Volage – Coffee Dreamer

Volage est un jeune groupe né à Tours et signé sur le label Howlin Banana Records ; à leur actif, déjà un album et un EP qui avaient su enthousiasmer la critique, les publics difficiles et La Grosse Radio lors de leurs sorties. C'est un nouvel "extended play" qui attire à présent notre attention, Coffee Dreamer, réunissant 6 titres à paraître le 11 mars prochain. Sa particularité réside dans le choix audacieux qu'ont fait les quatre musiciens de l'interpréter en acoustique, exclusivement. Un défi particulièrement intrigant, et risqué aussi, qui ne serait pas sans rappeler celui que s'étaient lancé les King Gizzard and the Lizard Wizard il y a quelques mois avec le très aérien Paper Mâché Dream Balloon. Point de flûte traversière ou de tam-tams ici toutefois, car si la démarche peut sembler analogue, le rendu final n'aura pas grand chose à voir avec le néo-hippisme champêtre, s'il est seulement permis de s'exprimer ainsi, des Australiens.

Nous vous avions déjà parlé il y a quelques jours, non sans un certain enthousiasme, du premier extrait éponyme de Coffee Dreamer ; un titre à la mélodie léchée, d'une simplicité rafraichissante. C'est celui-là-même qui ouvre l'EP, décidément toujours aussi captivant, même après une poignée de journées de recul dans les esgourdes. Les cinq autres morceaux sont du même acabit, et à l'image de cette introduction, re-présentent les qualités que l'on attribuait déjà à Volage, comme la pureté de leurs mélodies, l'efficacité de leurs harmonies vocales, mais sous un jour nouveau.

Cet exercice acoustique épure avec brio leurs compositions, et la comparaison avec les précédents opus est directement rendue possible par le fait que quatre des six morceaux sont des relectures de titres déjà présents sur Maddie, leur premier EP de 2013, et Heart Healing, LP de 2014. La prime déception de n'avoir que deux inédits à se mettre sous la dent laisse place à la rêverie éveillée qu'inspirent bien vite ces "Upset" et autres "Owl". Leur dépouillement intrigue et séduit, leur simplicité toute neuve sublime les mélodies sans que l'on ne s'ennuie à aucun moment de cette accalmie générale. Le groupe parvient même à conserver, malgré le ralentissement des tempos, une certaine énergie ; simplement, elle est désormais sous-jacente, peut se faire plus sautillante : écouter en cela "6h15", qui constitue un excellent exemple du pénomène, une rythmique enjouée voire guillerette, laissant tout de même affleurer une certaine mélancolie tout aussi implicite, et particulièrement touchante.

Et puis de cette déséléctrisation se dégage une certaine humilité, propre à faire tomber les barricades, une véritable proximité purement folk s'installe entre musiciens et auditeur. Délestée de la sempiternelle réverbération chère à notre époque, la voix se fait plus claire, plus humaine. Les effets stéréo du mix sont également bien plus audibles ; écoutées au casque, les guitares semblent être grattées tout près de notre oreille. Quant aux choeurs, ils se chargent d'une élégance certaine, s'adoucissent tout à fait ; ils sont même d'un tel angélisme que l'on serait presque tentés de comparer le refrain de "Cowgirl In The Sand", par exemple, l'une des deux nouvelles compositions figurant sur l'EP, à quelque fragment du formidable Workingman's Dead des Grateful Dead... Un cap que nous ne franchirons pas, parce qu'on est pas complètement dingos (mais bon on le dit quand même).

Volage, EP, Coffee Dreamer, Howlin Banana Records, 2016

L'EP se conclut sur "Owl", que les fidèles du groupe connaissaient comme étant l'ouverture survitaminée de Heart Healing. Désormais, il s'agit d'une balade folk délicatement entraînante. La mélodie est portée aux nues et s'imprimera pour un moment dans le cerveau de tout auditeur, dès lors condamné à la chantonner en se faisant du café, en allant à la boulangerie pour acheter des pains au chocolat ou en faisant du vélo dans la colline, à fredonner la ligne de basse si lumineuse du petit intermède à 1 minute 54... A revenir à la version originale, juste pour voir, et puis réécouter la seconde...

Très justement, la grande victoire de Coffee Dreamer, c'est qu'à aucun moment on ne se demandera quelle est la version de "Owl", ou de "Not Enuff" que l'on préfère ; toutes ces relectures s'ajoutent simplement à leur répertoire sans pâlir face aux versions originales, ni les effacer non plus. Les six titres sont tout à fait à l'image des frigos de l'ancienne usine de lait où Volage les a enregistrés : c'est frais et onctueux. Et puis, le format EP est tout à fait adapté au projet : le tout étant peut-être un poil linéaire, peut-être que la lassitude aurait commencé à poindre à partir du septième morceau ; mais ça n'arrivera pas. En fait, le dernier mot que l'on entend, à la fin du dernier morceau, est des plus appropriés, et constitue probablement la plus juste des conclusions, alors on ne s'en privera pas : oui, Volage, c'est « cool ».

Crédits photo : J.B. Ambrosini

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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