Poignot
En première partie de ce spectacle au Zénith de Montpellier, nous découvrons le chanteur Jean Marc Poignot, accompagné de Yan Péchin et de Jean François Assy. Il nous présente son album Loup commun.
On aura droit à 6 chansons aux textes intimes, accompagnées par les gros solos de la guitare de Yan Pechin et par le cello de Jeff Assy qui apporte les basses au trio et donne une note mélancolique au set.
Cela débute par un "ça pique un peu", continue sur un manège, puis par un "Appel" au beau solo de guitare final. Un "Court métrage" aux paroles poétiques : "éteinds-moi la lune, tous ses reflets m'importunent" et suivi de "L'homme qui rit" et qui nous explique pourquoi : "vous pouvez rire de moi, mais vous pouvez preparer vos sanglots [...] je suis le plus fou, le plus moqueur des loups de la meute [...] Je suis l'homme qui rit à la Chambre des Lords ".
Pour finir, Poignot chante sa meilleure amie, il parle de sa colère à la bouche grasse et rouge, l'intime de rester tranquile. Chanson pendant laquelle tout du long court une note de cello, mise en loop.
Une sympathique découverte servie par l'intense Yan Péchin (Alain Bashung, Brigitte Fontaine, Jacques Higelin...). On en redemande.
Hubert-Félix Thiéfaine
Un gros public de fans ce soir, le Zénith de Montpellier se remplit rapidement une heure avant le début du show. Rencontre avec Nathalie, qui vient d'apprendre qu'elle est en train de se faire bouffer par cette salope de crabe, et qui vient noyer son désespoir au Champagne au premier rang avec la joie triste de voir celui avec lequel elle aurait aimé se marier si elle ne s'était pas casée avec son mari. Les drames ne sont pas que nationaux, mais bien aussi personnels, c'est ainsi qu'est faite cette con de vie. Je lui dédicace toutes mes photos du jour car elle comptait fort sur moi pour les photos puisque la sécurité a fait du zèle ce jour en mettant au placard certains appareils photos... Le videur me faisant même la tronche en me laissant passer avec mon téléobjectif 70-300 mm et m'expliquant que je n'aurais pas le droit d'aller dans le pit (l'espace entre la scène et la fosse) pour prendre les photos malgré mon pass photos mais que je devrais prendre mes clichés depuis le public... Ca commencait mal... Mon appareil photo n'est pas une arme de destruction massive, mais une arme d'information et d'émotion active. Puis comme les mecs de la sécurité ne sont pas tous finis au même jus, j'arrive avec un autre photographe à me retrouver miraculeusement dans le pit, un autre garde nous laissant finalement passer... Et là, ça a été un moment magique pour les trois premières chansons où j'ai pu enchainer les portraits de HFT. Pour le reste, c'est ci-dessous.
Dès que les lumières s'éteignent, le public acclame la formation qui entre en scène avec aux guitares, Alice Botté (c'est un mec, hein) et Lucas Thiéfaine; à la basse, Marc Périer; à batterie, Bruce Cherbit; au clavier et à la guitare, Christopher Board et un immense corbeau sur la toile de fond de scène.
Le concert débute avec "En remontant le fleuve" du dernier album, La Stratégie de l'inespoir qui sera logiquement le disque le plus représenté ce soir avec 9 chansons sur les 25 que comporteront ce spectacle de deux heures. Très bon accueil par le public pour une douce entrée en matière.
Il poursuit avec "Amour désaffecté", musique presque légère, pour ses paroles terribles : "Ils emportent le souvenir de nos baisers chargés de fiel ".
Le show continue et débute pour de bon avec le classique "Errer Humanum est", le public chante avec HFT et commence à se bouger.
On poursuit avec "Médiocratie...", médiacrité, issu du dernier album, pamphlet juste contre notre société molle qui vit derrière les écrans de Facebook...
