Un duo pareil, ça ne peut venir que de Belgique, un endroit où la création est bien moins complexée et ampoulée que chez nous ! Quoique la Belgique, c'est vite dit, puisque si c'est bien à Bruxelles que le duo s'est rencontré puis formé, ses deux membres sont respectivement canadien et alsacien. Toujours est-il que l'accordéoniste tombe amoureux de la grosse voix et que les deux compères ont monté The Summer Rebellion, duo de rock paysan relativement inclassable, qui se contente d'une batterie, d'accordéon et du chant (et quelques extras à l'occasion). Mais attention à cet accordéon-là, parce que le monsieur le maîtrise au moins aussi bien que d'autres la Gibson SG ! Rythmiques endiablées, solos ultra véloces, travail sur le son, en termes de dextérité musicale, The Summer Rebellion ne s'en laisse pas conter et affiche autant de maîtrise que d'inventivité.
Parce que les riffs d'accordéon (ça se dit ?) sont vraiment bien trouvés, parce qu'une véritable âme de rockeur vit dans ce duo, parce qu'ils s'amusent à ajouter de nouveaux ingrédients de temps à autres, comme cet excellent violon sur le tout aussi excellent "Never stop sinning", voire du scratch sur le génialement improbable "Restless soul", on ne s'ennuie pas sur cet album, capable de passer d'un titre de basse-cour à des influences hip-hop, bluesy ("From a great height" et ses paroles délirantes) ou chanson tragique ("Delirius", qui porte bien son nom). Le duo déborde d'inventivité (ce break de la mort sur "Juliet", qui se rapproche presque de la musique de jeux vidéo) et ne se fixe que très peu de limites. Pourtant, proposer un album entier malgré un concept qui se destine à priori avant tout au live et aux festivals, voilà qui n'augurait pas forcément du meilleur. Mais à l'instar d'un Inspector Cluzo ou des jeunes de Bottle Next, The Summer Rebellion n'a pas froid aux yeux et démontre avec brio qu'on peut proposer de la musique aussi délirante que bien troussée.
A dire vrai, si limite il y a, elle est intrinsèque. Car si la grosse voix genre vieux marin tenancier de bar est très rigolote, elle est aussi archi-monocorde et limitée. Ca ne gênera pas tout le monde (après tout, plein de gens adorent Motörhead), d'autant que pour le reste il n'y a pas grand chose à redire (l'enregistrement est soigné, et leurs clips sont irrésistibles). Mais c'est assurément le talon d'achille d'un groupe qui, pour le reste, a tout pour plaire. Ca, et le fait qu'il vaut mieux ne pas être allergique à l'accordéon ! Reste que l'essentiel est ailleurs : si The Summer Rebellion parvient à proposer un aussi bon premier album, c'est que ses capacités ne se limitent pas à faire les singes sur scène et qu'une vraie carrière s'offre à eux. Reste plus qu'à aller voir ça sur scène, qui restera à n'en pas douter leur domaine de prédilection.
