Commençons si vous le voulez bien - notez que je requiers votre consentement - commençons, vous dis-je, par un aveu. Lorsque je pénétrais en ce 24 janvier dans la salle des Folies Bergères, la débauche de rouge, de balcons à l'italienne vint titiller ma mémoire rétinienne et me rappeler au bon souvenir du concert que The divine comedy avait donné ici même quinze ans auparavant. Non que je l'ai oublié, bien au contraire, mais je me sentais sinon honteux, du moins un peu péteux d'avoir durant toutes ces années, été aux amis absents de Neil Hannon. La faute à son album de 2001 "Regeneration", dans lequel il tenta, sans succès, de tourner le dos à cette pop orchestrale dont il est le maître incontesté au profit d'une indie pop des plus bancales. J'avais à tort, vogué vers d'autres rives musicales, ratant pas moins de trois albums de l'irlandais mais fort heureusement, "Foreverland" son douzième opus sorti en 2016, m'a ramené au pays de Divine Comedy. Laissez-moi vous narrer nos retrouvailles…
En choisissant Lisa O'Neill, après avoir invité Lisa Hannigan à son set acoustique en septembre dernier à La Maroquinerie, notre ami Neil serait-il devenu un rien monomaniaque ; le prénom des deux sus-nommées serait-il son critère majeur pour choisir une première partie…Qu'importe ! Pas plus qu'à la Maro, nous ne fûmes déçus par la prestation de cette autre consoeur irlandaise. Lisa O'Neill, grande fille d'Eire vêtue d'une robe vert d'eau et d'un fichu assorti, nous a tous et toutes bluffé par sa gouaille et une gestuelle spontanée et drôlatique. Sa voix est puissante bien que rien nasillarde, son accent et ses ballades irlandais à souhait.
Capture d'écran de la captation réalisée par Culturebox
Et notre divin comédien dans tout cela ? L'homme est cabotin certes, mais également doté d'un sens de l'autodérision prononcé, lequel l'amène à entrer sur scène vêtu en Napoléon, comme dans le clip de "How can you leave me on my own". Effet humoristique distancié, assumé et assuré ! Surtout sur "Sweden", titre tonitruant, "Kurt Veillien" en diable et qui ouvre ce concert. Son bicorne bonapartiste ne dépareillera pas sur les titres qui suivent, de "Frog princess" à "Catherine the great" en passant par "Bad ambassador". Et ce déguisement prend tout son sel sur "Napoleon complex", charge drôlatique contre la surdose d'ego, sorte d'automédication selon lui…
Léger Mister Hannon, mais également concerné, lorsqu'il introduit sa valse "The pact" par ses mots, prononcés avec un accent britannique so charming ; "les fascites progressent, ils doivent être contenus, faisons un pacte". Après nous avoir gratifié d'un de ses derniers petits bijoux pop dont il a le secret, "To the rescue", il s'éclipse en laissant à ses musiciens le soin de conclure "The certainty of chance", lesquels s'éxecutent avec brio sous une débauche de jeux de lumières du plus bel effet. Au passage, clavier et accordéon qui ont la charge de remplacer les cuivres des versions studios s'en tirent magistralement et le trio guitare / basse / batterie est impeccable.
Capture d'écran de la captation réalisée par Culturebox
N'en déplaise à certains de mes confrères, si Neil Hannon fait sa réapparition sur scène, parapluie en main, en costard cravate et coiffé d'un chapeau melon, ce n'est pas pour donner un coup de chapeau à John Steed l'avenger… Mais plutôt pour incarner le requin cynique de la City de "The complete banker". Il ponctue sa prestation d'un "desolé" qui m'évoque une autre madeleine proustienne (remember la marionnette de Denisot dans les Guignols ?). Après "Bang goes the knighthood" et "Generation sex" et ses extraits de "La dolce vita", Neil Hannon rappelle à notre bon souvenir "Our mutual friend". Sur fond de "Spanish flea" de Herb Alpert & the tijuana brass, joué sur un vieux tourne disque, il s'offre un petit intermède pince-sans-rire dont il a le secret. D'un bar mappemonde, il sort bière et verres de vin à l'attention de chacun de ses musiciens. Une petite pause dans ce concert qui a pour but de préparer la venue d'une invitée de marque. Ni plus, ni moins que Cathy Davey, sa compagne tout autant que sa consoeur, avec lequel il chante "Funny particular", un duo digne de la grande époque de la comédie musicale.
Capture d'écran de la captation réalisée par Culturebox
Lorsqu'il entame "A lady of a certain age", mon voisin exhulte ; lui n'a pas fait l'impasse sur l'album de 2006 ou a découvert Neil Hannon à cette période. Je lui préfère "Songs of love" qui suit. Même topo pour "At the indie disco" ou "I like" que je connais de fait moins que "Becoming more like Alfie" ou "Somethings for the weekend". C'est ça d'être monté dans le train de The Divine Comedy à l'époque de "National express" ! Neil Hannon nous aura offert pas un, mais deux rappels. Il se délecte à interpréter avec humour "Can You Stand Upon One Leg ?" et "A Drinking song" et contente ses fans avec "Absent friends". Derniers titres ; l'incontournable "Tonight we fly" avec lequel il conclue le plus souvent ses concerts et "Charmed life".
1700 places des Folies Bergères toutes vendues trois soirs durant ; pas mal pour un artiste dont on dit qu'il aurait eu sa traversée du désert il y a quelques années… En France, en tous cas, il semblerait que la magie pop de The Divine Comedy fonctionne toujours et encore ; le public des Folies Bergères, certes majoritairement constitué de quadras et de quinquas, s'est bien vite levé pour danser au son de ses mélodies pop résolumment indémodables !
The Divine Comedy aux Folies Bergère
Setlist
Sweden
How can you leave on my own
The Frog princess
Catherine the great
Bad ambassador
The pact
Napoleon complex
To the rescue
The certainty of chance
The complete banker
Bang goes the knighthood
Generation sex
Our mutual friend
Funny particular
A lady of a certain age
Songs of love
At the indie disco
Becoming more like Alfie
Somethings for the weekend
I like
National express
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Assume the perpendicular
A Drinking song
Absent friends
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Charmed life
Tonight we fly