"un très bel album de musique mélancolique, à la production riche et soignée, qui aurait bien mérité un grain de folie"
Tim Bowness est principalement connu pour être l'une des deux têtes pensantes de No-Man, groupe anglais inclassable dans lequel on retrouve également un certain Steven Wilson. De sorte que les activités du groupe ont ralenti au fur et à mesure que la carrière de Porcupine Tree prenait de l'ampleur. Un écart de 5 ans séparait Together we're stranger (2003) et Schoolyard ghosts (2008), et depuis, un live et rien. Le sieur Wilson étant occupé par sa carrière solo, Blackfield et ses activités de producteur, l'homme a beau être un stakhanoviste, arrive un moment où il faut bien dormir. Tim Bowness s'est donc impliqué dans d'autres projets, parmi lesquels sa propre carrière solo dont Lost in the Ghost Light constitue la troisième réalisation.
Pas besoin de connaissances élargies pour réaliser immédiatement que les albums solos de l'homme sont plus proches du progressif que ne l'était No-Man. L'amateur de prog y retrouvera rapidement des repères et une ambiance à couper le souffle : le titre d'ouverture "Worlds of yesterday" prend à la gorge immédiatement avec son atmosphère crépusculaire, la voix de Bowness, fragile et proche du parler (on pense au David Bowie de Blackstar par instants, comme sur le titre suivant, "Moonshot Manchild"), des passages de synthés et de flûtes qui évoquent immanquablement le meilleur des années 1970, et un son qui brille de mille feux (c'est une fois de plus Steven Wilson qui mixe).
Après un départ pareil, on s'attend au meilleur. Mais le problème de l'album se fait rapidement sentir. Les titres s'enchaînent, et se répètent un peu trop. Tim Bowness chante de la même façon ou presque sur tous les titres, qui se reposent tous énormément sur l'ambiance. On se surprend à espérer des aspérités, un crescendo... qui surviennent de temps à autre, mais avec parcimonie : "Kill the pain that's killing you" introduit une accélération bienvenue, "You wanted to be seen" est une belle montée en puissance... Et c'est tout. Le reste de l'album est plongé dans le même tempo lent immuable, ce qui fatalement lui confère une certaine répétitivité, pour ne pas dire une certaine platitude.
Entendons-nous : prises séparément, chacune des compositions de l'album est magnifique et parvient sans peine à faire voguer l'auditeur sur une mer calme et enchanteresse. Mais aussi agréable la balade soit-elle, le marin finit par s'ennuyer un peu sur cette mer d'huile, guette un coup de vent qui pimenterait son quotidien, voire un petit coup de tabac...Mais non. C'est clairement l'écueil sur lequel bute ce troisième album solo de Tim Bowness, qui bien qu'ayant tout pour s'imposer comme une éclatante réussite, loupe quelque peu le coche. Reste un très bel album de musique mélancolique, à la production riche et soignée, qui aurait bien mérité un grain de folie.
Sortie le 17 février 2017 chez Inside Out