Il est des groupes comme des combats. Certains sont plus légitimes que d’autres, préférant la crédibilité au batifolage stérile et aux postures convaincues. La pertinence, H2O en a fait son fer de lance pour finir par s’imposer comme référence indiscutable du punk-rock américain.
Fondé en 1994 par Toby Morse alors qu’il était roadie du taulier Sick Of It All, le groupe a traversé deux décennies en écumant, aux côtés des plus massives formations (Rancid, Dropkick Murphys, NOFX Sum 41, Madball), tout ce que le globe peut compter en scène hardcore. H2O, c’est un peu le groupe qui a tout pour lui. Une discographie réglementaire avec une moyenne d’un album tous les deux-trois ans. Des paroles bien aiguisées et sans prétention. Une énergie débordante entre Pennywise et Bouncing Soul pour le côté oï. Et une majorité de titres ne dépassant pas les 3 minutes.
N’hésitant pas à passer d’un pop-punk « Get The Time » à un lâchage de fauves dans « Said Gun » sur Don’t Forget Your Roots (tout est dans le titre), la maîtrise du genre des cinq New-Yorkais n’est plus à prouver. Pour autant, ils ne semblent pas déterminés à arrêter de prouver de trucs. Preuve en est ce Use Your Voice et sa douzaine de titres encore plus tranchant, plus vifs, plus convaincants même, que le précédent.
Témoins d’une époque où le skate-punk et le punk hardcore n’avait pas forcément besoin d’être synonyme d’extrémisme musical ni de bourrinage intempestif, c’est à se demander comment le groupe a réussi à survivre jusqu’ici. La réponse se trouve peut-être dans des morceaux comme « Black Sheep », furieuse entame déclenchée pied au plancher après une courte, mais inspirante récitation de Toby sur l’être humain et notre individualité. Menant sa board entre punk bien burné, hardcore à la Agnostic Front et skate-punk jouissif, H2O est de ce genre de groupe trop rare. Modeste dans l’attitude, s’efforçant de délivrer un message positif comme sur « Father Figure » ou « Popage» sans verser dans le lieu commun à deux balles. Efficace et foutrement authentique dans les sonorités conservées intactes malgré la patine du temps, H2O balance des power chords à plus savoir quoi en faire sans véritablement tomber dans la répétition. Pas de malentendus ici : ce n’est pas du free jazz ou du métal progressif. Comme le hurle dans le sympathique et soft « Popage » : on est dans le ludique, dans le récréatif. Il n’y a donc rien d’étonnant à trouver des rythmiques syncopées dans « #NotRealLife » évoquant un fantôme ska-punk comme aurait pu le faire NOFX à une autre époque.
Parce qu’il est aussi humble que grisant, aussi rafraichissant que nécessaire en ces temps sombres pour le punk harcore, Use Your Voice est un disque qui saura convaincre les curieux tout en confirmant aux amateurs et vieux de la vieille que H2O reste, six albums plus tard, un groupe majeur de la scène punk hardcore américaine.