Soirée garage bien extravagante et conviviale en ce jeudi 23 mars dans la récente et accueillante salle du dB à Narbonne. Un jeudi donc, à un peu plus de 24 heures du week end, le public audois ne se sera pas déplacé en grand nombre pour célébrer le concert le plus au sud de la France des garageux Johnny Mafia qui nous viennent de Sens, la capitale du Monde. Peu de public mais pas mal de fidèles du lieu déjà et d'Atomic Rotors ensuite dont deux de ses membres assureront la première partie ce soir, à savoir le chanteur guitariste Jeff Slim Bones et le batteur Charly Little. Le duo se nomme Sin Shakers et ça va bien remuer.
Il est un peu plus de 21 heures 30 quand les deux compères s'assoient avec un ballon de rouge chacun de leur côté de la batterie. On sent d'entrée la complicité entre Charly et Jeff et il n'aurait pu en être autrement tant cette première partie est détonnante et empreinte d'improvisations en tous sens. Ils débutent avec du delta blues gras à l'ancienne. La Stratocaster de Jeff grince en ce début de set échevelé et il n'en sera jamais autrement. La batterie de Jeff en prendra pour son grade, il tape fort le bougre, une de ses baguettes ne s'en remettra pas d'ailleurs.
La voix est grailleuse, grattée et rude. Jeff rugit, toujours assis. Il ne se lèvera qu'à deux courtes reprises. Les complices se suivent, se rattrapent, se jaugent du regard, ça ne joue pas forcément droit mais qu'importe, tout est dans l'énergie, l'intention. Et de l'intention, il y a en aura notamment avec des reprises comme ce "Personal Jesus" de Depeche Mode en mode blues ou ce "Cinderella" de The Sonics en rockabilly excité, le tom basse prêt à exploser, ou encore "I don't need a doctor" de Ray Charles. Au rayon hommage, Chuck Berry aura bien évidemment droit au sien puisque ce père du rock‘n’roll nous a quitté quelques jours avant ce concert (le 18 mars), ici c'est un rhythm'n'blues qui sera joué et Jeff se lèvera même pour tenter d'exécuter le fameux pas de jambes de Chuck.
En mode garage tout du long, les Sin Shakers auront su nous marquer par énormément d'émotions dans leur approche d'une grande diversité de styles joués pourtant tambours battants, mais toujours écorchés et à vif. Cette première partie, on le verra ensuite, aura finalement durée près de deux fois plus longtemps que le concert des Johnny Mafia, mais ce n'est vraiment pas grave, Jeff et Charly, en mode heavy blues nous auront bien chauffé. On ira les voir dès que possible avec le membre manquant à la contrebasse en formation Atomic Rotors. On a pas la date, mais le rendez-vous est noté.
Passés 23 heures et après avoir vu la set list contenant 17 morceaux, nous nous sommes dit que nous ne serions pas couchés de si tôt. C'était sans compter sur la fougue des quatre jeunes gars de Sens. En effet, il n'aura fallu que trois quarts d'heure aux Johnny Mafia pour envoyer l'intégralité de leur concert. Du garage bien punk, ça envoie forcément, ça crie, ça se déchaîne et à minuit, c'est fini.
Leur album Michel-Michel Michel avait marqué les esprits à La Grosse Radio et avait été retenu dans notre Grosse Sélection Rock de mai 2016. Alors quand nous avons appris que le groupe passerait à 15 bornes de chez nous, nous nous devions de faire ce court détour pour voir ces phénonèmes qui ont déjà marqué des points lors de divers festivals (Inouis du Printemps de Bourges, Eurock, et cette année au TINALS par exemple). Et ça pète d'entrée avec le bassiste William au chant pour le premier titre "Sens", normal pour ce Sens Capitale du Monde Tour 2017. La voix est pleine de réverb' et ça joue à fond de volume. Les deux guitares s'envolent et la batterie martèle derrière.
Evidemment, les morceaux du dernier album ne sont pas laissés de côté puisque les 8 titres seront joués ce soir. Les 9 autres morceaux sur scène sont du même acabit, rageurs et joueurs, rapides et féroces. De leurs nouveaux morceaux nous retiendrons outre "Sens", "Each Side", "I'm fine", "Sun 41", "Secret Story", "Sleeping", "Big Brawl", "Big Boobs" titre bonus offert sur le soundcloud du groupe fin 2014 et pour finir "Ride". Ce dernier, vous pouvez le voir en vidéo au bout de ce live report. Aucun morceau de leur premier EP de début 2014 ne sera en revanche joué. Place au futur.
Et le futur, c'est ce soir, tout de suite, y'a urgence sur la grosse caisse qui assène un rythme démentiel. On note des ritournelles psychotiques, des riffs répétitifs, faut que ça entre ! Et en force. Ne cherchez pas grande poésie dans les paroles car "I'm on fire, where are my pills", ça pose la base névrosée. Ca hurle, ça pousse au grunge sinon old school british, le phénomène Ty Segall n'est pas lon non plus, les quatre jeunes hommes ont bien potassé leur histoire du rock qui défouraille. Avec aussi un hommage à leurs idoles des Ramones avec "One Two One Two" (l'originale étant "One, Two, Three, Four").
On vous passera les détails sur leurs accoutrements tout foufous et leurs blagues vaseuses d'entre morceaux, faut le voir pour le croire. En tout cas, ces garçons non-disparus de l'Yonne, faut les voir, se prendre des pêches, faut aller pogoter devant leur scène, se jeter dans les remous rock 'n roll intense. Sinon, il sera trop tard, car le futur, c'est maintenant.
Set list :
Sens
Scarycrow
Smell
Each Side
I'm Fine
Bad Michel
Big Boobs
Sun 41
Black
Shoes
Secret Story
One Two One Two
Sometimes 666
Kim Deal
Big Brawl
Sleeping
Ride
Crédits photos : Yann Landry / La Tête de l'Artiste
Set complet des photos : Page FB de La Tête de l'Artiste