Pendant "Confessions d'un never been", Thiéfaine sort de scène et laisse finir ses musiciens. Dans le public le mec baraqué à la mine patibulaire devant moi s'incline et remercie Hubert-Félix "Merci ! Ça fait du bien !"
Dans l'"Angélus" les paroles sont toujours aussi fortes:
"Je te salue seigneur, du fond de tes abîmes
De tes clochers trompeurs, de tes églises vides
Je suis ton cœur blessé, le fruit de ta déprime
Je suis ton assassin, je suis ton déicide"
En introduction de "Karaganda Camp 99", HFT cite le poète Józef SzczepaŠ„ski, né en 1922, mort en 1944 lors de l'insurection de Varsovie, trois jours après avoir écrit le texte "Czerwona Zaraza" dont les premiers mots sont "Nous t'attendons, peste rouge, pour nous délivrer de la peste brune" puis la batterie martèle, appuyée par les lumières rouges et stroboscopiques. Le clavier joue une partie electro/épileptique et les guitares sont rageuses.
Encore un poète invoqué : Cesar Vallejo avec son "Piedra negra sobre una piedra blanca" qui a inspiré HFT pour l'écriture de "Autoroutes jeudi d'automne " au doux surréalisme absurde "Il est bientôt minuit, mais je fais beaucoup plus jeune" avec toujours de bons solos de guitare de Lucas Thiéfaine. Fin de chanson courte nette et abrupte, ça bouscule un peu mais c'est bon.
"Femme de Loth" débute avec une grosse montée en rythme de la batterie, suite presque Punk. Pont avec riffs et solos de guitare punk/rock 80's, et Hubert-Félix de conseiller "Ne te retourne pas Lady, prends tes distances"...
"La ruelle des morts" avec sa première mesure dans une mélodie enfantine au clavier, soutenue ensuite par la batterie et les guitares. Le style est plus chanson à la mélodie légère mais toujours ses paroles entre la nostalgie et le désespoir :
"Que ne demeurent les automnes
Quand sonne l'heure de nos folies
J'ai comme un bourdon qui résonne
Au clocher de ma nostalgie
Les enfants cueillent des immortelles,
Des chrysanthèmes, des boutons d'or
Les deuils se ramassent à la pelle
En bas, dans la ruelle des morts"
Pour "Fenêtre sur désert", HFT commence seul à la guitare sèche, puis est rejoint par ses musiciens, dans une lumière verte, avec des accents violets, qui donnent envie de boire cette chanson aux paroles sensuelles comme un poison délicieux et pervers. Troublant.
HFT nous raconte comment en revenant à vélo d'une manif' contre la centrale nucléaire de Fessenheim il a écrit "Alligators 427". Légende ou pas, on s'en balance. Il nous rappelle l'origine du goguenard "Vive la mort", qu'il chantait en dérision des franquistes espagnols et leur sinistre "viva la muerte". On dirait que le climat actuel lui laisse cette phrase en travers de la gorge. Il nous enjoint de la prendre au 14 ème degré... Acclamation du public. Et commence la chanson psalmodiée. "J'ai troqué mon coeur contre une trique". Les lumières sont blanches et rouges, avec des rayons jaunes qui balayent lentement la scène, comme d'inquiétants faisceaux lumineux de miradors. Musique d'apocalypse, les guitares ont l'air de jouer des bruits urbains (sirènes et moteurs). Puis Lucas balance un solo bluesy, accompagné d'une batterie presque disco punk ! HFT quitte la scène, la chanson se poursuit en dissonances, avec les guitares en roue libre.
Pour "Je t'en remets au vent", le chanteur jurassien revient sur scène, seul, avec sa guitare, en appelle à son public le plus fidèle, ceux qui l'ont connu au cabaret de la rue Mouffetard. Il commence les premiers accords, le public reconnait aussitôt le titre et chante avec lui. Moi aussi. J'ai (un peu) les larmes au yeux (je vieillis, bordel).
