Aliocha – Sorry Eyes

Dans la famille Schneider, le petit Aliocha risque bien, lui aussi, de se tailler une place au soleil. Son frère Niels avait déjà acquis une solide réputation de comédien, grâce notamment au réalisateur Xavier Dolan. Le jeune Aliocha s'était également illustré dans le domaine cinématographique. Mais c'est avec un EP particulièrement sensible que le jeune homme de 23 ans, guitariste doué, se signale aujourd'hui.

Son EP Sorry eyes nous propose des titres souvent prometteurs où la voix de l'artiste oscille entre énergie et fragilité. Le premier morceau, "Sorry eyes", nettement sous influence de Beck, s'avère un potentiel tube folk : la guitare acoustique accompagne de furieuses paroles sur la séparation "Show me how free you're feeling now/I guess that I was just a parasite". Frondeur, l'interprète ose un "Won't make me cry" soutenu par des guitares belliqueuses.

Aliocha, sorry eyes

Mais c'est un autre interprète, beaucoup plus fragile, que l'on entend dès la deuxième chanson. Celle-ci brosse le portrait fantasmé d'une dénommée Sarah "Met a mystic girl Sarah/Thought it was you", avant que des violons lyriques ne s'élèvent pour noyer un rêve qu'on présume illusoire. L'ambiguïté propre à cette pièce musicale s'incarne dans une bifurcation mélodique et acoustique : les notes semblent hésiter entre berceuse et complainte, tandis que l'obsession du coeur transi s'accomplit à travers une question lancinante : "Will you come and see me ?". Le morceau semble se dissoudre dans un espace de regret, comme une main perdue qui tenterait de percer le brouillard.

On ne s'étonne pas que le titre suivant, "Flash in the pan" prolonge cette nostalgie et privilégie une ambiance à la Elliott Smith. Pudique, la tristesse se résume en quelques formules : une "histoire entre toi et moi", sur fond d'atmosphère de "matinée pluvieuse". L'économie de mots et la naturelle imagination qu'elle suscite se marient de façon harmonieuse avec la guitare arpégiante, qui fait tomber de fines gouttes dans nos oreilles rêveuses. Nettement plus ancré dans le sol -sans doute boueux- "Into the wild" assume son inspiration dylanienne. Les mots s'y bousculent comme à la plus belle époque du divin Zimermann, pour évoquer les choix qui s'offrent à une âme lâchée dans la nature, en quête de sens : "What are you gonna do ?" repète le chanteur, comme une injonction à lui-même. Au bout de ce parcours filandreux, il y a finalement l'ironie de "Let me laugh", sorte de maquette musicale, guidée par un piano désaccordé : "I laugh at myself now that you make me cry", lâche le chanteur, sardonique.

Si l'ensemble sonne encore comme un exercice de style, on sent que le jeune Aliocha a de l'avenir et plein de bonnes mélodies devant lui.
 

NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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