mixage est décidément la donnée essentielle qui vient donner toute sa saveur à l'album. Le son vaporeux sied à merveille aux ambiances inspirées de la new wave et du shoegaze ("Inertia", sa batterie un poil électro, ses petits tics de guitare à la The Cure, ses petits coups de synthétiseurs bien sentis !).
L'album démontre également de solides qualités d'écriture : les mélodies sont suffisamment catchy pour rentrer tranquillement dans nos petites têtes, sans jamais virer dans la facilité crasse : une autre influence du post-rock est ce côté tout en progression ("Drama Jester"), qui cherche à privilégier une évolution naturelle plutôt que de caser à tout prix des refrains imparables à la truelle façon american style. Des qualités d'écriture donc, mais aussi une vraie diversité : n'allez pas croire que tout l'album est une ode à la morosité ambiante. Certes, quelques compos sont tout de même asse tristes ("November à Saint-Lô" ne donne pas envie d'y aller, dans une moindre mesure "Natural selection" porte bien son titre), mais Thomas Dove ne cherche jamais à tomber dans le pathos et n'oublie pas non plus de régulièrement insuffler ce qu'il faut de joie pour que l'auditeur ne puisse ni s'ennuyer ni en avoir assez ni savoir à l'avance sur quel pied danser. L'album a une tonalité gentiment tristoune, c'est un fait, mais il a le bon goût de ne pas s'y complaire et / ou s'y enfermer.
Du reste, ce n'est que du détail. On a là un album de grande classe, avec une vraie personnalité, des qualités d'écriture mises en valeur par une production parfaitement adaptée, qui à la fois s'écoute facilement et parvient à ne pas livrer tous ses secrets dès la première écoute. Car si ce Noonmares passe globalement comme une lettre à la poste, on y revient avec d'autant plus de plaisir que les mélodies révèlent leur force après quelques écoutes, que certains arrangements, notes de piano, percussions, nous ont échappées, ou encore parce que ce n'est qu'après plusieurs écoutes que l'album révèlera sa plus grande force, à savoir son unité. Alors que l'écoute titre par titre semble devenir la norme, l'album est parfaitement cohérent, ni trop long ni trop court, suffisamment varié... Vraiment, une excellente surprise doublée d'un artiste à suivre avec la plus grande attention.
8,5 / 10
