C'est dans le hall d'un hôtel parisien près de la place de la République que je retrouve Vincent Cavanagh, chanteur d'Anathema. Le groupe sort son nouvel album Weather Systems le 16 avril prochain. Le musicien est fidèle à sa réputation, chaleureux, bavard et enthousiaste. Visiblement ravi de la tournure que prennent les événements autour de sa formation, ne sachant toujours pas ce que "avoir la grosse tête" signifie, Vinnie est un interlocuteur adorable comme on aimerait en rencontrer tous les jours.
Ca va, pas trop fatigué ?
Non, en plus j’habite tout près, à Gambetta. Donc je pourrai rentrer facilement !
Cool !
Oui, j’en ai pour 10 minutes. Mais je suis très reconnaissant envers Roger (ndlr : qui s'occupe d'organiser les interviews aujourd'hui et qui connaît le groupe depuis un bail), qui est un mec super, et envers tous ces gens qui travaillent dur pour nous rassembler, et étant très critique envers ce que nous faisons, je suis souvent surpris et flatté par les réactions positives des gens.
Tu vas être content avec moi, j’ai des réactions positives aussi !
Excellent (il me checke avec un sourire large d'une oreille à l'autre) Cool, mec !
Vous avez été bien plus rapides cette fois. Etait-ce un objectif de revenir plus vite ?
Oui, mais tout a été très naturel, car on avait les idées. On n’avait pas besoin de penser à aller vite, car tout était là, les idées étaient déjà là. On a fait deux disques, on travaillait sur Falling Deeper au même moment, et les deux ont fonctionné comme catalyseurs l'un pour l'autre. On a pris tellement de plaisir à faire Falling Deeper (ndlr : album sorti en septembre dernier constitué de nouvelles versions d’anciens morceaux) qu’on s’est dit qu’il fallait sortir rapidement le nouvel album, et on a démarré dans les deux semaines qui ont suivi, avec un producteur cette fois. Et on a eu un déclic, on s’est rendu compte que ça roulait tout seul, « ok, ça émerge, on n’a qu’à suivre le courant et faire quelque chose de spécial", on ne se demandait pas si on allait le faire, mais comment. On a démarré très vite alors qu’on était en studio, et on a enregistré, 5 chansons je crois, qu’on a pratiquement fini, et on a décidé de prendre du temps libre, de faire Falling Deeper, et d’y revenir à Oslo, chez Christer (ndlr : Christer-André Cederberg, qui a produit Weather Systems), et là on a écrit l’autre moitié de l’album. Donc c’était génial de pouvoir se concentrer sur seulement quelques chansons, ensuite sur les autres, et après que falling deeper soit sorti en septembre, se retrouver au studio au pays de Galles et y finir les sessions pour Weather systems. L’album le plus facile à faire de notre carrière ! Pourtant il y a des passages très intenses, mais c’était un plaisir à enregistrer.
Ca s’entend, l’album sonne très naturel, comme si c’était un courant qui s’écoulait tout le long…
Oui, et maintenant je sais ce que c’est, c’est seulement une fois qu’on a fini qu’on peut prendre du recul, qu’on comprend ce genre de choses. Pour être honnête, on avait ces 4 chansons de l’époque We’re here because we’re here, “the gathering of the clouds”, « Lightning song », « Sunlight », « The Storm before the calm », on savait qu’elles seraient ensemble et qu’elles finiraient sur notre nouvel album. Quand on est retourné au studio pour commencer les sessions, avec ces 4 chansons, un paysage commençait à apparaître, et c’est comme si on commençait à voir l’album, il n’y avait qu’à finir la photo, « ah, là il faut ça, là on va mettre ça ici, et cette pièce là ».
Un peu comme une peinture ?
Exactement ! Quand on en arrive au stade où a réalisé la moitié, ou 60%, on n’a qu’à suivre son instinct. Et pour la 2e session, on a composé uniquement de nouvelles chansons, « Untouchable part 1 et 2 », « the beginning and the end », « the lost child », « infernal landscape », et une fois de plus ces sessions furent tellement simples, tu sais quand on a fini il nous restait du temps, on a fini avant la deadline. Et ça nous a surpris de voir à quel point on avançait rapidement chaque jour.
Peut-être que vous avez perdu certaines inhibitions en faisant we’re here because we’re here, et vous avez essayé des choses que vous n’auriez pas osé essayer avant ?
