Beaucoup d’artistes rock ont voulu s’approprier le diction suivant : "on n’est jamais mieux servi que par soi-même". Ainsi, pourquoi s’embarquer dans une aventure compliquée avec un groupe alors que l’on peut tout faire tout seul ? Elli De Mon fait partie de ces gens là et nous propose son nouvel opus Blues Tapes : The Indian Sessions.
Parmi les pionniers du genre, Hasil Adkins a ouvert la voie du one man band. Véritables hommes orchestres, ces derniers arrivent à faire oublier leur solitude. Au vu du ramdam que font certains, il est même inimaginable de penser à la première écoute qu'une seule personne soit responsable de tout cela. Dans le sillon d’Adkins, toute une faction de fans du punk, garage, sixties, rock psychédélique parmi lesquels ont peut citer Reverend Beat-Man, Bob Log III, Scott H. Biram… Et plus récemment deux pépites dans le style. D'un côté un nordique qui sonne comme un bluesmen du Détroit Bror Gunnar Jansson (à découvrir d’urgence) et Elli De Mon dont on va discuter ici puisque l'Italienne va voir sortir dans les bac son nouvel opus Blues Tapes: The Indian Sessions.
Blues Tapes : The Indian Sessions Teaser
Elli de Mon aime le Blues comme c’est souvent le cas pour les one man band ou plutôt ici one woman band. Mais sa particularité, c’est de le revisiter avec une culture raga indienne. Chez elle guitare acoustique, dobro et sitar font bon ménage. Et pour ce nouvel effort, cinq titres, parmi lesquels deux compos et trois relectures, une de Hendrix et deux de vieux bluesmen. Quand Elli De Mon revisite "When The Train Comes Along", un bon vieux blues de Fred Mc Dowell, ou lorsqu'elle exhume "Last Kind Of Words", un classique de Geeshie Wiley, une chanteuse de country blues des années 30, elle donne une profondeur bien supérieure au morceau original. Le sitar apporte une touche moins agressive et rêche que la guitare de Mc Dowell. Un blues du Détroit croisé avec des notes orientales qui y rajoutent une touche de psychédélisme. Ce sont ces mêmes notes que Brian Jones allaient chercher à la fin des sixties avec les joueurs de flutes de Pan de Joujouka.
Elli De Mon - Photo Philippe Poulenas (lire notre live report au Subsonica de Montpellier)
Les accordages des instruments utilisés renvoient aussi aux "open tunings" utilisés par Jimi Page lorsqu’avec Led Zeppelin, il reprenait lui aussi des standards du blues. Quand elle s’attaque au "Purple Haze" de Jimi Hendrix, l’émotion est toujours bien présente mais une ambiance beaucoup plus feutrée nous accompagne tout au long du morceau. Un riff roboratif façon Liminanas capte notre attention et nous embarque dans un voyage initiatique à travers l’univers d'Elli De Mon.
En session pour le nouvel album
Comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même (on vous l’a déjà dit plus haut), après avoir emprunté quelques titres à ses glorieux ainés, Elli De Mon s’essaye aussi à la composition. "Fear" du haut de sept minutes trente emprunte énormément au rock psychédélique. On pense à certaines digressions de premiers Pink Floyd. Très barré (je dirais même plus Barrett) comme truc. A la fin des sixties, ce titre là aurait été sans problème un hymne pour les consommateurs d’acides lysergiques. Puis tout au long du morceau, la musique s’occidentalise, le tempo accélère et on se retrouve dans un rock plus classique.
Pour finir tout cela, une petite berceuse à la sauce Elli De Mon. Sobrement intitulé "Lullaby", le titre porte bien son nom. Guitare en open tuning donnant une impression de traversée du désert mais matinée de sonorités exotiques pour se démarquer un peu des classiques du genre.
Le pari est réussi. Pas de doute, Elli De Mon a un univers bien à elle. Certes, elle pioche de nombreuses influences chez les pionniers du blues et dans les racines de cette musique mais, en y intégrant sa patte liée à sa culture personnelle, on obtient un mélange rempli de feeling et de belles émotions. Pour ceux qui sont intéressés, l'album Blues Tapes: The Indian Sessions sera disponible sur le label français Pitshark Records le 3 mars 2017.
Sortie le 3 mars 2017 chez Pitshark Records