« L'inspiration, c'est comme quand t'es constipé et puis que ça ne vient pas…»
Juste avant leur entrée sur scène, j'ai pu rencontrer Adam, le chanteur et mascotte à moustache des Suédois de Royal Republic. Il a volubilement répondu à mes questions, niché dans le luxueux bus qui mène son groupe en tournée à travers toute l'Europe jusqu'à la fin de l'année, et plus.
La Grosse Radio : Premièrement, Royal Republic, qu'est-ce que ça signifie ?
Royal Republic : Eh bien, c'est un oxymore, c'est impossible une république royale. Moi, j'ai toujours voulu arriver sur scène sur un tapis rouge, en souverain quoi. Bon, ça n'est jamais arrivé… [Note : ils ont quand même des éclairs géants qui s'allument sur scène, c'est déjà pas mal !] Mais on n'est pas du genre sexe, drogue, rock 'n' roll, nous on est des hommes modernes, on a ce côté républicain, et puis un côté chic, clairement au-dessus du peuple.
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LGR : Comment on forme son oreille pour devenir un républicain royal ? Qu'écoutiez-vous plus jeune ?
RR : Ce que j'écoute encore aujourd'hui : les Beatles, et Tom Petty. Particulièrement « Wild Flowers » et « Into the Great Wide Open », faut écouter ça tout le temps. Et puis les classiques qu'écoutaient mes parents, Led Zeppelin, Pink Floyd, etc.
Après, j'ai découvert Metallica par moi-même, et Toto, je suis devenu un geek de la musique, je n'aimais que ce qui était super compliqué à jouer… Aujourd'hui je n'ai plus ces préjugés, j'écoute d'abord, je vois si c'est bien ensuite. Une bonne chanson reste une bonne chanson, que ça soit un tube de l'été ou un truc obscur.
LGR : Vous êtes 4 sur scène, comment vous êtes-vous rencontrés ? Comment avez-vous signé avec un label ?
RR : On s'est rencontrés uniquement par la musique ; à part ça on n'a rien en commun. Mais tous les quatre on est dans ce monde depuis l'adolescence, on jouait à des mariages, tout ça. Et puis un jour, un ami a dit à un de ses amis de nous écouter, il se trouve que ce type a aimé notre musique. Il était allemand, il bossait pour un label (Vertigo), c'est devenu notre manager, c'est lui qui gère tous nos contacts. On a signé depuis chez Universal pour être diffusés partout, facile non ?
LGR : Vous avez produit 4 albums depuis 2007, d'où tirez-vous votre royale inspiration ?
RR : Tu vois, l'inspiration, quand tu pousses, c'est comme quand t'es constipé et puis que ça ne vient pas… J'ai lu des tas de bouquins pour produire, des manuels pour être créatif, inspiré, tout ça. Mais on ne peut pas se reposer sur l'inspiration pour créer, il faut également se baser sur des connaissances, il faut savoir ce qu'on fait aussi. Et puis parfois, tu forces, tu forces, tu as l'impression de faire des choses qui ne donneront rien de bien ; jusqu'à ce que tu y mettes le dernier détail, le point final, et tu te rends compte que ce simple point rend l'œuvre complète.
LGR : On est au début de votre tournée européenne. Comment préparez-vous cela ?
RR : J'ai compté, au début. J'ai arrêté à 700. On a donc plus de 700 concerts derrière nous, 700 concerts en 8 ans, plus de 80 concerts par an !
On a passé la majeure partie de notre vie de groupe en tournée. Aujourd'hui, ça fait 215 jours que je suis en voyage. Je me sens heureux, j'ai toujours voulu monter un groupe qui tourne tout le temps. Mais ça implique quand même pas mal de sacrifices. On n'est jamais chez nous, on rate des mariages, des décès, on a l'impression de passer à côté de notre vie ; et on monte quand même sur scène et il faut être plein d'énergie parce que ça n'est pas ce qu'on doit transmettre.
LGR : Vous êtes passés à Rock en Seine cet été, que pensez-vous du public français ?
RR : Notre batteur adore la cuisine française ! À part ça, le public français ressemble au public suédois… en cela que nous sommes très peu allés dans ces pays dernièrement. Je dis ça, c'est faux, on est allés à Marseille… « Marseille »… t'entends ? Ça sonne comme un accordéon, ploum ploum marseille lalala…
À Rock en Seine, on ne savait pas du tout à quoi s'attendre. On regardait le public qui venait pour les groupes juste avant nous, pour estimer le monde. Et puis quand on s'est mis à jouer, il en est arrivé toujours plus, c'était dément ! Et puis, les Français, vous êtes marrants quand vous applaudissez. Vous avez une drôle de façon de taper des mains en scandant « rouillale-répoublique », c'est n'importe quoi !
