Chiendent – Perdre Sa Chair

Aujourd'hui nous nous penchons sur le cas Chiendent, ce quatuor angevin qui sortait son troisième EP en décembre dernier, en partenariat avec LGR. C'est donc avec un peu de retard que nous nous penchons sur cette galette musicale.

On regarde la pochette, on voit un mannequin désarticulé, assis au milieu d'une pièce. Autour de ce mannequin se trouvent d'autres mannequins, debout le long des murs. Leurs têtes sont coupées à la photo. Le mannequin central a le regard - ce regard serein, résigné - tourné vers la lumière qui éclaire la pièce, comme si il attendait qu'on l'achève.

Une pochette comme ça, toute bête en apparence, mais qui comporte tellement de messages, c'est simplement génial ! Et puis il y a ce titre, Perdre Sa Chair, titre auquel il manque des bouts de lettres par-ci par-là, comme le mannequin auquel il manque des bouts de "chair".

Les Chiendent sont assez discrets, on ne trouve pas beaucoup d'informations sur eux, sur leur passé, sur leur formation. Il faudra donc fouiller un peu. Et puis après tout ce qui compte aujourd'hui ce sont donc ces cinq morceaux, rock, assez variés, efficaces.

"Les Voyous", le premier titre, donne directement le ton avec des grosses guitares, une ligne de basse mémorable et une batterie carrée. Parlons aussi de la voix d'Emmanuel Priou au chant qui envoie pas mal. Le morceau fait du bien, les paroles font sens. On y parle de consommation, on nous sollicite sans cesse pour nous vendre de l'inutile, du vent; et puis on se souviendra aussi de cette ligne au refrain "Quand ils vous approchent vaut mieux serrer les poches, quand ils vous agressent vaut mieux serrer les fesses..." Seule frustration, on aurait bien aimé que ce titre (1min50) dure plus longtemps, allons les gars !

Avec "La Face B" nous avons droit à une entrée originale au banjo, basse, batterie, et l'on note vraiment que les textes ne sont pas écrits par un quelconque parolier de r'n'b français. Les thèmes abordés - le matérialisme, la valeur des objets, les amours éphémères, la politique, la démagogie, le libre-arbitre du plus fort - sont pourtant tous réunis dans des couplets très courts à l'écrit. C'est "fascinant, fascinant, fascinant" de réussir à faire ressortir tant d'idées en quelques mots. Alors que "Perdre Sa Chair", le titre éponyme, se veut plus mélodique, un peu plus grave aussi puisqu'il fait allusion à la mort, à la disparition, au fait que nous ne sommes que du vent et que l'on n'y peut rien, "Dans La Peau d'un Con" porte très bien son nom puisqu'il parle d'un mec au chômage qui se fait des potes pas très nets afin de faire des choses pas très nettes "On était là entre paumés à faire des trucs pour exister, on s'était tous improvisé grands défenseurs d'identité, on avait les dents acérées comme des chiens bons à piquer", et qui à force de faire les cons finissent par en arriver au pire. 

L'EP se termine en beauté sur la puissante "Une Poignée d'Innocents". Sur un rythme ternaire le morceau suit un homme clamant son innocence condamné à mourir sur la chaise électrique. Guillaume Arnaud nous offre un solo de guitare à la fin, en parfaite symbiose avec l'univers du titre, comme si le quatuor avait gardé son meilleur atout. Il y a aussi un peu de Mano Solo dans la voix du chanteur.

"Dans cette pièce un officier, une infirmière et un curé à qui on commandite le crime, jolie morale qui assassine, rediffusée sur le JT"

Chiendent, Perdre Sa Chair, France, Angers, EP, 2016
Source Photo : Page Facebook du groupe

De Perdre Sa Chair on notera d'abord la qualité des textes, la puissance des mots. Il est rare aujourd'hui d'écouter un morceau et de se dire "ah bah ouais, ouais ouais, à la première écoute je faisais même pas gaffe aux paroles et puis maintenant à la cinquième tout s'éclaircit". Parce que les textes sont pleins de métaphores et d'allusions. Ils sont efficaces, bien trouvés.

Musicalement l'EP est très bon, avec toutefois un bémol personnel. Le groupe nous offre un "Les Voyous" super classe mais trop court, la guitare s'envole dans deux petits solos sur la totalité de l'EP, la batterie nous offre un break de 4 mesures sur "La Face B". Oui c'est bien MAIS si le groupe poussait un peu plus sa technique alors leurs morceaux seraient aussi forts qu'une météorite et là, croyez-moi, on les serrerait, nos fesses ! 

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En prime, le groupe vient de diffuser une vidéo live de leur seule reprise, et pas des moindres puisqu'il s'agit de "Il pleut des cordes" d'Eiffel :

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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