Le samedi 20 février dernier, nous nous sommes rendus dans un café près de la Maroquinerie dans le 20ème arrondissement de Paris. Il était 17 heures et Maurice, le manager de Kula Shaker nous attendait à l’intérieur. Nous venions d’apprendre une heure auparavant que le concert archi-complet prévu le soir même à la Maroquinerie était reporté au mardi 08 mars prochain. Crispian était malade, impossible de chanter, alors ils ont préféré reporter. Par contre, les interviews, pour la plupart, ont été maintenues. On papotera quelques minutes avec le manager anglais et c’est maintenant à notre tour, après Rock'n'Folk, d’avoir le plaisir de nous entretenir avec Crispian Mills le chanteur-guitariste et Paul Winterhart le batteur. Malgré sa grande fatigue, Crispian a joué le jeu et nous avons trouvé les deux garçons, malgré le contexte particulier de la journée, tres sympas. On passera 25 minutes ensemble à parler de Paris, des fans, de leur nouvel album K2.0 que nous avons chroniqués et beaucoup aimé ici à la grosse radio rock et bien entendu de leurs 20 ans de carrière.
la Grosse Radio: Tout d’abord nous sommes très heureux et honorés d’être avec vous aujourd’hui, et nous voulons vous remercier d’être ici dans ce bistrot parisien. Nous venons d’apprendre que votre concert de ce soir a été reporté au 08 Mars car tu es bien malade Cris. Nous voulions aussi vous dire qu’à La Grosse Radio nous avons beaucoup aimé votre dernier album K2.0
Crispian Mills (chanteur-guitariste) : C’est fantastique, merci beaucoup.
LGR : Il s’est passé beaucoup de temps depuis votre dernière apparition sur scène à Paris, cela doit faire cinq ans non ?
Crispian : Notre dernier concert à Paris date en fait d’il y a 6 ans ! Nous avions fait une session acoustique pour promouvoir notre dernier album à l’époque, « Pilgrims Progress ». Nous avons souvent été déçus de ne pas être revenus jouer à Paris plus tôt. On se rappelle très bien de la dernière fois qu’on était ici car Val Kilmer était venu dans les loges. Il portait une chemise Hawaïenne, exactement la même que celle que portait notre manager de tournée (rires). Il voulait faire la fête avec nous mais nous étions tous en train de boire du thé, il a été déçu ! (rires).
LGR: Cette année vous célébrez le 20ème anniversaire de votre carrière ! Vous avez démarré une nouvelle tournée internationale pour appuyer votre nouvel album. Pourriez-vous nous parler de votre état d’esprit, de vos sentiments, de vos regrets par rapport à tout ça, et nous détailler un peu ce nouveau projet ?
Paul Winterhart (batteur) : Waow, c’est une sacrée question ! (rires)
LGR: Oui, c’est une question assez large en effet !
Crispian : Eh bien, je dirais que de la même manière que lorsque vous êtes marié par exemple, lorsque vous jouez en groupe depuis 20 ans c’est un anniversaire qui vaut le coup d’être célébré ! Et cet anniversaire était également une bonne raison de recréer quelque chose. Cela a été une des raisons qui nous a amené à ce nouvel album. De plus, 20 ans de carrière c’est aussi une occasion de réfléchir à notre commencement, de se rappeler d’où on vient et de reprendre les bases. Pour nous c’est comme si on avait bouclé la boucle. Dans ces circonstances particulières je pense que la nostalgie est acceptable. Il y a de la nostalgie dans ce nouvel album mais il y a aussi beaucoup d’optimisme par rapport à ce qui nous attend, c’est ce qui fait que cet album ressemble à un nouveau départ.
LGR : D’accord, c’est comme le commencement d’une nouvelle ère. Génial ! Et ce nouvel album justement, qui s’appelle « K 2.0 », pourquoi l’avez-vous nommé ainsi ? Pouvez-vous nous raconter l’histoire de ce nom ? Est-ce une référence à votre premier album « K » ?
Paul : Eh bien, cela vient du succès de ce premier album. Nous savions que nous allions préparer un nouveau disque, et on plaisantait en disant qu’on allait l’appeler « K2 ». Et une fois qu’on s’est mis à l’enregistrer on a continué à utiliser le nom « K2 » pour en parler.
Crispian : Et on voulait aussi recréer le même genre de visuel, avec des montagnes en plus. C’était parti d’une plaisanterie entre nous. On a filmé une vidéo sur une montagne avec moi qui jouais un solo de guitare tout en haut… C’était en réalité assez stupide comme idée. Mais cela rappelais notre premier album « K », et c’était le but.