LGR : Ça a l'air quand même sympa. Vous avez aussi une anecdote sur votre meilleur, et puis votre pire souvenir de groupe ?
RR : Le meilleur, c'est trop dur. Le pire aussi, tu attends un truc horrible, et tout, mais non. On a eu beaucoup de presque problèmes, mais jamais de vrais problèmes. Par exemple, dans les Alpes, sur les routes en lacet étroites. En pleine nuit, notre manager, toujours doux d'habitude, se met à hurler, il faut se réveiller, sortir du bus immédiatement, etc. Je me vois encore en caleçon dehors dans la montagne, une fumée pas possible qui sort du bus, les freins avaient brûlé, on aurait pu mourir… mais non, ça s'est bien passé, on est tous sains et saufs, pas un seul blessé, rien, tu vois, c'est pas une anecdote d'aventure incroyable.
LGR : Si tu le dis… parlons d'avenir alors. Comment sera 2017 ?
RR : Bourré de trucs ! Déjà, on sera en tournée au début. Et puis on a plein de restes, des morceaux inachevés, auxquels il manque le point final qui les rendra parfaits. Depuis le dernier album, Weekend Man, on a à peu près 70 démos qui traînent, alors il va falloir bosser là-dessus.
LGR : Cool, un nouvel album bientôt alors ! Pour conclure, en 3 mots, rendez les gros auditeurs fans de Royal Republic :
RR : Cheese Nacho Baby !
CONCERT AU GARAGE
Puis le groupe est monté sur scène, à la suite de Bleeker et de Pile Up Dinosaurs, dans une salle de concert du centre de Londres, le Garage.
J'ai évalué la foule à 400 personnes, tassées contre les barrières et manifestement ravies de cette programmation dans une salle plutôt dédiée aux musiques electro. N'ayant jamais assisté à un concert dans ce pays, je n'imaginais pas quelque chose de bien différent des autres, et le public déjà n'avait pas l'air accoutré différemment d'ailleurs. J'ai même repéré quelques T shirts du Download ou encore du Hellfest parmi la foule.
Les quatre Suédois ont tout de suite montré leur professionalisme, demandant son avis au public, répondant aux questions lancées depuis les premiers rangs et dégageant une aura d'élégance savament travaillée à coups de raies bien plaquées, de costumes cintrés et d'éclairages peaufinés.
Les morceaux se sont enchaînés sans heurt, les changements d'instrument assurés de main de maître par une personne dédiée ; et la sueur à commencé à couler sur les fronts.
Dans le public également, l'ambiance s'est réchauffée, quelques slammeurs tentant de traverser la fosse, instantanément interceptés par la sécurité affolée. Dans l'ensemble, le public se montrait extrêmement sage, peut-être trop discipliné aux yeux ébahis d'un Français.
Cette soirée était l'anniversaire du bassiste, Jonas, dont la raie bien nette s'était transformée en touffe de sueur blonde. Petit à petit les artistes ont laissé tomber le veston de costard, dévoilant des chemises trempées et laissant leurs cheveux pendre sur leur front. Leur énergie impressionnante était communicative, le public scandait les refrains des morceaux comme «Cheese Nacho Baby» ou le nouveau «Weekend Man».
Le groupe s'est fendu d'une superbe reprise a capella de son titre «Addictive» tandis que d'immenses éclairs lumineux scintillaient à l'arrière de la scène.
Après trois ou quatre rappels, toujours plus puissants et dynamiques, le groupe a finalement pu quitter la scène, épuisé. Pour bien faire comprendre qu'ils ne joueraient pas davantage, ils ont balancé tous leurs médiators dans la foule, qui a pu se les distribuer sans dispute, de façon très cordiale. J'étais placé aux premiers rangs et n'ai pas été bousculé une seule fois, malgré la dose d'énergie transmise au public par les Royal Republic.
Si les organisateurs se rongeaient d'inquiétude en voyant que le premier groupe n'était pas encore sur scène à 19 h pile, heure annoncée, ils se sont rassurés en constatant qu'à 22 h 30 précises tout le monde avait quitté la salle, laissant place à une sono de club et ravis de cette soirée.
Les Royal Republic poursuivent leur tournée jusqu'en 2017, vous pourrez les admirer sur scène notamment à Paris le 8 mars 2017 au Trabendo !