Soirée spéciale Rock au féminin ce soir à Victoire 2 de Montpellier dans le cadre du festival Subsonica Women in rock. Alors si le fait d'être femme peut rassembler, l'être dans le large champ musical du Rock peut être moins rassembleur. La programmation a misé sur un éclectisme et un ordre de passage tout particulier et décontenançant qui en a perdu plus d'un. De la Dark Wave avec My Great Blue Cadillac, de la Folk avec l'italienne Elli de Mon et de la Pop New Wave avec Mensch et je vous donne ici le tiercé dans l'ordre de passage sur la ligne, de mon ressenti et de mes préférences du soir.
My Great Blue Cadillac
"My Great Blue Cadillac ! My Great Blue Cadillac ! My Great Blue Cadillac ! My Great Blue Cadillac ! My Great Blue Cadillac !My Great Blue Cadillac !" La soirée est lancée par des choeurs enregistrés. Sur une ambiance générale sombre bleue et orange, une basse saturée à mort et une batterie minimaliste composée de deux toms et une symballe vont nous offrir de la Dark Wave et tenter de nous replonger dans le Berlin interlope des années 80. Louise et Eddy au style vestimentaire new wave pour un côté Iggy à la voix oscillant avec un aspect bien dark du chanteur à la gueule grimée se lancent dans un set où pour une fois l'absence de guitare rend la chose originale.
C'est brutal, le chanteur est grimé de rouge autour de la bouche et de noir sur le front façon Charlize Theron dans Mad Max Fury Road. Le style interloque le public de Victoire 2. Les paroles sont aussi minimales ("Rock and Roll"). Le duo interchangera d'instruments tout au long du set et chantera tour à tour aussi. La grosse corde de Mi de Louise est tonitruante et triturée de bout en bout. Minimale aussi cette basse et qui nous fait bien ressentir les rythmes roulants de la batterie. On s'imagine facilement à un concert des Bithday Party du tout jeune Nick Cave à Londres, pas de sourire, visages graves pour une ambiance générale assez gothique.
Des lumières blanches et fumigènes donnent quelques couleurs à ce show ou éclatent des éclairs verts, violets, jaunes. La fuzz de la basse nous lascère et fait durer la dernière note tout au long de la durée des changements d'instruments.
Un rythme haché arrive sur un "Don't care what you think" aux paroles projétées, des hurlements, des bruits, un jeu rapide au mediator poursuivi par une batterie haletante puis STOP et retour du chant. Le chanteur est en longue robe noire et collant noir mais la basse Squier est blanche, c'est LA touche de couleur.
Comme à chaque concert, le duo fait une pause pour prendre une photo de la foule qui fait de bons gros doigts d'honneur. Et retour des rythmiques offensives et de Louise au chant. Pour le final, l'"enrobé" revient au chant pour achever ce set rapide et costaud quasi Rock Indus qui n'aura pas laissé indifférent.
Elli de Mon
Changement de style complet avec une blues woman italienne, Elli de Mon. Seule avec une grosse caisse et des grelots autour de la cheville droite. Mais aussi avec une guitare electro-acoustique et une autre Blues. La femme orchestre Elli joue un Blues avec une voix légèrement voilée, fébrile mais douce. Parfois feutrée, parfois miaulée aigüe, il y a une belle variation de charmes dans sa voix. "Dirty Blues" bricolé de trois bouts de ficelle et pas mal de guitare puis un Blues modernisé par une rythmique rapide et des loops de voix.
Vient ensuite l'invité surprise, le sitar cher à George Harrison. Elli nous invite à nous assoir et à savourer le voyage en se laissant pénétrer d'une multitude de sons envahissants le temps de créer son loop de sitar. Puis reprend sa sèche pour finir la chanson. Comme à l'école - elle est instit' en maternelle - , elle nous demande de nous relever pour le dernier morceau très oriental. Le public semble plus adhérer à Eli qu'au premier groupe, qui m'a pourtant bien éclaté.
Mensch
Puis arrive le duo lyonnais mené par Vale à la guitare et Carine à la basse pour un set au style mêlant pop entraînante et new wave chaloupée le tout sur une batterie enregistrée que des soucis électriques rendront récalcitrante par moments, ah ! les joies du direct !
Ça ouvre par "Boulevard Magenta" en français dans le texte, "le matin des fins de soirées", et continue poussivement rythmiquement sur le morceau suivant mais la basse résonne bien... Et dans ma tête je fredonne les paroles de "Ce mortel ennui" de Serge Gainsbourg. L'ordre de passage des groupes, je le répète, allant decrescendo dans la puissance me pousse aux bâillements intempestifs... C'est ballot.
On voudrait plus de disto dans la guitare, parce que dans son côté la basse pulse bien. Avec le chant martelé, ça ferait un chouette contraste dansant. L'envie est là mais la réalisation passe mal. Le public qui a fini par s'assoir de lui-même se lève et se rapproche sur les injonctions de la chanteuse. Mais un problème électrique interrompt le morceau. "C'est bientôt fini" nous dira-t-on mais c'en est trop pour nous. Nous sommes déjà loin...
Si les filles n'ont pas toutes le même style ni ce soir ni jamais, elles auraient bien pu s'accorder en assemblant ce qui leur manquait à chacune : une guitare et une grosse caisse pour les unes, une basse pour une autre et une batterie tout court pour les dernières. Choix particulier de la programmation, on l'avait dit, mais du culot, dans le Rock, il en faut !
crédit photo : Philippe Poulenas