Tav Falco – Command Performance

Tav Falco ne se présente pas… Ne se présente plus… Je le sais, mais avant de commencer à parler du nouveau Method Command, je ne peux m’empêcher de ressortir quelques lignes de son C.V. fourni. Tav Falco est un artiste complet. Dès la fin des seventies, le natif de Philadelphie installé à Memphis se retrouve sur toutes sortes de scènes.

D’abord vidéaste underground, la légende veut qu’il soit repéré par Alex Chilton lors d’une séance où il massacre sa guitare à la tronçonneuse. Ca pose le personnage. Peu de temps après, Tav Falco mettra en place son groupe les Panther Burns. Quelques albums sauvages suivront, notamment le tout premier Behind The Magnolia Curtain.

En marge de tout ça, Gustavo Antonio Falco est aussi acteur et réalise des courts métrages. Un gars complet. Installé en Europe depuis la fin de années 90, le monsieur est toujours fan de l’underground. Côté musique, on l’associe au Gun Club, à Jim Dickinson ou aux Cramps pour la partie rebelle mais il y a tout un tas de nuances plus pop ou parfois exotique dans sa musique. Mélangez tout cela, secouez bien, décollez la pulpe et vous avez entre les mains le nouveau Method Command.
 

Pour découvrir l’univers de Tav Falco, voici "Bourgeois Blues"
Extrait du concert du 11 février 2014 au Blues Kitchen à Camden


Ce nouvel album regorge de pépites illustrant les mutiples facettes de Tav Falco. Du rock ‘n' roll "crampsien", bien évidemment, il y en a... Et du bon ! "Doomsday Baby" avec son tempo rapide peut faire penser à un crooner rock des temps modernes. On peut trouver une pincée de Jon Spencer, matiné de Charlie Feathers et de Lux Interior. Que des valeurs sures.

Avec "Master Of Chaos", on obtient des ambiances chargées d’émotions façon vieux titres sixties comme "Charlotte Remains" avec une ambiance si particulière à la limite du film d’horreur. Une très bonne idée pour une B.O. de film série Z. C’est dans l’esprit. Coté guitare, ça twangue sur le solo !!!

On sent aussi dans cet album le folk blues de l’Amérique profonde. "Breakaway", dès les premières notes, nous embarque dans un univers à la croisée des chemins tracés par Johnny Cash et Jerry Lee Lewis.

Le prêche de Tav Falco en ouverture de "Whistle Blower" nous renvoie vers une Amérique désabusée. Un son épuré et minimaliste, un retour aux sources à la manière d’un Ben Vaughn partie enregistrer son dernier opus au milieu du désert mojave.

"Memphis Rumble" nous embarque dans un americana cher à John Cougar Mellencamp. C’est rock ‘n’ roll dans l’esprit, country dans l’âme, gavé de soul, bref c’est Tav Falco. "Fire Island", avec un coup de mélodeon, met le feu en revisitant des thèmes cajun. On vous disait que le gars en connaisanit un rayon sur la mixité culturelle aux USA. Sa musique épicée en est le digne reflet. Le solo sonne blues à souhait, planant comme une bonne intro des Doors au clavier…

Le blues est aussi partie intégrante de l’œuvre de Tav Falco. "Me And My Chauffeur Blues" nous rentraine dans un blues traditionnel de Memphis Minnie mais toujours en restant dans cette subtilité, marque de fabrique de monsieur Falco. On est loin du registre Fat Possum mais beaucoup plus proche d’un Robert Johnson dépoussiéré mais jamais trahi.

Avec "He’ll Have To Go" on retrouve chez Tav Falco et ses Panther Burns la façon qu’ont eu et qu’on encore les Rolling Stones quand il s’agit de s’approprier de vieux thèmes blues. La guitare joue juste.. Pas trop de notes, ici on privilégie l’efficacité et le feeling. Et pour moi, ça fonctionne diablement bien.

Tav sait aussi nous emmener dans des ambiances beaucoup plus tranquilles comme avec "About Marie Lavena", petite incursion vers un blues lorgnant vers la pop psyché. On reste dans des finitions de morceaux soignées avec plein d’instruments mais on pourrait se croire dans une vieille compil Peebles en fermant les yeux…

Une des forces de Tav Falco, c’est le choix assumé de l’exotisme. Les Panthers Burns ont quand même livré un album entier de tango... On sent dans ce nouvel opus la maitrise de plusieurs styles très différents. "Bangkok" aurit pu figurer dans les compils Jungle Exotica. Tav oscille entre le Screaming Jay Hawkins brut et les feulements plus feutrée d’un Lux Interior. Et pour la petite histoire c’est une compo de feu Alex Chilton. Dans le même registre, avec une ambiance lounge, Tav nous livre son interprétation de de la fièvre de la jungle. Beaucoup plus assumé, réfléchi que ce qu’en ont fait les Cramps, "Jungle Fever" s’appréhende comme une moment de bien être. Une bien belle manière de rendre hommage à Charlie Feathers, créateur du morceau.
 

Pas encore de clips pour ce nouvel album, donc pour illustrer la capacité de Tav Falco à remettre au gout du jour les vieux titres obscurs des sixties, voici sa relecture  de Funnel Of Love popularisée par Wanda Jackson.


"Kumbetta", titre exotique à souhait, nous propose un duo entre Tav Falco et une voix féminine qui fonctionne parfaitement à l’image des Gainsbourg - Bardot ou des Hardy - Dutronc mais posée sur une musique avec quelques instruments à vents, ce qui donne un petit coté musique klezmer comme le faisait si bien les Kabalas (si vous ne connaissez pas, payez-vous un coup de You Tube, vous devriez apprécier...).

Voilà, c’est ça Tav Falco, ça a beau partir dans tous les sens, on retrouve toujours cette sincérité en tant que fil conducteur d’un album très bien foutu d’un Tav assagi mais toujours inspiré. Une belle réussite.

 

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



Partagez cet article sur vos réseaux sociaux :

Ces articles en relation peuvent aussi vous intéresser...

Ces artistes en relation peuvent aussi vous intéresser...