Quelques heures avant le concert de Yes prévu au Grand Rex, c’est à leur hotel parisien que La Grosse Radio a pu s’entretenir avec le claviériste Geoff Downes, récemment réintégré au sein du groupe. Nous avons évoqué ensemble les changements de line up de Yes, le prochain album du groupe qui est prévu pour le début de l’été ainsi que la tournée actuelle. Nous avons également pu recueillir l’avis du claviériste sur ses contemporains comme sur la jeune génération de musiciens officiant dans le prog.
Bonjour Geoff. Merci de nous accorder cette interview pour La Grosse Radio. Tout d’abord, tu es de retour dans Yes depuis trois ans, après avoir joué avec le groupe au début des années 80. Qu’est-ce que cela te fait de faire à nouveau partie du groupe ?
C’est chouette d’être de retour dans le groupe. Yes est le premier gros groupe dans lequel j’ai joué, en 1980, lorsque je l’ai rejoint pour la première fois. Et quand je suis revenu il y a trois ans, c’était presque comme si je ne l’avais jamais quitté. Nous avons écrit Fly From Here (le dernier album du groupe NDLR) à peu près de la même manière que nous avions réalisé Drama. Au début c’était un peu étrange de se retrouver dans la même pièce que les autres membres du groupe, puis petit à petit les choses se sont faites naturellement. Et cela s’est vraiment bien passé car aujourd’hui le groupe est vraiment soudé, vraiment fort. C’est également pour cela que je suis très fier d’en faire partie.
Ce soir, vous allez jouer à Paris pour un concert très spécial, célébrant The Yes Album, Close to the Edge et Going for the One. Pourquoi avez vous fait le choix d’interpréter ces albums en particulier?
Et bien je pense que The Yes Album est representatif du début de carrière de Yes, car il y a plusieurs choses qui ont forgé notre son : le côté rock et notre identité musicale. Close to the Edge marque le début de la période plus expérimentale de Yes, il contient tout ce qui était bon dans la première partie de notre carrière et en même temps a ouvert un nouveau chapitre. Pour Going for the One, je pense que Yes a commencé à rompre avec le passé et à tenter de nouvelles approches. Mais les choses sont venues naturellement pour le choix de ces albums et nous n’avons pas trop à nous questionner sur ce que nous faisons.
Tu es également membre d’Asia, puisque tu as fondé le groupe dans les années 80. Cela est-il difficile pour toi de jouer avec les deux groupes, surtout aujourd’hui puisque vous venez de sortir Gravitas avec Asia ?
Non, même si évidemment les deux albums ont des dates de sorties relativement proches (le prochain album de Yes sortira début Juillet NDLR) ce qui peut compliquer les choses d’un certain point de vue. Mais nos managers ont été très cooperatifs l’un envers l’autre, pour s’assurer que les deux sorties ne se chevauchent pas. Pour moi c’est une dose de travail en plus, car c’est un peu compliqué d’être sur la route avec Yes et Asia. Mais en toute considération c’est une bonne chose, car peut être que l’année prochaine je serai plus occupé avec Asia.
Le dernier album de Yes, Fly from Here est sorti en 2011. Comment s’annonce le nouvel album et le futur du groupe?
(Mystérieux NDLR) Le prochain album de Yes sortira en Juillet. C’est un album très intéressant car Jon Davison est réellement devenu un membre à part entière du groupe. Je pense qu’il ouvrira un nouveau chapitre dans l’histoire de Yes.
La pochette du prochain album de Yes, Heaven & Earth
Tu mentionnais Jon Davison qui est récemment devenu le nouveau chanteur de Yes, après le départ de Benoit David. A-t-il été facilement accepté par les fans au cours des concerts qu’il a pu donner avec vous ?
Oui, je pense que Jon a été massivement accepté par les fans. Il possède une très bonne présence scénique et il est très respectueux envers la musique de Yes, ce qui est quelque chose de très important. Il s’approprie son rôle avec respect envers les autres membres de Yes. Et nous l'apprécions pour la façon dont il fait tout cela.
Comment l’avez vous choisi?