Paul: Oui, on voulait montrer que ce premier album est une des raisons grâce auxquelles on est là aujourd’hui, vous savez. Le succès de ce premier album est une des choses qui a fait que l’on joue toujours de la musique ensemble après 20 ans.
Crispian: Et je crois me souvenir que c’est en réalité un de nos amis qui a suggéré le « 2.0 » parce que ça ressemble à « 20 », comme l’âge de notre groupe. Ça nous permettait de l’écrire noir sur blanc. En plus de ça, « 2.0 » ça suppose que c’est une amélioration. C’est une version supérieure du produit d’origine (rires) ! C’est comme si la musique pop était un produit ou un service qui nécessite d’être réinitialisé de temps à autre. C’est plus une blague qu’autre chose mais c’est aussi assez approprié dans le cas de ce nouvel album.
LGR: On sait que votre concert à Paris ici ce soir était complet, et ce depuis un moment déjà. Êtes-vous aussi impatients et passionnés de jouer que vos fans le sont de venir vous voir ?
Paul : Vous savez, c’est une des raisons pour lesquelles on ne peut pas jouer ce soir, parce qu’on s’est montré trop impatients et passionnés ! Bien sûr on est déçu. On a fait quelques concerts en Russie il y a quelques jours, et ensuite on est allé jouer à Bruxelles. On était si pleins d’impatience et de passion qu’il (ndlr : Crispian Mills) a perdu sa voix à la fin du concert (rires) ! C’est pour ça qu’on ne joue pas ce soir. Demain on va essayer de jouer notre date d‘Amsterdam. La passion a une grande place dans ce qu’on fait. Je vois mal comment réussir à faire un bon concert sans y mettre de la passion.
Crispian : Il faut pouvoir se perdre dans le moment présent. Des fois cela suppose de se déchirer la voix ! Sur ce coup-là je n’y suis pas allé de main morte !
LGR : Je vous conseille du citron et du thé ! Quelles sont vos relations avec la France et ses fans depuis 20 ans et depuis ce fantastique premier album ? Pouvez-vous nous décrire cela ? Vous avez un blog ou quelque chose dans ce genre pour communiquer avec vos fans français ?
Crispian: Nous communiquons en majorité en Anglais, à travers les fanzines, notre site internet et les réseaux sociaux comme Facebook et Instagram. On se considère vraiment très chanceux d’avoir un groupe de fans super cools qui nous soutiennent depuis 20 ans.
Paul : Et ce même pendant nos périodes creuses.
Crispian : Oui c’est vrai. Au commencement on était définitivement très pop psychédélique, et les fans de pop étaient un peu méfiants. Au fur et à mesure que l’on est devenu de plus en plus progressifs les fans se sont naturellement rapprochés de nous. On leur en est extrêmement reconnaissant.
LGR : Voici une autre question pour vous, moins joyeuse cette fois… Voudriez-vous nous dire quelque chose à propos du triste épisode du 13 Novembre dernier ? Vos sentiments en tant qu’êtres humains, et bien sûr en tant que musiciens. Voudriez-vous dire quelque chose aux parisiens ? Et d’ailleurs pas seulement aux parisiens, car ça ne concerne pas seulement Paris mais le monde entier.
Paul : C’est terrifiant car avant le Rock N’ Roll, et le divertissement en général était un moyen de s’échapper un peu des problèmes de notre monde. On sait tous que les choses ne vont pas très bien et l’art était une sorte de porte de sortie de ces réalités. Mais ce qui est arrivé au Bataclan… ça n’avait rien d’une échappatoire… ça nous est arrivé en pleine face. Des gens qui passent un bon moment et qui se retrouvent dans une fusillade, ça rappelle les problèmes de notre monde.
Crispian : Je pense que c’est un évènement terrible, mais que cela a au moins aidé à rassembler les gens ensemble. Il y a toujours une grande part d’amour qui résulte de ce genre de tragédie. On a vu que cet évènement terrifiant a créé un immense sentiment de compassion. Notre monde rétrécit et les problèmes qui arrivent aujourd’hui dans le monde ne peuvent plus être ignorés. S’il y a une guerre en Syrie on ne peut plus simplement dire « Oh ça se passe très loin de chez nous » vous voyez, cela créé tout de suite de la compassion, plus de connexion et de compréhension entre les gens. Le challenge aujourd’hui c’est de faire l’effort de comprendre ce qui se passe autour de nous et de ne pas succomber à la colère et la peur. C’est ce qu’ils appellent le côté obscur dans Star Wars. C’est ça le vrai challenge.
LGR: Merci à vous de continuer le Rock N’ Roll, de toujours être ensemble.
Crispian : Je pense que cela rassemble vraiment les gens. On a entendu que le groupe des « Eagles of Metal Death » était revenu. C’est courageux de leur part.
