Lors d'une mémorable soirée surf rock à la Méca le mois dernier, nous avions honteusement raté le set des Shupa et étions donc passé à côté d'un pur moment "punk'n'Roll surf grunge sexy soul"… Rien que ça ! Hors de question qu'on leur fasse à nouveau faux bond ce samedi 15 avril au Tiger Club. D'autant nos accros aux sucettes partageaient la scène avec d'autres parisiens, les Os Noctambulos et les apôtres bretons du frenchbeat, les Kitschenette's. Et soyons honnêtes : un concert dans un "cabaret baroque transformé en Maison de Nuit Rock & Roll", fréquenté en after par les Franz Ferdinand ou les Temples, ça se refuse pas !
"La maison se réserve le droit d’admission" qu'ils disent au Tigre… Heureusement pour lui, le petit reporter de La Grosse Radio n'a pas eu à mettre son pijama tigrou pour amadouer le portier. Et s'il était allergique au rouge, il n'aurait même pas songé à franchir la porte. Du vermillon partout, du sol au plafond*. Du velours, des miroirs, en veux-tu en voilà. Du noir dégoulinant de sensualité larvée en coulisses. Pas de doute, on est dans un lieu qui ne célébrait pas que les plaisirs de la dive bouteille. Les vingt deux heures s'étaient déjà bien pétés la gueule lorsque les Os Noctambulos montent sur une scène certes à hauteur d'effeuilleuse, mais un peu exiguë pour une quarteron de rocker (dont une rockeuse à la basse). La batterie s'est calée contre l'incontournable piano et l'ampli guitare est posé sur un canapé visiblement inamovible. Pour couronner le tout, le retour ne restitue que la guitare et le chant…
Des conditions techniques qui vont faire perdre son flegme britannique à Nick Wheeldon, le frontman des Os Noctambulos. Il passera d'un "On entend rien mais c'est pas grave" en début de set à un "difficile de faire de la musique ici…" pour terminer sur un "c'est con, non ?". Ceci n'explique pas pour autant le phrasé de Nick, qui commence calmos chaque morceau pour vite monter dans les tours. Nick, c'est Doctor Psyché et Mister Garage. Doté d'une voix timbrée sixties, il passe facilement en mode screaming. "I don't want your medication !" qu'il nous balance. Valentin à la guitare n'est pas en reste : il est en mode vibrato surmultiplié. Le duo rythmique - Baldo aux drums et Coline à la basse - demeure imperturbable et carré ; c'est tout juste si cette dernière accompagne Nick dans ses vocalises énervées... Pour peu que l'on ferme les yeux ou très très myope, on se croirait transporté cinquante ans en arrière : le son de Os Noctambulos est tout bonnement incroyable, même atrophié comme ce soir !
A peine montée sur scène, Maria des Shupa teste avec circonspection le son de sa basse. Avisant le miroir qui lui fait face, elle se dit en rigolant qu'elle pourrait toujours se voir faire la grimace et corriger le tir si nécessaire. Tandis que Julien, le p'tit nouveau qui a pris la succession de Gerry à la batterie, monte sans stresser charley et cymbale, le reste du gang des sucettes font patienter un public que l'on devine conquis par avance. Une voix féminine s'élève pour féliciter Maria pour ses collants top sixties ; une vraie Emma Peel** rock n'roll ! Rita, la chanteuse, yeux noirs et chevelure de jais, chemisier rayé, éclate de rire. Ses jambes gainées de motifs sexy, en total accord avec le cadre donc, font tout autant leur effet. Le critère de vente "sexy" des Shupa n'est pas galvaudé… Sam l'un des deux guitaristes, aux ravissants tortillons capillaires pourrait lui aussi susciter un intérêt certain, pour des fans de la Princesse Leia et de Chewbacca, un peu frappés. L'élégant Guiton, sait lui compter sur sa cravate mais surtout sur sa splendide Vox pour séduire l'assistance…
Les Shupa démarrent fort avec leur hymne éponyme et passent rapidement la cinquième avec des petites bombes garage aux titres évocateurs : "Trip", "Baby what you want", "Lucifer" et autres "In fire". Ce dernier a beau démarrer sur une ryhtmique jazzy, impossible pour Rita de demeurer dans un registre soft. Avec une sono défaillante comme ce soir là, elle prouve si nécessaire, qu'elle possède une voix surpuissante, doublée d'une sacrée présence. A fur à mesure que s'enchainent les morceaux, elle va progressivement se lâcher pour finir sur "Surf n'roll" par rejoindre, mégaphone en main, le public bien chaud lui aussi. Sam qui viendra en devant de scène prouver sa dextérité à la six-cordes et Guillaume, qui fait vibrer sa Vox, ne sont pas en reste. Quant à Maria, elle finira plusieurs fois littéralement à genoux ! Outre leurs propres compos, les Shupa nous gratifient de deux cover "Strychnine" des grands anciens du garage, The Sonics et "Foxy Lady" du maître Hendrix. Pour finir comme ils ont commencé - en beauté donc - les Shupa entonnent leur hymne en distribuant des sucettes à tout va !
Et les Kitschenette's qui fermaient le ban de cette soirée ? Lors du changement de "plateau", leur jeune et frais émoulu guitariste a eu le bon goût de suivre le riff de "I want be your dog" diffusé dans la sono. Belle entrée en matière. Mais las… Lorsque débute le set, notre reporter est vite cerné par une horde de jeunes gens de bonne famille décidés à se déchirer jusqu'au de la nuit. Pressé par le dernier métro, il leur laissera rapidement la place. Dommage, le french beat des bretons avait l'air particulièrement savoureux et l'effort de faire bouger en français mérite d'être salué. Gageons qu'à l'instar des Shupa, ils réclament que la Grosse Radio soit présente lors de leur prochain passage à Paname !
Vous ragez d'avoir raté les Shupa ? Ils seront vendredi 28 avril à la Mécanique ondulatoire. Quant à Os Noctambulos, ne les ratez pas le 3 juin à l'Harmony à Montreuil avec les Norvins !
* Le tigre club est tellement ROUGE qu'un martien daltonien, même érotomane intergalactique, en ferait probablement une jaunisse à l'idée d'y passer la soirée…
** Il devient malheureusement nécessaire de rappeler aux jeunes générations que Emma Peel (alias Diana Riggs) fut LA Steed girl de la série emblématique des sixties Chapeau melon et bottes de cuir, avant d'incarner la matrone Hautjardin dans Games of thrones…
Setlist Os Noctambulos
Hope / rope
Outsider
Moonlight
Medication
Jordi taught me
Circle ain't broken
Living a lie
I went walking
Flowers of evil
Goodby
Cucaracha
Tamed
I can't read
Wild
Bad man
Setlist Shupa
Shupa
You lie
Mademoiselle M
Fat Shupa
Baby what you want
In fire
Shupinada
Lucifer
Strychnine
Love letters
Surf n'roll
Now now now
Bonnie
Foxy lady
Shupa