Fragments – Imaginary Seas

"On peut à l'occasion regretter que le groupe ne lâche pas davantage la bride, mais il faut lui reconnaître la capacité de proposer une musique à la croisée du post-rock, de l'électro et des bandes originales où l'émotion règne."

Encore un groupe de musique instrumentale genre post-rock truc, quelle plaie, pire que les orties ces trucs-là... Ce fut en tous cas ma réaction (ou pas loin) lors de ma première écoute (superficielle) de ce 3e enregistrement de Fragments (10 titres pour 34 minutes de musique, disponible depuis le 5 février dernier). Plusieurs raisons peuvent expliquer ce constat excessivement dur :

1) La mauvaise foi inhérente à l'activité de chroniqueur
2) Un ras-le bol légitime face au grand nombre de formations post-rock insipides en circulation
3) Le fait que les éléments qui constituent la touche personnelle de Fragments soient particulièrement bien intégrés au reste, de sorte qu'ils ne sautent pas immédiatement aux oreilles.

Il aurait été étonnant que le groupe n'ait rien de mieux à proposer qu'une copie supplémentaire d'Explosions in the Sky. Le trio Rennais, outre la sélection Inouïs du Printemps de Bourges et les vieilles charrues, a en effet été à l'affiche des Trans Musicales 2014 : il eût été absurde que le célèbre festival d'alternatif leur ouvre ses portes juste pour leur bonne gueule. Et en effet, quelques écoutes plus attentives révèlent rapidement que ces mélodies, mignonnes, mais un peu quelconques pour peu qu'on les écoute froidement, sont enrichies par des touches d'électro discrètes, par un travail sur le son délicat et, plus généralement, une production aux petits oignons. Plutôt que de jouer la carte de l'efficacité à tout prix en ruant dans les brancards, Fragments préfère la subtilité.


rennes, trans musicales, lighthouse


On peut à l'occasion regretter que le groupe ne lâche pas davantage la bride, mais il faut lui reconnaître la capacité de proposer une musique à la croisée du post-rock, de l'électro et des bandes originales (on peut évoquer le travail d'Arcade Fire pour Her) où l'émotion règne. Après une intro qui met dans l'ambiance, "Echoes" montre tout de suite ce que le groupe a dans les tripes : des mélodies fragiles qui, sans s'avérer excessivement originales, parviennent sans problèmes à être touchantes grâce à ce travail d'orfèvre de la production qui est la véritable marque de fabrique de Fragments. Ce travail leur permet également d'apporter leur petite touche sur des titres plus typés montées en puissance post-rock, avec leurs parties de guitare typiques du style ("Ceremony", "Moutains & lakes").

 

Mais c'est quand il s'éloigne un peu de ces rivages qui restent connus, pour s'aventurer vers des contrées plus pop / électro que Fragments est le plus convaincant, comme sur "Lighthouse", franche réussite et single en puissance. La fin de l'album (Maxi ?) est particulièrement bien construite. Une autre force de Fragmentsdu groupe est en effet de savoir agencer ses titres de belle façon, en incluant des titres plus courts faisant office de transition à l'occasion. De sorte qu'arrivé à la montée finale de "Pyramids", le bilan est étonnamment positif. Parvenir à apporter sa propre patte sur un style aussi casse-gueule que la musique instrumentale proche du post-rock, cela s'appelle le talent. Et si Fragments peut faire mieux, c'est déjà très bien.

7,5/10

 

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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