Alors qu'ils étaient en pleine tournée internationale, sillonant l'Europe et poussant loin, jusqu'en Nouvelle-Zélande pour porter leur subversive parole en les oreilles les plus exotiques possibles, et que leurs éminents leaders étaient également en pleine bourre avec leur projet parallèle The Moonlandingz, les Londoniens de la Fat White Family ont trouvé le temps, on-ne-sait-d'ailleurs-comment, d'enregistrer un nouveau morceau, "Breaking Into Aldi". Le titre à lui seul convainc de l'urgente nécessité d'une écoute la plus tôtive possible ; genre, là, maintenant, par exemple.
Avec "Breaking Into Aldi", le groupe continue de se modeler un son en même temps qu'une histoire : tout en conservant quelques éléments typiques de leurs sessions studio, synthétiseurs genre new wave sous emphèt, fanfare nihiliste de cuivres à la joie démesurée et inquiétante, guitares bourdonnantes, voix de fausset, Fat White Family avance tout de même, explore de nouvelles possibilités, comme si la moindre stagnation, la moindre redondance pouvait leur coûter leur conscience. Alors, ce titre arrive comme une suite logique aux Songs For Our Mothers, leur dernier album paru en janvier dernier ; les mêmes armes sont utilisées, mais parées cette fois d'une rage débordante, contrastant avec la lourdeur angoissante de "Duce" et autres "We Must Learn To Rise". La furie aigüe de la voix de Lias Saoudi soutient, selon ses propres mots, une vision "post-apocalyptique" du Royaume-Uni, "privé de ses supermarchés allemands et de leurs bas prix insipides", porte un "appel aux armes pour l'absurdité de notre future futilité", soit plus ou moins le genre de trucs qu'aurait pu marmonner Rimbaud s'il avait été le chanteur des Sex Pistols.
Si l'on ne sait trop comment caractériser "Breaking Into Aldi" (single isolé, type "Touch The Leather" ? Premier extrait d'un futur album ? d'une nouvelle collaboration, comme "Wet Hot Beef", en 2013 avec Taman Shud ? va savoir), il est en tout cas annoncé que sa composition et sa production sont le fruit d'une collaboration entre Lias, Sean Lennon et, petite nouveauté, Cole Alexander des Black Lips. Pas de trace, apparemment, de Saul Adamczewski dans le processus créatif ; de toute façon, on n'a jamais vraiment su qui jouait quoi, comme on ne sait plus vraiment qui fait partie du groupe, étant donné que Fat White Family ne fait pas deux concerts avec les mêmes types sur scène.
La dernière chance française, pour cet été, de s'en faire une idée, c'est jeudi, au Cabaret Vert de Charleville-Mézières. On y sera, nous.
Crédits Photo : Francesca Sara Cauli