Hubert-Félix continue seul, à la guitare et à l'harmonica, "Petit matin 4.10 heure d'été". Cette chanson réscapée de son album abandonné en 2008, Itineraire d'un naufragé et présente sur Suppléments de mensonge". Pas besoin d'en rajouter à ces paroles :
"Mes yeux gris reflètent un hiver qui paralyse les cœurs meurtris
Mon regard vient de l'ère glaciaire mon esprit est une fleur flétrie
Je n'ai plus rien à exposer dans la galerie des sentiments
Je laisse ma place aux nouveaux-nés sur le marché des morts-vivants
Je rêve tellement, d'avoir été que je vais finir par tomber"
Retour du groupe .Quelques vers de Baudelaire, pour introduire "Syndrome Albatros". Dans une ambiance bleu aquatique, Alice Pottier fait slider sa guitare et donne une note tahitienne à cette chanson et son appel à rejoindre les hauteurs de ses "cathédrales marines". "C'est une fille albatros, ta petite soeur jumelle, qui t'appelle et te veut dans son rêve androgyne".
Sur une longue note d'orgue, s'introduit la chanson éponyme de l'album Stratégie de l'inespoir. Les lumières sont d'abord rouge sang, puis se colorent de jaune et d'orange feu pour le refrain "Je veux brûler pour toi petite ...". embrasement des guitares. Lucas Thiéfaine, c'est pas Yan Pechin, mais on peut vraiment dire qu'il se démerde bien !
La montée Rock se poursuit. On finit par piger que la formation à 2 voire 3 guitares électriques, c'est pas pour bercer le public. Hubert-Félix Maiden ou Iron Thiéfaine, on ne sait plus. Des gros coups de batterie cognent dur, et "Loreleï Sebasto Cha" commence. ROCK ! Sous des lumières noires et blanches tranchantes, Alice Pottier colle des arpèges de Hard Rock. HFT a des postures de conteur grandiose, tendu vers le public, voix plus imposante que jamais....
C'est la fête sur scène, ils ont vraiment l'air de prendre leur pied, et le public se lache, tous les bras sont levés, et entonne le riff de guitare de la "113 ème cigarette sans dormir". Je me délecte des paroles de cet hymne antimilitariste et antireligieux..
"Manipulez-vous dans la haine
Et dépecez-vous dans la joie
Le crapaud qui gueulait je t'aime
A fini planté sur une croix "
Ouais, je ris à m'en faire crever, tout ça sur un rythme Reggae Rock, à la Police.
Une déferlante Punk nous passe dessus, "Bipède à station verticale". Ca pogote un peu dans la salle. Le chant est staccato, cavalcade de la batterie, la guitare de Lucas ne reprendra jamais son souffle de toute la chanson... Ouf !
"Sentiments numériques revisités". Redescente. Rien que la batterie qui fait le métronome pour HFT et sa guitare sèche pour commencer. Dans une lumière onirique, les instruments branchés portent cette belle ballade rock. Le rythme s'accélère, la batterie qui marque tous les temps fait ressortir le côté psalmodié du chant. Nouvelle descente avec la seule voix, la guitare "pleurant" de Lucas, et petit à petit, le son gonfle avec de plus en plus de reverb', ça remplit la salle, c'est bon...
Après 20 titres, ça sent la fin, HFT présente ses musiciens. Non sans fiérté, il nous présente son fils à la guitare, mais aussi à la coréalisation et aux arrangements de La Stratégie de l'Inespoir. Et comme on est en famille, le public est vraiment fier du petit, et l'acclame.
Même si au fond du punk, un mec à mes côtés ronchonne le "FILS DE! ... FILS DE!!" des Bérus.
"Résilience zéro" commence comme un pulsation électronique. Puis la guitare lancinante de Lucas. Et la voix qui chante ce texte dérangeant sur ses secrets d'enfance, ses cauchemars. Le son est travaillé avec des effets électros. HFT salue profondément ses musiciens par une révérence, quitte la scène et laisse son fils finir avec un long solo brillant.