Avant toute chose, j’ai beaucoup appris en travaillant sur cet album. J’ai appris à enregistrer, à gérer un studio, j’ai joué des claviers, fait de la programmation, appris à produire, donc j’ai appris plein de trucs qui m’ont beaucoup servi pendant nos sessions. On a aussi beaucoup appris sur ce qu’il ne fallait pas faire sur we’re here because we’re here, puisqu’étant donné qu’on n’avait pas de date limite pour cet album, la tendance pour Danny était d’essayer toutes les idées possibles, toutes les idées qu’on pouvait avoir, et il est devenu impossible de s’y retrouver, de faire en sorte que tout cela tienne : « on n’a pas déjà enregistré une guitare lead pour cette partie ? Je sais pas si on en a besoin, mais on avait essayé ? Où est ce solo, je m’en souviens plus, tu sais toi ? Pfffffffff, quelque part dans l’ordinateur ». On n’a pas procédé de cette façon cette fois, tout ce qu’on a mis sur cet album c’était dans un but précis. J’ai travaillé en étroite collaboration avec Christer, il était dans le studio 1 et moi dans le 2, et on prenait soin de s’assurer que tout collait ensemble et que tout ce qu’on faisait serait utilisé. On n’a rien enregistré qui n’a pas fini sur le disque, ça explique aussi pourquoi on est allé plus vite. Tout s’est fait de façon plus précise, plus concentrée cette fois.
Le fait que Lee Douglas ait rejoint le groupe pour de bon, « officiellement », a-t il rendu le processus plus facile ?
Oui, surtout lors de la 3e session, car elle était là du début à la fin. C’était plus facile d’essayer des trucs. « Je sais que j’ai bien chanté cette chanson, tu veux essayer, voir comment tu te sens dessus ? » Après tout je ne suis pas intouchable, hein. Et sa façon de chanter était tellement touchante, tellement belle, j’ai dit « peut-être qu’elle devrait chanter toute la chanson », et Danny et Christer ont répondu, « non, vous devriez chanter en duo, tu commences et elle te rejoint », ce genre de choses. Et puis c’est très agréable de l’avoir avec nous, elle est marrante, super relax, elle nous inspire, c’est un pinceau en plus, qui permet d’ajouter de nouvelles couleurs.
Et puis-je me permettre de te demander ce qui s’est passé avec Les Smith (le claviériste a quitté le groupe, même s’il continuera peut-être à les accompagner en concert) ?
Et bien, quand on a commencé à travailler sur Falling Deeper et Weather Systems, on était juste à trois, Danny, john et moi, et il est devenu clair que c’est tout ce dont on avait besoin pour faire des albums. Pour être honnête, sur l’album précédent, Les a joué certaines parties, mais Danny s’est chargé de la majeure partie, ensuite j’ai commencé à jouer de plus en plus de claviers, à créer les sons, des paysages sonores, des textures, et avec tout ce que j’ai appris… On a aussi composé pour l’écran, et on s’est rendu compte qu’on n’avait besoin de personne d’autre. C’est la même chose pour Jamie à la basse (Cavanagh, le 3e frangin), il était occupé à faire d’autres choses, et on a fait sans lui. La différence c’est que lui continuera à nous accompagner en live, Les je ne sais pas.
Vous 4 ça suffisait ?
En fin de compte, oui. Il n’y avait que Danny, John, moi et Christer, et c’était tout. C’est parfois un peu triste, mais on n’a besoin de personne d’autre, donc ça ne sert à rien tu vois…
Steven Wilson avait mixé we’re here..., quelles différences vois-tu avec Christer ?
Christer c’est notre homme, on s’est vraiment trouvés. Steven a fait un travail incroyable sur we’re here..., La principale différence est qu’il n’est intervenu qu’à la fin, alors qu’on a travaillé avec Chris dès le premier jour. Avec Christer, ça l’a fait immédiatement, c’est le genre de rencontres où tu te dis, ce gars va être un de mes meilleurs amis
Il y a eu une connexion ?
(il s’emballe) Oui, comme si c’était chimique, ç’a été instantané ! Humainement, musicalement, créativement, pour tout ce qui touche à la production, même si l’un d’entre nous proposait une idée, et que quelqu’un n’était pas ‘accord, ce n’était jamais cruel, personne n’avait d’égo sur la question, c’était vraiment… La relation de travail la plus facile qu’on ait connu. Ca n’a pourtant rien d’évident, puisque comme je te l’ai dit, moi Danny et John formons un groupe très soudé, c’est difficile de se faire une place parmi nous, et il a parfaitement trouvé sa place. Humainement, musicalement, beaucoup de respect mutuel, quand il nous proposait des idées, on avait la même vision, c’est comme s’il était dans le groupe ! Il a joué de la basse sur la moitié de l’album, c’est comme s’il l’avait fait avec nous ! Comme faisant partie de l’équipe créative, pas comme un simple producteur.
