Nul n’est prophète en son pays. Pourtant, après avoir dû s’exiler aux Etats-Unis pour percer, M83 est en train de vivre une belle revanche puisque la mayonnaise prend à vitesse grand V. Après un premier passage en mars dernier qui les a vu faire escale dans une Cigale bondée, c’est aujourd’hui dans un Olympia complet depuis lulure que le groupe pose ses flightcases, après avoir fait un détour par le transbordeur de Lyon et avant d’écumer les festivals d’été. L’orientation plus « chanson » que le leader Anthony Gonzalez a souhaité donner à sa créature sur ses deux derniers albums était visiblement la bonne pioche commercialement parlant, même s’il n’a pas fait que des heureux. Pas que Hurry up we’re dreaming soit un mauvais album, mais je regrette un peu les ambiances moins convenues et les sons de jeux vidéos de « Digital shades vol. 1 » et « Before the dawn heals us ». Bah, chaque virage musical laisse des personnes déçues et le succès donne toujours raison ou presque !
Alors que la salle se remplit gentiment, les anglais de Man Without Country débarquent dans l’indifférence générale. Il faut dire que les pauvres ne sont pas aidés par les conditions qui leur sont proposées : le trio n’a été annoncé nulle part et joue quasiment dans le noir, n’ayant visiblement le droit d’utiliser que quelques malheureux spots de lumière qui peinent à éclairer la scène. Pas sauvés non plus par leur musique, les instrus électro et les lignes de chant étant d’une terrible banalité. Niveau show, entre un batteur et un claviériste bidouilleur dont les mouvements sont forcément limités, l’attention se reporte en grande partie sur un chanteur au charisme inexistant. Inutile de dire que le groupe n’a pas vraiment marqué les esprits ce soir. Au moins a-t il reçu un accueil poli d’une petite partie du public qui n’a semble-t il pas trouvé l’apéritif désagréable.
Les lumières s’éteignent tandis qu’un monstre sympathique (son masque issu d’un magasin de Star Wars est plutôt rigolo) nous rend visite, annonciateur du début du show. Le dernier album traite du monde des rêves, ceci explique cela… C’est ensuite sur l’intro de son dernier album que M83 monte sur scène, sous un tonnerre d’applaudissements. Le morceau est non seulement une réussite à part entière mais fait aussi rentrer l’assistance de plein pied dans le concert avec un magnifique jeu de lumières. Trois losanges de néons disposés en fond de scène, des projos dans tous les sens et des étoiles sur tout le fond de scène, le décor est planté. Et histoire de démarrer fort, le quatuor enchaîne avec le classique « Teen Angst » et se met le public dans la poche avec « Reunion », un des gros singles du dernier album (qui serait vachement mieux sans ses gros « hohohooooo » tout juste dignes de Coldplay. Enfin bon, les goûts et les couleurs…). Malin, Gonzalez varie les plaisirs et se tourne vers sa table à bidouillages pour nous sortir ensuite « Sitting », seul titre du premier album interprété ce soir qui renoue avec de l’électro pur et qui fait bien plaisir !
Le maître à penser du projet est visiblement ému de se produire dans cette salle mythique devant un public tout acquis à sa cause et ne se fait pas prier pour parler en français, confiant qu’il est évidemment ravi d’être là. Il se permettra même de présenter son groupe « d’habitude je le fais pas, c’est super cliché, mais là... » dans la bonne humeur générale. Il faut dire que le public est à bloc, même si de nombreuses personnes présentes n’ont sans doute découvert le groupe qu’avec son dernier album qui est tout de même largement mis en valeur dans la setlist, mais toujours contrebalancé avec des extraits du reste de la discographie de M83 judicieusement placés. Comme sur album, les morceaux « grand public » comme « Steve McQueen » côtoient de petites perles comme « wait ». Mais encore une fois, il est indéniable que c’est bien grâce à cette orientation plus « commerciale » que le groupe connaît ce succès aujourd’hui. Pour autant, il n’oublie pas ses racines puisqu’il propose une reprise de Daft Punk qui fait du bien par où ça passe ! Allez champagne, Gonzalez n’a pas vendu son âme au diable, et même si en ce moment du « Midnight City » on en bouffe à tous les râteliers, ça reste une chanson bien sympa sur laquelle un joueur de saxo débarque, pour le plus grand bonheur de tous.
Le temps de calmer les esprits avec une petite douceur, et les musiciens prennent congé. Hum, certes il va y avoir des rappels, mais tout de même c’est un peu court jeune homme. Surtout que si le show est de qualité, il a tout l’air d’être exactement le même qu’à la Cigale. Remarquez c’est la même tournée hein, mais une petite surprise aurait été bienvenue… Les rappels démarrent sur les chapeaux de roue avec le classique « A Guitar and a heart », une dernière plage atmosphérique et surtout les 10 minutes de « couleurs » qui font danser tout le monde une dernière fois. Sur la forme, il n’y a pas grand-chose à redire. Sur le fond, et bien qu’on se doute que de nombreux bobos parisiens sortis en masse pour voir le dernier groupe à la mode ne trouvent rien à y redire, on ne peut s’empêcher de regretter que le concert n’ait pas duré un peu plus longtemps. La performance physique était là, tout ce petit monde ne s’économise pas, mais on n’a quand même pas affaire à un groupe de death métal qui s’est pété tous les os du corps au bout d’une heure de set ! Bref, tout ça était un peu trop huilé. Ne boudons pas notre plaisir, M83 nous a offert un beau spectacle, mais peut-être pas le grand moment que l’on était en droit d’attendre de cette date aux allures de consécration.