Justine – d+ m-

Justine, Jutsine ou encore Jusitne (et si vous avez appris à lire avec la méthode globale vous avez dû vous y reprendre à deux fois pour comprendre cette énumération) s'énerve même sur la typographie avec ce quatrième album, d+ m-. Vous avez peut-être vu ces quatre Treilliérains au Hellfest 2013 pour la réédition de leur premier album, ou bien un peu partout depuis 2006, parce qu'un enragé ça bouge beaucoup. On commençait à croire que les groupes qui chantent en français étaient morts, ou fossilisés vivants. Mais non, ils existent, ils ne sont pas ringards. On saute partout, on crie, c'est bon, c'est fédérateur.

On sent bien le goût de la Guérilla asso, fort en bouche un peu astringent au début, impossible de ne pas les rapprocher de leurs comparses de la Guérilla Poubelle. C'est râpeux, ça lave les oreilles et on en redemande, parce que la guitare sait ce qu'elle fait et appuie pile là où ça motive. Il y a toute une époque en condensé dans Justine, musicalement et lyriquement parlant. Dans d+m-, on sent la voix du chanteur (relativement, restons polis) plus posée que dans Du pareil au même, mais je n'irais pas insulter un groupe de punk en leur parlant de l'acquisition d'une certaine maturité. Parlons plutôt d'expérience, celle d'un groupe fourmillant de bonne volonté qui "avance dans l'indifférence et la joie" et qui reste en tout moment festif et agréable.

Justine, punk, rock, nantes

La foison de coquilles volontaires dans le livret de cet opus tout chaud annonce la couleur : "On n'en a rien à foutre de l'ordre des lettres, disent-ils, car le langage ne traduit pas la pensée." Et pourtant, il l'emploient, le langage, le leur, et aussi celui d'autres ; alors où veulent-ils en venir ?

Ce qu'il y a de bien (ou pas, et après tout, c'est peut-être ce que les autres groupes visent) avec les chansons en français, c'est qu'on peut également juger sur les paroles. Bien souvent pour s'en prémunir, les groupes de punk postillonnent plus qu'ils n'articulent. Bon point, les Justine ne tombent pas sous ce travers, leur énervement et leurs références ne renoncent pas à être audible. Mais peut-être que ce vernis de phrases scandées aurait été salutaire, afin de camoufler une subversion factice. On s'énerve avec Justine, mais on ne sait pas trop pourquoi ni contre qui. Ils ont tenté de nous l'expliquer, justement, dans "Contre quoi", que lutter c'est bien, mais la pudeur sans doute les empêche de se montrer par trop explicites ; et c'est bien dommage, car un album s'inspirant de La Métamorphose ne devrait jamais être sous-estimé.


Forçons le passage, "tu sais que tu peux toujours y mettre du sens". C'est vrai qu'ils sont insidieux ces "rhinocéros", dictatoriaux. Et ces hommes qu'on nous vend  comme  "providentiels" ne le sont pas réellement. Ils cherchent sans doute à uniformiser la société, à l'image de cette "Factory girl". Mais nous ne le saurons jamais, car "au plaisir de vous décevoir", Justine foisonne et s'éparpille, mais c'est peut-être un "faux problème". Je suis sans doute hermétique aux sous-entendus et aux accumulations de sonorités qui claquent juste pour la poésie. Oui, je voudrais un guide, ou une plus grosse culture peut-être ? Justine ne vise clairement pas la populace. Et c'est là que doit finalement résider son esprit de contestation.

D+m- réchauffe, il s'écoute de bout en bout, se réécoute, on peut y appliquer un sens, par applats ou pointillés, à l'envi finalement. C'est ça la poésie. Vous ne me croyez pas ? Constatez-le par vous-même :

NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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