Vous connaissez déjà (au moins le son) du groupe Mallory si vous êtes accro à La Grosse Radio.
Mallory est un quatuor, plutôt parisien, qui raconte en musique l’histoire d’une fille imaginaire à qui ils empruntent le prénom : Mallory (et ouais).
Après Honey moon et 2, c’est le 3ème chapitre de l’histoire de Mallory joué et conté par Mallory, le groupe (vous suivez ?) que vous pourrez découvrir dès le 29 janvier prochain : Sonora R.F. Part I.
Signés pour cet opus chez Musicast / Dooweet Agency, il y aura pour en célébrer la sortie, un concert le 22 janvier au Bus Palladium à Paris.
Photo : Avril Dunoyer
Depuis sa formation en 2012, le groupe Mallory raconte donc une histoire. L’histoire de cette quinquagénaire d’aujourd’hui, ayant tout quitté dans les années 80 et 90 pour vivre de folles aventures dont un road trip haletant et dangereux. Quelques 20 ans plus tard, elle rencontre à Paris 4 garçons (dans le bar plutôt que dans le vent) avec qui elle se lie d’amitié. Ensemble, ils décident de raconter sa vie aussi mouvementée qu’imaginaire.
Cette histoire n’aurait pu être que musicale finalement, mais elle est devenue multiforme lorsqu’est créé le blog proposant la version écrite de l’histoire de Mallory. Illustrée par un morceau du groupe (avec les paroles en plus) à écouter pendant la lecture ou après, à la fin de chaque épisode, les yeux fermés (ou pas), pour se mettre dans l’ambiance. Cliquez sur l'image ci-dessous pour y accéder.
Difficile donc de chroniquer la musique de cet album sans parler de l’histoire à laquelle elle est si intimement liée. Après avoir suivi Mallory les deux albums précédents, on la retrouve bien mal en point ici. Mallory a merdé, gravement… Elle se retrouve au Mexique dans un état du Nord, le Sonora, sous l’Arizona et face à la Basse Californie, seule, arrêtée et bientôt en prison.
Forcément l’ambiance générale de l’album et des compos ne sont pas à la joie et la bonne humeur sautillante. Le premier morceau, "On the sheld", nous prépare à la dure réalité de l’éveil derrière des barreaux. On se fait houspiller en espagnol pendant quelques secondes avant que les toms de la batterie puis la guitare ne viennent nous chercher, nous tirer, jusqu’à la voix qui susurre dans notre oreille effarée… « Tu ne vas pas aimer ce qui va se passer dans le coin ma belle… t’es dans la merdasse… ». Le tempo est lent… si lent… comme les pas de Mallory qui passe à reculons la porte de la prison et voit la lumière de l’extérieur rapetisser et lui échapper. Son estomac se tord et tout son être crie de terreur… C’est lourd et poignant, désespéré à la Nirvana ou plutôt à la Courtney Love (car, et c’est surprenant, on ressent une touche plutôt très féminine dans ce morceau fait seulement par des garçons… Enfin je crois). Les chœurs d'une jolie dissonance qui encadrent la mélodie participent à l’impression d’inclusion… Jusqu’au bruitage de la porte qui se ferme.
"Zéro", le deuxième morceau est en français. C’est malin et assez surprenant au départ. La voix (trop ?) douce du début du morceau s’enrage à bon escient et se transforme de claire à rauque et rock et change de langue autant que de registre. C’est plus pêchu… de la même veine qu’un "Brain of J." des Pearl jam par exemple. On sent la rage et la révolte. Un peu comme devant une bonne série (genre Orange is the new black, que je vous conseille, au passage), on est avide de connaître la suite de l’histoire.
Pour "Overwhelmed", le morceau suivant mon oreille a tout de suite embarqué du côté de "Born to be wiiiilllddd" d’un classique Steppenwolf. C’est immédiat sans être petit, c’est un son garage, sans le grunge, sans fioriture même si ça tricote bien des cordes ; ça balance et ça sent les années 90, le folk et le rock alternatif U.S avec des chœurs aigrelets ou acides à la Afghan whigs époque Black love, la poussière et la chaleur ! Nous voilà submergés…
Et voici en exclusivité aujourd'hui sur LGR, le clip de "Cellule 7" :
Petits morceaux de calendrier en guise d’interlude… Il y en aura 2 dans l’album : "day 31", "day 89" dans la "cellule 7". Les jours s’amoncèlent, l’espoir s’éteint, les ambiances s’alourdissent encore… Plus besoin de mots pour raconter l’horreur des instant immobiles. Le travail rythmique et mélodique est précis, pressant, presque oppressant à dessein. Etrangement la voix est plus prégnante et s’insinue plus facilement en anglais qu’en français quand elle reste (trop ?) plate : "Shu" versus "cellule 7", pas de match pour moi.
Mais elle est mal Mallory, on comprend qu’elle n’est pas loin alors d’abandonner, de se laisser aller au désespoir quand une voix l’interpelle… Et nous avec ! Elle dit s’appeler "Suzanne" mais ressemble étrangement à une Béatrice… Elle rassure, relance une perspective… "Suzanne", je vous laisse découvrir.
Les deux derniers morceaux de l’album finissent ce chapitre de l’histoire de Mallory en français dans le texte. Atterrissage létal, le "silex" parle, rugueux. Il gratte les cordes des guitares qui scandent des rythmiques marquées en contre temps avec la basse qui devient, elle, plus mélodique et nous hisse jusqu’au joli chorus et l’inversion des rôles pour nous pousser plus loin encore, par ruptures et ponts ambiancés avec encore et toujours ce son très brut de la batterie à la Bonham, cru…
La colère se vit avec les riffs et les cris, mi Cantat, mi Coyote…
Et puis résilience ou lâcher prise finalement, la porte est close sur l’histoire de "mille et une femme" et une Mallory.
Si Sonora R.F. Part I semble au premier abord un peu hermétique c’est qu’il est profond et riche. Sombre aussi, oui…. Mais fort en émotions et en images sonores. Il faut se laisser apprivoiser par Mallory. Il faut avoir le temps de se laisser entrainer par l’histoire, surtout si on arrive seulement à ce troisième tome de l'aventure. Mallory c’est comme une séance individuelle de cinoche gratos. L’ambiance est là, l’histoire se déroule et c’est toi qui fais les images. Un « solomovirtuel » finalement.
Souhaitons de nombreux spectateurs à cet album, et une saga pour Mallory.