C’était il y a environ deux ans, quand notre précédent chanteur Benoit David a quitté le groupe. Jon nous a été recommandé et nous avons su qu’il trouverait sa place. Nous avons commencé à travailler avec lui, de façon tout à fait naturelle. C’est quelqu’un de fantastique et c’est vraiment super de travailler avec lui.
Il est également le plus jeune membre du groupe, puisqu’il est né au début des années 70. Qu’est-ce que cela représente pour toi d’avoir plusieurs générations qui se confrontent au sein de Yes ?
Je pense que Yes a toujours eu pour but de toucher plusieurs générations. Le groupe existe depuis 45 ans maintenant. La musique de Yes est intéressante et je pense que les gens qui viennent à nos concerts sont des gens qui ont grandi avec nous ainsi que des jeunes qui trouvent que la musique du groupe est hors du temps. Le fait que nous ayons axé notre carrière sur l'aspect musical a eu un grand impact sur le public et a aidé les jeunes générations, qui n’ont pas grandi en nous écoutant, à apprécier notre musique.
Tu as joué sur deux albums de Yes, Drama et le dernier Fly From Here. Lequel de ces albums est ton préféré et quelle chanson dans le répertoire apprécies-tu plus que les autres ?
Et bien pour moi Drama est un album très intéressant, sur lequel nous nous sommes tous lancé des défis. Donc cela serait sans doute mon album préféré de Yes.
Et dans toute la discographie?
Close to the Edge est un super album, il y a de très bons albums pour toutes les periodes de Yes. Mais pour les chansons présentes sur les albums sur lesquels j’ai joué, je dirais que "Machine Messiah" (sur Drama NDLR) est la piste dont je suis le plus fier.
Steve Howe, Geoff Downes, Jon Davison, Alan White et Chris Squire
Les claviers ont toujours eu un rôle à part entière au sein du prog, et la technique a été longtemps au centre de ce style musical avec des virtuoses tels que toi, Keith Emerson ou encore Rick Wakeman. Selon toi, virtuosité et musique progressive sont elles indissociables l’une de l’autre ?
Oui. Je pense qu’il y a toujours eu de grands claviéristes avec un excellent niveau. En ce qui me concerne, je suis plus intéressé par les orchestrations classiques, alors que Rick Wakeman (ancient claviériste de Yes NDLR) est d’avantage un joueur lead fait pour être sous les projecteurs. Tony Kaye (également ancien claviériste de Yes NDLR) a de son côté un jeu plus basique, avec une coloration presque blues. Et Keith Emerson (Emerson Lake and Palmer NDLR) est quelque part au milieu de tout cela.
Aujourd’hui quels sont les jeunes groupes de prog que tu aimes en particulier? Et si tu devais en choisir un pour effectuer la première partie de Yes, qui serait-ce ?
Je trouve qu’il y a des groupes très intéressants en Angleterre. Il y a un vrai mouvement prog là bas. Tu les connais certainement mieux que moi, mais j’aime bien John Mitchell qui joue dans plusieurs groupes comme It Bites ou Arena. Il joue vraiment à sa façon avec son style. J’ai toujours été intéressé aussi par les groupes comme Scale the Summit, un groupe très technique, plus métal prog aussi. Mais il y a vraiment plein de groupes intéressants. Cela me rapelle l’époque où il y avait ce que j’appelle le "Big Five", avec des groupes comme Yes, Genesis, King Crimson, Emerson Lake & Palmer et Pink Floyd d’une certaine façon. Tous ces groupes ont contribué à l’émergence de ce qu’il se passe actuellement. Ce sont les graines que nous avons plantées en quelques sortes.
Merci pour cette interview Geoff. Nous te souhaitons un très bon concert ce soir. Avant de nous quitter je te laisse adresser un mot à nos lecteurs.
Et bien, puisqu’il y a de grands fans de musique progressive, surtout en France, je souhaite à tout le monde un bon concert, et surtout merci de nous soutenir de la manière dont vous le faites !
Entretien réalisé à Paris le 13 Mai 2014.
Merci à Elodie Jouault et Elodie Briffard de HIM Media.