Je dois dire que même si j’ai aimé we’re here..., je trouvais qu’il manquait un petit quelque chose, même si c’est dur de le dire de façon concise. Alors que cette fois, je trouve ça plus naturel, plus profond…
Je vois ce que tu veux dire. Je crois que l’attention portée aux détails est arrivée très vite dans le processus d’enregistrement. Je crois que sur we’re here..., comme je te disais tout à l’heure, on a essayé trop de choses, et d’ailleurs, respect maximum à Steven Wilson pour avoir réussi à donner du sens à tout ça. La différence avec ces sessions est qu’on était tellement plus concentrés dès le début, on a vraiment trouvé une façon de faire qui nous convenait parfaitement. Tout ce qu’on a fait c’était dans un but précis, et ça se ressentait partout, il y a une vraie dynamique qui s’est créée, dans la façon de jouer de la guitare, de jouer du piano, sur la façon de frapper les tums, les cymbales, chaque petit bout, chaque partie faisait partie de cette dynamique, et on savait comment bâtir nos crescendos, sur chaque chanson, car elles sont toutes différentes, faire une chanson comme « the beginning and the end », qui est basée sur un seul riff… Et si tu portes toute ton attention sur la meilleure façon de jouer et d’enregistrer un morceau dès le début, tout devient clair, et tout ce dont tu as besoin pour atteindre l’intensité voulue ne vient pas de la production, mais de la dynamique de chaque chanson. Du coup, tu te retrouves avec plus d’espace, de clarté, parce que tu n’as pas besoin de jouer plein de trucs pour faire une bonne chanson, mais juste de la jouer comme il faut. Parfois c’est aussi simple que ça. Et je pense que c’est la principale différence entre cet album et le précédent.
Donc si on est logique, le dernier album était bon, celui-ci est excellent, le prochain devrait être parfait !
(rires) Je ne crois pas qu’on puisse atteindre la perfection, on la cherche toujours, tout artiste la cherche, mais on ne la trouve jamais. Je ne sais même pas si ça existe, car c’est très subjectif.
En plus si le prochain est presque parfait, votre carrière sera finie (rires ) !
(rires) Je pense que plus tu fais des choses… valables, quel que soit le niveau, plus ça te pousse à essayer de faire mieux. Parce que ce que tu as appris, tu l’emmènes avec toi, pas seulement dans la musique et la production, mais dans le processus créatif en général, c’est comme si tu fermais une porte et que tu en ouvrais une autre, et ainsi de suite. Et c’est toujours quelque chose de différent, de nouveau, et qui va de l’avant. Et si on peut sentir que ces deux albums sont connectés en quelque sorte, je pense que le prochain sera différent. On verra, mais je pense que ce sera quelque chose de différent.
C’est vrai qu’on sent le groupe dans une dynamique particulière.
Oui, mais je pense qu’il y aura un saut sur le prochain.
Donc vous ne prévoyez pas – bien sûr vous ne pouvez pas prévoir ce que vous allez faire sur le prochain – de poursuivre dans cette veine ?
Non, on ne se répète jamais, on ne l’a jamais fait, on ne le fera jamais. On ne s’impose pas de contraintes, on cherche toujours à faire quelque chose de nouveau, en suivant notre instinct. C’est comme ça que ça marche, on ne peut rien contre ça.
Votre musique a toujours été riche en émotion, mais avec le temps l’émotion est de plus en plus à vif. Je me demandais si vous aviez découvert des groupes récents qui vous avaient inspiré ?
Non, ça n’a rien à voir avec ça. Notre musique devient plus émotionnelle parce que nous sommes davantage connectés à nous-mêmes, et au processus destiné à mettre ça en musique. C’est pour ça que l’album s’appelle Weather Systems, c’est à propos du paysage sonore intérieur, c’est quelque chose de très personnel, qui n’appartient qu’à nous et à personne d’autre. Je ne sais pas si c’est de la chance, mais c’est mon sentiment. Je ne sais pas ! Pfffffff (il réfléchit)… J’ai écouté des groupes qui proposaient de la musique très intense (ndlr : on y arrive), très riches en émotion, mais certains ne proposent même pas de paroles ! Parce qu’il n’y en avait pas besoin. Alors, qu’est-ce qui est émotionnel ?
