Autant vous dire tout de suite que l'on met plus d’une dizaine de jours à s'en remettre d'une telle soirée. C'était dément ! Partout où le groupe de punk/rock/garage/psychédélique californien avec à la baguette le célèbre John Dwyer, est passé, les critiques étaient unanimes. Ils étaient déjà venu à la Villette sonique il y a de ça 2 mois. Alors, en ce beau dimanche de mai, quoi de mieux que terminer le week-end en beauté au Trabendo, avec les Thee Oh Sees !
Depuis 2007, John Dwyer et ses musiciens produisent près d'un album par an. Cette créativité prolifique montre toute la richesse et le panel musicial de ce guitariste, chanteur et multi instrumentiste, à l'initiative du projet et de son groupe passant par différent type de registre punk, garage, psychédélique mais toujours ROCK ! Nous connaissons la réputation des groupes californiens tels que les Doors, Jefferson Airplane, Grateful Dead, Van Halen ou encore The Offspring, Blink 182, Green Day, Linkin Park, Red Hot Chili Peppers, Deftones voire les Guns’n’Roses. Thee oh sees eux aussi sont à la hauteur de cette réputation par leur rock enivré et puissant. Dans cette salle intimiste, dans ce lieu sombre et lugubre, nous sommes prêts à vivre cette expérience transcendantale, cette aventure vers l'au delà du rock'n'roll.
HAXXAN
On arrive tranquillement à la Villette, quel site ! Il fait bon. Il fait chaud. La première envie était de prendre une bière afin de se rafraîchir, quelle chaleur ! L'accueil aux portes du Trabendo est super, bonne humeur et convivialité. D’autant plus que le concert est annoncé complet, complet ! Ça promet ! Que dire du Trabendo, de cette salle ouverte depuis 5 ans et qui commence à avoir une sérieuse réputation ? D'ailleurs, une soirée anniversaire a eu lieu le jeudi 1er juin avec une scène intérieure en live (!!! (CHKCHKCHK), ALDOUS RH et AMBEYANCE) et extérieure Djs set (TSUGI, Super, Les Femmes S'en Mêlent, Smmmile, Paris International Festival Of Psychedelic Music).
Revenons à cette soirée, nous avons l'impression de descendre en enfer. Il fait chaud, humide, l'air est empli d'un mélange de sueur et d’alcool. Il fait sombre et la salle est exiguë. Un endroit malsain comme on peut les aimer où l'on peut s'abandonner l'instant d'un moment ! Nous avons tous les éléments en main pour une ivresse parfaite ! Cette salle intimiste voulu par l'architecte déconstructiviste Bernard Tschumi puis ensuite rénovée par l’architecte Linda Bergroth, fait que la proximité entre le public et l’artiste est totale. Un endroit unique en son genre parcemé de recoins. Le Trabendo est devenu le foyer d'un épicentre des musiques actuelles et prometteuses. On s'y sent vraiment bien !
Nous y sommes. Bière à la main, nous pouvons donc rejoindre la fosse, le foyer de la fête, de la danse, de l’ivresse musicale et vitale des troubadours. En pleine prestation, le groupe israelien de Tel-Aviv très particulier, oscillant entre le rock garage, le punk et le psych, donne le ton. Leur musique est dansante malgré les sacrés coups de butoir de la part du batteur. Mais la voix mélodique du chanteur rend l’atmosphère moins dark, bruyante. Nous demeurons pris tout de même par l’énergie, la mélodie et le rythme effréné donné par ce trio talentueux. L’agitation se fait sentir. On commence doucement à s’abandonner, lâcher prise. Nos corps se détendent. On lui laisse toute la liberté de s’exprimer, détendre sa soif d’intentions irrationnelles où seul le désir fait foi ! Nous laissons place à l’aventure, au feu du maitre Dionysos s’entremêlant avec la flamme poétique d’Apollon. Cette première partie nous met en haleine !
