Déferlantes 2017 acte 2 ! Ce soir le festival est résolument placé sous le signe du rock ‘n’ roll avec en tête d’affiche, Midnight Oil, les fous furieux de Ludwig Von 88 et surtout monsieur Sting ! Let’s rock !
Mise en bouche en douceur avec un petit set acoustique de Findlay. La jeune anglaise et son groupe nous livrent un petit avant-goût de ce que sera leur set du lendemain sur la grande scène.
Une prestation acoustique finalement très rock. On y reviendra dans le report de demain après son passage sur la grande scène…
Sur la scène Nouvelle Vague, tout le monde est déjà à pied d’œuvre. Retenus en interview, nous avons loupé le concert de Vilorio mais on se rattrapera avec Le Super Homard, dont la session acoustique un peu plus tôt dans la journée avait déjà insufflé un air de vacances. En version électrifiée, allongés dans la paille, on écoute une pop plutôt planante et légère, mais qui par moment prend des airs plus sombres. Le set alterne entre des morceaux complètement instrumentaux et des chansons où la voix douce de la chanteuse et les nappes synthétiques recherchées font contrepoids aux instruments rock traditionnels (guitare, basse, batterie).
Après eux, Perfect Hand Crew nous ont fait découvrir le "grime", un genre musical typiquement londonien, mêlant electro, drum & bass, dancehall et Hip-hop. A des kilomètres de notre rock chéri habituel, mais on en prend quand même certains à bouger leur boule sur le flow des deux montpelliérains et de leur MC.
Des 17h, après une petite averse salutaire dans la chaleur étouffante de Valmy, les festivaliers commencent à investir les grandes scènes pour le démarrage de Rationale. Il y a déjà beaucoup de monde pour voir le chanteur britannique. Immédiatement, les basses très (trop) fortes font vibrer l’air et l’estomac. Les morceaux sont assez soul, la base rythmique est groovy, faite pour initier le mouvement de déhanché. Là-dessus se posent des instrus qui lissent le rendu, entre pop et r&b .
La voix de Tinashe Fazakerley est chaleureuse, pour des chansons de lover. Il parle de charbons brûlants, promet des "whole lotta love", jure des "nobody but you". L’avant-dernier morceau "Fuel To The Fire" gagne en intensité. Guitare et basse sont à l’honneur. La voix plus rocailleuse et les paroles aussi contribuent à faire sortir du lot ce morceau. "Pressure keeps on pushing on my shoulder […] ain’t no justice […]".
L’anglais a un son énorme ! Les gens adhérent ! Mais pourquoi un son de basse aussi fort ? C’est pour voler la vedette à Sting ? Dommage car ce buzz de basse fini par être dérangeant et semble lasser un peu le public.
Place ensuite aux Last Train. Le combo rock français a le vent en poupe. Les médias se les arrachent, les encensent. Le public aussi semble apprécier. Last Train envoie du bois, dans un registre Black Rebel Motorcyle Club croisé avec Brian Jonestown Massacre. En intro, "Misirlou" de Dick Dale (popularisée par la B.O. de Pulp Fiction). Visiblement, ils aiment le cinéma de Tarantino, il y a deux ans ils étaient entrés sur "The Grand Duel", de Luis Bacalov, popularisé par Kill Bill.
Ils attaquent à fond de batterie, moins garage et plus hard-rock, avec les guitares grinçantes et la voix écharpée de Jean-Noël. La basse arrondit les angles à vifs du quatuor. Ils sont déchainés sur scène. Les basses toujours beaucoup trop fortes rendent les premiers rangs intenables. Si devant ça pogote avec plaisir, l'ambiance à l'arrière du concert est plus laid back, détendu.
Le rock vintage des Last Train passe très bien pour les festivaliers, qui allongés par terre sur le sol qui résonne, regardent passer les nuages. Plus c'est lourd, plus ça vibre, plus on est emporté. Avec "Golden Song", chanson du nouvel (et premier) album Weathering sorti le 7 avril, on lorgne vers un rock plus mélancolique, qui fait d'avantage penser au rock 90's. Même la voix est moins grinçante. La suite est dans cette veine 90's, moins virtuose, guitaristiquement parlant, mais ça reste assez intense. La voix rappelle les Stereophonics. Last Train surjoue peut-être un petit peu, mais peut-on leur en vouloir ? Ils surfent sur la vague du succès médiatique. Sont-ils là pour durer, l’avenir nous le dira…
On passe maintenant à LP. L’anglaise apparait tout en simplicité dans les allées du festival, discute. Puis cette jeune femme affable va se transformer en une véritable bête de scène en arrivant devant son micro. Son look rappelle étrangement Bob Dylan des années 60 ou encore un Lou Reed post Velvet Underground.
Ce qu'on remarque d'abord c'est une attitude, un sourire carnassier, des moues de travers, des sifflements, une allure dégingandée, androgyne. Vient ensuite une voix un peu provocante, parfois nasillarde, parfois pleine de trémolos. Une façon de jouer avec sa voix qui rappelle Kate Bush. Les morceaux sont pop électrisés de guitares. C'est entraînant. LP semble nous inviter au voyage, à l'image du tatouage de voilier que l'on peut apercevoir sous sa chemise entrouverte.