C’est comme si le groupe, d’un point de vue créatif, était devenu auto-suffisant ? Je veux dire, au début de votre carrière, on pouvait entendre des influences (il acquiesce), mais maintenant on entend seulement Anathema…
Oui, absolument, et je pense que ça va continuer comme ça. On essaye pas mal de choses en musique, et pourtant on sait qu’au final ce sera nous. Tu as complètement raison, je suis parfaitement d’accord avec toi, quand on a fait notre premier album, on avait entre 16 et 19 ans, c’était notre façon de nous exprimer à l’époque, même si on écoutait déjà toutes sortes de styles, pas tellement de métal, même quand on avait entre 19 et 20 ans, mais… Je ne sais pas trop comment le dire, c’est presque une question de gène, tu vois ce que je veux dire ? Quand je repense au mec que j’étais quand j’avais 19 ans, et quand j’en avais 28, et maintenant, il s’agit de trois personnes différentes. Tout peut te faire évoluer, tout peut t’influencer, tout ce que tu traverses dans la vie, les lieux par lesquels tu vas passer, les choix que tu fais, les gens qui t’entourent, chaque petite chose de la vie va t’affecter d’une façon ou d’une autre. Et si tu es quelqu’un de consciemment connecté à ton âme, ça va ressortir dans ce que tu crées d’une façon ou d’une autre, que tu l’aimes ou non ça va ressortir. Ce genre de choses peut arriver quand tu as un enfant, ton bébé va prendre de toi d’une façon ou d’une autre, peu importe qui tu es, que tu le souhaites ou non.
Tu en as déjà un peu parlé, mais le titre de l’album se réfère-t il aussi à l’humeur musicale de l’album, qui nous entraîne dans des paysages très variés ?
Eh bien, pense par exemple aux différentes personnes qui sont impliquées dans ce groupe, et au paysage intérieur de chaque personne, toutes ces turbulences, entre tempêtes et moments d’euphorie, et tout ce qu’il y a entre les deux. La métaphore est claire, pour autant on ne cherche pas à partir dans des délires métaphysiques, les situations sont réelles, les émotions sont réelles, les gens sont réels, les chansons sont réelles, et on s’y est plongé, on y a trouvé tout ce dont on avait besoin, tout était là, c’était aussi intense que ça pouvait l’être. Je ne crois pas à l’idée qu’on puisse trouver une clé magique pour faire décoller l’intensité au milieu d’une chanson comme ça, ce sont des conneries, l’intensité est partout dans la vie, de l’euphorie qui t’emmène haut jusqu’aux coins les plus sombres de ton âme, tout est déjà là.
On l’entend sur l’album, il y a beaucoup de changements d’humeur...
Oui, je pense aussi, je pense qu’il faut une certaine profondeur en tant que personne pour faire ce type de musique, et je crois qu’on a cette capacité, c’est juste qu’on n’aime pas trop en parler entre nous, pour que ça vienne plus facilement en musique entre nous, on fait tous des digressions sur notre façon de ressentir la même chose, comment tout s’assemble, et du fait que tout finit par s’assembler, on peut penser que l’expérience de chaque personne est une expérience partagée, c’est comme si on pouvait se rendre compte de ce que chaque personne a vécu durant sa vie, depuis son enfance, et rien n’est caché, on n’en parle jamais, mais on comprend ce qu’une autre personne a vécu. Quand une personne exprime un sentiment, on sait comment réagir, parce qu’on a déjà expériménté ce type de sentiments, mais parfois c’est dur d’en parler, de l’exprimer, c’est là que vient la musique d’une certaine façon.
Les mots sont imparfaits pour décrire la musique, on rate toujours beaucoup de choses...
Oui, exactement. Je trouve ça intéressant… Il est bon de se fier à son intuition, à son instinct et de ne pas trop analyser chaque composante, c’est la même chose dans la vie, il y a tant de choses qui vont plus loin que les mots, qui sont indéfinissables, ou qui présentent un décalage entre le mot qui les désigne et leur vraie signification… On peut utiliser des adjectifs, mais si un de tes proches meurt, peut-on décrire précisément nos sentiments ?
C’est juste une abstraction.
Exactement, et c’est là que la musique peut aller, peut couler droit au cœur, parfois on n’a pas besoin de mots, ça vient tout seul, et la musique exprime ce que les mots ne peuvent exprimer. Je veux dire, regarde Satie, regarde les plus grands compositeurs du monde, ils n’utilisent pas de mots, et pourtant quand tu les écoutes, là ça sonne comme si quelqu’un était décédé, là comme de la folie pure, ou de l’euphorie, la musique a cette connexion primaire aux sentiments. Un nouveau-né, quand il arrive au monde (il mime quelqu’un qui s’éveille en prenant une respiration), et qu’il entend des choses qu’il n’a jamais entendu, ça peut être du classique, ou peut-être Cannibal Corpse (rire). J’ai vu ça arriver… Et ce bébé n’a aucune expérience du monde, il n’a aucun système de référence, mais il y a quelque chose dans son ADN qui réagit, d’où cela peut-il venir ?