Thee Oh Sees
La première partie vient de se terminer. On commence à manquer d’air et à être engourdi par cette chaleur et musique transcendante. Les bières coulent à flot et le public commence à s’ammasser devant la scène. Pendant ce temps les Thee Oh Sees s’installent tranquillement et avec la bonne humeur communicative avec le public. Des photos et des sourires éblouissent l’atmosphère de cette salle. L’impatience. On peut distinguer que deux batteries s’avancent au milieu de la scène. Deux batteries, deux batteurs ; puissante promesse ! Ces batteurs commencent à faire leurs balances que l’on peut ressentir la puissance de leurs batteries en adéquation totale. On se sent comme projeter en arrière, un électrochoc qui parcoure, stimule le corps tout entier.
Cette intensité dépasse l’entendement. Il a pour but de réveiller même les morts de leur sommeil et de venir participer à cette danse, à ce moment. Nous n’avons par conséquent pas le temps de nous endormir. La salle est pleine à craquer. Le public s’impatiente. John Dwyer joue avec les acclamations, les réclamations du public prêt à en découdre. Les deux batteurs n’attendent plus que le feu vert de cet homme. Avec détente et provocation, John Dwyer donne le coup d’envoi, nous propulse dans un espace, un temps, loin très loin des catégories seules de l’entendement. Et pafffff ! Bouummm ! Let’s go ! C’est parti, ça commence fort, très fort. Pas besoin d’introduction ni d’échauffement musculaire et musical pour ce groupe. Pas de temps à perdre ! On est dans le rythme, un rythme endiablé ! Ils se connaissent très bien, tout est huilé, bien agencé laissant place à l’initiative de cet artiste totalement illuminé et génial qu’est John Dwyer. Il nous fait les gros yeux. Ils nous sort la langue. Il crache. Il s’agite dans tous les sens. Un sacré phénomène !
Le rythme est tenu. Le son est puissant. La mélodie est envoutante. Le public ne s’y trompe pas. La joie se lie sur les visages. Les corps sont déjà marqués. La communication entre le public et le groupe est excellente, sans en faire trop ! Les batteries à l’unisson et la guitare folle, le son psychédélique tout comme la voix délurée, nous proposent une danse enivrante, une ballade féérique. Nous sommes transportés, ailleurs, ivres et euphoriques par et pour cette musique. Il y a quelque chose de surréaliste dans cette musique ! Les batteries ne s’arrêtent pas de rythmer cette ballade. La danse quant à elle, répond aux ondes musicales et psychédéliques des notes de guitare de John Dwyer. Il lui appartient, à lui seul, ces riffs, ces notes diaboliques. Le public est entré en trans. Il saute dans tous les sens. Les corps ne répondent plus à la raison. L’abandon est total. C’est le pied !
Des vagues déferlent dans cette salle. Des pogos prennent vie. Le public est transporté par cette marrée. Il ne fait plus qu’un. La marrée monte puis redescend de manière si naturelle et poétique. Une ambiance chaude, colorée, savoureuse éclot. Les vagues se fracassent sur les murs de cette salle. Poséidon, le Dieu de la mer, participe lui aussi à la fête. La terre tremble par le séisme musical que nous vivons ! Nous sommes au milieu d’une tempête bienveillante ! Nous sommes comme des poissons dans l’eau. La nage est agréable ! Nous ne voulons pas que ce moment s’arrête ! L’atmosphère électrique. Un orage rafraichissant. Cette vague serait prête à envahir tout ce qui lui résiste sur son passage par sa puissance.
On prend néanmoins conscience de l’opportunité que nous avons de vivre ce moment. Aucune animosité, une sympathie bien présente. On se regarde tous, partageant la même expérience, un bien être commun. On peut en finir ! Ce voyage vers l’infini, vers l’amour prend fin. Nous sommes tous épuisés autant le public que les musiciens. Fin de la rêverie, d’un songe pur et réconfortant. Dur retour à la réalité. Les lumières s’allument. On se réveille difficilement. Nous prenons la sortie. C’est inexplicable. Il fallait le vivre ! Nous retrouvons peu à peu la lumière naturelle. Nous refaisons surface ! Mais on garde ce moment, cette expérience bien en mémoire. Le corps est fort de cela et l’esprit, la raison est engourdie à essayer de comprendre ce qu’il a pu se passer. Mais une intuition, un ressentiment rassurant, apaisant vient certifier la vertu du moment passé ! Gloire à la musique et à son ivresse !
Crédits photos : Robert Gil