LGR : A Paris on veut continuer à se battre, à faire de la musique et des concerts…
Crispian : Et à protester !
LGR: Oui, protester à travers la musique, dans de nombreux lieux, sur pleins de scènes parisiennes. Ça a été un moment très difficile pour nos collègues du Bataclan. On pense à eux, au personnel du lieu, et on ne lâche rien car c’est important. Pour nous c’est un honneur de recevoir des artistes de l’étranger. On veut montrer que l’on n’a pas peur de tout ça et qu’on reste solidaires.
Paul : Oui. Paris est un carrefour de la culture et cela ne doit pas changer. C’est un carrefour culturel depuis des années, et cela explique en partie pourquoi cela s’est passé ici…
LGR : Pour en revenir à vous : vous avez commencé votre tournée il y a quelques jours. Paris est votre sixième date. Est-ce que vous êtes encore dans votre phase «d’expérimentation » sur scène ? Avez-vous des nouveautés pour ce nouveau projet ?
Paul : Je dirais que c’est assez fluide. On a répété un certain nombre de chansons et Crispian aime changer souvent de set afin de rester « frais » et de continuer à expérimenter comme vous l’avez si bien dit.
Paul : On essaye de rester très créatif sur scène. On essaye d’incorporer toutes sortes de surprises.
Paul : Bien sûr il y a des chansons que l’on n’a pas répétées. Il y a un certain nombre de chansons qu’on ne joue pas. On joue en priorité celles qui nous inspirent le plus.
Crispian : ça arrive parfois que vous voyiez un groupe sur scène et vous avez le sentiment qu’ils jouent leur album. Ça sonne exactement comme l’album, mais en beaucoup plus fort. On aime réinterpréter nos chansons et créer des surprises pour notre public. Et on continuera à le faire. Je pense qu’on finirait par s’ennuyer autrement.
LGR : Y-a-t-il de toutes nouvelles surprises ? Avez-vous préparé quelque chose de spécial pour vos fans ?
Paul : Lorsque l’on a enregistré, il y avait quelques chansons qui ne rentraient pas sur l’album. On a continué à enregistré même après que l’album soit terminé. On était même toujours en train d’enregistrer en Angleterre la semaine dernière. On a enregistré une chanson le matin même du jour de notre départ en tournée.
Crispian : C’est la façon “old-school” de faire vous savez, d’enregistrer un album le matin et de partir en tournée l’après-midi ! On aime ça.
LGR : Okay une dernière question avant que je vous libère : Lorsque vous voyez tous ces gens qui attendent de vous voir ici, envisagez-vous de jouer sur une scène plus grande ? Ou avez-vous joué à Paris ? A la Maroquinerie non ? Vous voudriez faire une autre scène parisienne ? Une plus grosse peut-être ?
Paul : Nous avons joué à l’Élysée Montmartre, on a eu la chance de s’y produire plusieurs fois.
LGR : Le lieu va d’ailleurs rouvrir cette année.
Cris : Le fait est que beaucoup de producteurs ne savaient pas où nous faire jouer. Après six ans, personne ne veut prendre de risques. Il ont vu cette salle et la plupart d’entre eux ont été surpris que l’on affiche complet si vite (la Maroquinerie contient 500 places). On a essayé de jouer autre part dans une salle plus grande mais ça n’a pas marché. Quoi qu’il en soit on est super contents de pouvoir jouer ici, ça va être génial !
LGR: Merci beaucoup pour votre temps et pour cette good vibe, c’était super ! On vous dit donc à très bientôt, pas ce soir mais au 08 Mars prochain !
Paul : Merci Beaucoup La Grosse Radio.
Crispian : Oui merci. On est impatients de faire cette scène !
LGR : Et n’oubliez pas : gingembre, thé et citron.
Crispian : C’est ça. Plus du repos et du miel (rires) !
Petite anecdocte: Il m’a été impossible de réaliser des photos seulement avec les garçons car ils souhaitaient que je sois absolument avec eux dessus. Vous verrez donc Cris, Paul et moi. On est d’accord les gros lecteurs, je ne fais pas partie du groupe mais de la Grosse Radio. Nous sommes donc ravis de vous faire partager ce moment avec le groupe anglais qui avait sorti un album en 1996 depuis devenu culte.
Nouvel album K2.0 disponible depuis février 2016. En tournée mondiale et le mardi 08 mars à la Maroquinerie à Paris. Le live-report de la grosse radio rock suivra bien évidemment.
Un grand merci à Elodie et Charles de HIM MEDIA, à ma copine Emilie et un énorme remerciement à Martin Roignot, mon cher camarade de la rédaction Rock pour le travail de traduction.