Je voudrai revenir sur la période entre A natural disaster et we’re here…, comment expliques-tu ce lien très fort avec votre public, qui vous est resté fidèle ?
On a constamment joué live. Mais comment je l’explique ? Je ne sais pas… C’est juste du respect mutuel… On a toujours su qu’on allait revenir avec quelque chose de spécial, qu’on allait revenir avec ces chansons qui étaient les meilleures qu’on ait faites, on en était parfaitement conscients, donc on est toujours resté confiants, et quand on était en tournée, on voyait de plus en plus de gens nous découvrir et nous apprécier, ce qui a vraiment aidé je pense.
Vous utilisez les réseaux sociaux ?
Pas du tout, ça se répand tout seul ! Tu te souviens quand on avait un website pourri il n’y a pas si longtemps ? On n’était présent sur aucun réseau social, et rien ne se passait au niveau promotionnel, tout ce qu’on avait c’était un public qui grandissait, et d’une façon ou d’une autre des gens entendaient parler de nous, et de plus en plus de monde venait nous voir en concert, donc je pense que ce qui joue beaucoup est d’être un bon groupe en live, car tu donnes envie aux gens de revenir. On place énormément d’importance dans le fait d’être un bon groupe de scène, et on l’a toujours fait.
Et est-ce que c’est important pour vous de rester proche de votre public ? Je me souviens d’avoir vu Danny (ndlr : Cavanagh, le guitariste et grand frère de Vinnie) – vous ouvriez pour Porcupine Tree à l’Olympia – et après le concert, il était au milieu de la foule, j'ai trouvé ça très beau, même pas au stand de T-shirts, en plein milieu, en train de parler le plus naturellement du monde avec des gens...
Je trouve ça tellement plus intéressant d’établir des connexions, parce qu’en fin de compte, les gens sont tellement intéressants, tu vois ce que je veux dire ? Et quelle idée à la con, après le concert, de retourner dans le bus, dans ton bunker et de t’endormir comme ça ? Pourquoi ne pas plutôt aller parler avec des gens, rencontrer des gens que tu n’as jamais vu, vivre de nouvelles expériences, ce genre de choses ? Et ça n’arrive pas seulement en tournée, ça arrive au quotidien, je suis quelqu’un d’ouvert, j’aime parler aux gens de toutes façons, je viens de Liverpool, les gens y sont très chaleureux, si tu y vas un jour tu verras, ils ont un grand sens de l’humour. Et même si je n’y habite plus, c’est quelque chose qui ne me quitte pas. Bien sûr, il y a des jours où ça ne va pas, mais il ne faut pas s’en faire, ça ira mieux le lendemain.
Est-ce que tu as vu ce que Marillion a réussi à faire avec son public ?
Tu veux parler de l’autofinancement ?
Oui (ndlr : Marillion est le véritable pionnier en matière de relation symbiotique avec ses fans, bien avant Radiohead. Le groupe est entièrement indépendant et finance ses enregistrements grâce aux pré-commandes). Tu penses que ça pourrait être une option pour Anathema ?
Euh, peut-être. Je ne sais pas. Le modèle est là, mais je ne sais pas de quoi demain sera fait et je ne veux pas me projeter. On est ravi d’être avec K-scope, qui est un super label, ils ont fait un travail incroyable pour nous depuis 4 ans, sur les sorties, les tournées, avec beaucoup de goût, donc je suis très content d’être là où on est pour le moment, on verra pour le futur. Mais je trouve que c’est un lien incroyable que Marillion a réussi à tisser avec ses fans.
Du fait des ventes d’albums qui déclinent, tu penses que c’est quelque chose qui peut se développer dans le futur ?
C’est possible, mais il y a plusieurs façons de le faire. Ca c’est une des façons de le faire, mais… Je ne sais pas encore, on verra, là tout de suite je ne veux pas trop réfléchir à la façon dont on s’y prendra pour enregistrer dans le futur. Allons-y une étape à la fois, pour l’instant le plus important pour moi est de continuer de créer de la musique de la bonne façon, et ne pas nous laisser dicter notre façon d'agir, pour continuer à faire ce dont on a envie.
Merci à Vinnie pour sa bonne humeur et sa gentillesse, ainsi bien sûr qu'à Roger Wessier pour son excellent travail d'organisation.