Quand Mariusz Duda n'est pas occupé avec Riverside, il s'occupe de son projet parallèle Lunatic Soul, qui propose déjà son 4e album. Musicalement, la parenté avec Riverside est en partie évidente, puisqu'on retrouve la voix et les ambiances mélancoliques chères à Mariusz, et délicate dans la mesure ou sur le plan strictement musical, Lunatic Soul est bien plus atmosphérique. Pas électronique, dans le sens où si la technologie est parfois utilisée, c'est surtout pour ajouter des éléments à une base qui fait appel à des instruments conventionnels. L'influence de Tool a été évoquée, à raison, car s'ilne faut pas s'attendre à trouver un ersatz du géant américain, il arrive qu'on en ressente l'influence dans des ambiances étrangement attirantes.
Il faut tirer un grand coup de chapeau à Mariusz, qui propose vraiment quelque chose de différent de ce qu'il compose pour son groupe principal, et affirme une autre part de sa personnalité. D'un point de vue artistique, rien à redire. Un titre comme "Gutter", tout en retenue, qui tourne autour d'une boucle unique pendant près de 9 minutes, parvient à concilier simplicité et exigence en refusant la simplicité et en ayant le bon goût de ne jamais chercher la surenchère. Une rythmique qui ne vous lâche pas, un riff de basse intriguant, et une belle voix versatile qui se pose en véritable chef d'orchestre. Il n'en faut pas plus pour que l'on écoute le titre avec plaisir et sans se lasser d'un bout à l'autre.
Niveau influences, citons également le Nine Inch Nails de Ghosts, voire le Trent Reznor qui compose les bandes originales des derniers films de David Fincher. L'instrumentale "The Fear Within" porte bien son nom, longue piste très atmosphérique où l'inconfort le dispute à la paix, qui l'emporte... Avant que le titre suivant ne nous fasse poursuivre vers d'autres horizons. Pas d'électro à proprement parler, mais une musique parfois proche de l'ambiant. Malin, c'est à ce moment de l'album que Mariusz envoie "Treehouse", le titre qui se rapproche le plus d'un single, bien qu'il refuse une fois de plus la facilité et privilégie le naturel à tout effet de style. Après autant de titres très atmosphériques, ce court retour sur terre est aussi agréable qu'idéalement placé.
Tout cela est bel et bon, mais (car il y a un mais), l'album est long, et autant l'ami Mariusz est doué pour pondre de belles mélodies, autant sa maîtrise de l'ambiant laisse encore un poil à désirer. Du coup, il se retrouve à jouer un peu trop souvent avec les mêmes recettes, qui aussi agréables soient-elles, n'en deviennent pas moins un peu redondants. Ainsi, l'introduction de "Pygmalion's ladder" aurait clairement pu être écourtée, alors que la suite passe parfaitement bien. Un plus gros travail sur les arrangements aurait peut-être permis d'éviter ce petit écueil, mais il est également possible que l'approche minimaliste trouve ses adeptes. Si de l'avis de votre serviteur, l'album se perd un peu ici et là, il n'en demeure pas moins très réussi, mélange improbable du progressif moderne de Riverside, de la scène de Los Angeles et de bandes originales, et devrait ravir tous les amateurs d'ambiances envoûtantes et parfois sensuelles.