Sharrow – Emergence

"Comme si Fromuz avait soudain décidé de diriger sa musique vers des horizons plus sombres et étranges, ou de copuler avec Univers Zero"

On savait la scène rock prog australienne vivace et de grande qualité : Karnivool, Cog, Dead Letter Circus… Et encore, on se doute que ces formations, dont la côté de popularité est montée de par chez nous, ne représente que la partie émergée de l’iceberg. Nouveau venu, Sharrow, sextet originaire de Melbourne, est moins rock et beaucoup plus prog que ses compatriotes. C’est davantage vers King Crimson, Franck Zappa, voire des trucs bien plus sombres comme le laissent supposer les deux titres qu’ils ont sorti en juillet dernier, qu'il faut chercher leurs principales influences. Mais il faut bien commencer qelque part, pour eux comme pour nous, et c’est donc vers leur premier mini album que nous allons nous tourner afin de faire plus ample connaissance.
 


australie, melbourne, doom for alice, mobius dick


4 titres intitulés « Part 1 », « Part 2 », etc, plus de 30 minutes de musique instrumentale, rien à foutre des refrains, des structures, des mélodies faciles… Le jusqu’au boutisme du groupe force le respect. Seule la musique compte, et les codes, les conventions, ne sont là que pour être piétinées, méprisées, ignorées et jetées aux orties. Bien sûr, on exagère un peu, puisque ce type même de démarche n’est pas nouveau en soi, mais s’inscrit plutôt dans une veine qui depuis les années 1970 n’a plus connu beaucoup d’adeptes. Pourtant, le groupe australien a l’air bien décidé à reprendre le flambeau de la liberté absolue. Cette liberté donnée aux compositions est assez jouissive, comme si Fromuz avait soudain décidé de diriger sa musique vers des horizons plus sombres et étranges, ou de copuler avec Univers Zero.

Rien à dire sur le fond donc. Sur la forme, le tout n’est pas encore parfaitement rôdé. Car le refus d’utiliser des mélodies accrocheuses conventionnelles, doit être compensé par une musique véritablement forte, habitée, douée d’une identité telle qu’elle s’impose d’elle-même. Or, si les compositions sont intéressantes, ce n’est pas encore tout à fait le cas. Mais là n’est pas l’essentiel.

L’essentiel, outre que cette formation fera grand plaisir aux amateurs de progressif anti-conventionnel (si si, il y en a !), c’est qu’elle a le potentiel pour aller vraiment loin. Car ce qui nous est donné à écouter n’est jamais qu’un premier jet, qui s’il n’est pas encore une réussite éclatante, n’en reste pas moins intéressant, et fait preuve d’une grande ambition. De l’ambition, bon dieu ! Si c’est pas ce qu’il manque à une grande majorité de formations actuelles, quel que soit le style considéré… Et cette ambition pourrait bien payer sur le long terme. Ainsi, les deux titres mis en ligne en juillet 2015 font déjà preuve d’une bien plus grande maturité : toujours aussi fous, mais mieux maîtrisés, avec des contrastes plus marqués, et l'introduction d'un chant bien en phase avec l'ambiance… Sharrow a tout d’un futur grand. Et s’il ne l’est pas encore, sa progression rapide mérite que l’on garde son nom dans un coin de notre tête, et que l'on guette ses prochaines sorties.
 


L'un des deux nouveaux titres, qui reflètent davantage l'identité du groupe.

 

Quelques liens : Bandcamp, Facebook, Site

 

NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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