Les lumières s'éteignent, au bout d'une heure et demie de concert. Dans les gradins, le tonnerre des rappels gronde.
Une lumière bleu profond se rallume, rugissement de joie dans la foule. Hubert-Félix revient chanter comme une incantation "Les fastes de la solitude" en invoquant des images cauchemardesques avec un sourire sardonique, Lucas sublime le texte avec un solo digne d'un guitar hero pour le bridge.
Dès les premières notes de la mélodie suivante le public réagit avec joie et chante "les dingues et les paumés". La lumière est vert/jaune maladive, et tandis que l'intensité de la chanson monte HFT va visiter ses musiciens un par un. La lumière palpite en rouge au coeur de la scène, et plus le rythme monte, plus la fosse s'agite et le public saute en rythme... La chanson se finit sous des acclamations vigoureuses.
Faut-il décrire la chanson suivante ? "La fille du coupeur de joints" commence, la salle est eclairée en rouge et jaune, ça chante et ça danse dans la fosse, une partie des gradins s'est levée. Sur scène Alice Botté et Lucas Thiéfaine s'affrontent à la guitare, et finissent par une embrassade. Tous se réunissent pour saluer le public, qui leur répond d'une standing ovation.
Le gars bourru devant moi, celui du début du concert, est pris d'un vent de panique : "Oh non ! Il va pas partir ?" Et non, mon gars, c'est pas fini, on apporte un pied sur le devant de la scnène, et Hubert-Félix Thiéfaine nous chante "Des adieux" poignants. Et le gentil bourru devant qui ne veut toujours pas que le concert ne se finisse lance un "oh non, pas des adieux, malheureux !"
"Les noires sentinelles drapées dans leur guerites n'ont pas besoin d'antenne portable satellite pour capter le chagrin à son extrème limite ".
Toutes les photos du concert ICI
Crédit photo : Yann Landry / La Tête de l'Artiste
set list:
1. En remontant le fleuve (Stratégie de l'inespoir)
2. Amour désaffecté (Stratégie de l'inespoir)
3. Errer Humanum Est (Météo für Nada, 1982)
4. Médiocratie... (Stratégie de l'inespoir)
5. Confessions d'un never been (Scandale mélancolique 2005)
6. Angélus (Stratégie de l'inespoir)
7. Karaganda Camp 99 (Stratégie de l'inespoir)
8. Autoroutes Jeudi D'automne (soleil cherche futur, 1982)
9. Femme de Loth (Alambic sortie sud, 1984 )
10. La ruelle des morts (Stratégie de l'inespoir)
11. Fenêtre sur désert (Stratégie de l'inespoir)
12.Alligators 427 (Autorisation de délirer, 1979)
13. Je t'en remets au vent ( ...Tout corps vivant branché sur le secteur étant appellé à s'émouvoir... , 1978)
14. Petit matin 4.10 heure d'été". Chanson réscapée de son album abandonné en 2008, itinéraire d'un naufragé et présente sur Supplements de mensonge ( 2011)
15. Syndrome Albatros (Eros Über Alles, 1988)
16. Statégie de l'inespoir (Stratégie de l'inespoir)
17. Loreleï Sebasto Cha (Soleil cherche futur, 1982)
18. 113 ème cigarette sans dormir, Dernières balises (avant mutation) 2007
19. Bipède à station verticale (météo für nada, 1986)
20. Sentiments numériques revisités (La tentation du bonheur, 1996)
21.Résilience zéro (Stratégie de l'inespoir)
Rappels :
22. Les fastes de la solitude, (Défloration 13, 2001)
23. Les dingues et les paumés, (Soleil cherche futur, 1982)
24. La fille du coupeur de joints ( ...Tout corps vivant branché sur le secteur étant appellé à s'émouvoir... , 1978)
25. Des adieux (La tentation du bonheur, 1996)