LP joue de la guitare sèche (qu'on entendra à peine, voire pas du tout), du ukulele (qu'on entend à contrario très bien), de l'harmonica aussi… Certains morceaux ont un beat plus lourd, un peu electro, avec des parties de guitares hyper saturées, un autre est particulièrement dansant, un peu disco sensuel, avec des clins d'œil aux popstars Britney et Shakira (paroles " Hips don't lie" ou "hit me baby one more time"). Musicalement, LP après avoir beaucoup travaillé pour les autres, nous livre sa propre vision de la musique pop rock et elle sait entrainer dans son sillage le public venu massivement pour voir Sting. "Lost On You", son single placé en fin de set clôturera un concert globalement plaisant qui réussira dignement à faire patienter les plus grands fans de Police.
Avant le bassiste chanteur tant attendu, ce sera d’abord au tour de Birdy de faire le boulot. La jeune anglaise réussira à envouter le parc de Valmy avec sa pop folk ultra sensible. Au piano, elle se livre tout en simplicité et ses reprises de “Skinny Love” de Bon Iver et “People Help People” de Cherry Ghost font toujours mouche. Ses compos sont classieuses et le set prend des allures un peu plus pop lorsque Birdy empoigne sa guitare. Un beau moment tout en nuances avant la Déferlante Sting !
Sting…. Un grand monsieur arpente ce soir la scène du festival. Les classiques de Police s’enchaînent et se mélangent avec ceux de la carrière solo du légendaire bassiste. Celui qu’on attendait tous ce soir apparaît sur scène, entouré de deux guitaristes, d'un batteur, de deux choristes dont l'un est son fils Joe Sumner, et d'un accordéoniste. Pour deux morceaux, le violoniste de Birdy viendra les rejoindre.
Véritable concert best of, Sting n'est pas avare de ses hits, de Police ou en solo. Quelques grands moments se dégagent notamment avec "Shape Of My Heart" qui déchainera les groupies du premier rang. "Englishman In New York" plantera le décor avec son ambiance feutrée. "Message In A Bottle", toujours adorée par les fans (ça fait vraiment quelque chose à être des milliers à chanter "Seems I'm not alone at being alone"). Lorsque Sting reprend avec son fils "Ashes To Ashes" en hommage à David Bowie, la foule s’enflamme.
L'accordéon donne une note sud américaine à certains morceaux comme "Fields Of Gold", qui est accueilli par un soupir d'aise par le public. Les morceaux de Police ne perdent pas leur mordant. Certaines chansons sont chantées avec le public ("Walking On The Moon", "So Lonely", évidemment "Roxanne"). Sur "So Lonely", la basse de Sting et une des guitares assurent la base reggae tête à tête, pendant que l'autre guitariste tricote son punk rock. Sting joue à moduler sa voix sur les "lonely lonely lonely lo..." du pont avant que ça ne reprenne furieusement avec le public qui saute de joie, plus "lonely" du tout.
La soirée est encore loin de se terminer après cette heure de demi de Sting qui nous laisse sur les rotules. L’ex Monsieur le Ministre australien, Peter Garrett emmène sur scène ses Midnight Oil. En intro, le thème de Midnight Express de Gorgio Morodor, pour Midnight Oil, à minuit... On est synchro.
Encore une voix à la signature reconnaissable entre mille. Peter Garrett n'a pas perdu sa verve. Ecologiste militant, engagé auprès du peuple aborigène, il exhibera dans la seconde partie du set un t-shirt à message "to silence when we should protest makes cowards out of men" " que l'on pourrait traduire par "se taire quand on devrait protester rend les hommes lâches".
Gestuelle saccadée, théâtrale, parsemée de symboles détournés : un signe de croix bizzaroïde, un geste de salut militaire qui se termine par un signe de balle tirée dans la tête… Les Midnight Oil font le show. Les premiers morceaux sonnent comme un western australien, avec leur hard rock enjoué. Ensuite des petits effets électros se mêlent au hard rock, avec parfois l'utilisation d'une batterie électronique.
Midnight Oil a un public de fidèles qui chantent les paroles. Avant dernier morceau.. Garrett nous demande si on a sommeil, si on veut aller se coucher dans nos lits... Quelle chanson annonce-t'il là ??? Le combo enverra bien évidemment une terrible version de "Beds Are Burning" reprise en cœur par un public extenué mais conquis. "Forgotten Years" pour clore le set et le tour est joué !
Et pour les plus résistants, ceux qui on choisi de rester pour Ludwig Von 88, ils ont fait le bon choix. Emmenés par un Karim Berrouka en plein bourre et un Nobru (plus connu sous le nom de Sergent Garcia dans une autre vie), le groupe envoie son punk alternatif sans concessions ! Boite à rythme, guitare, basse, et chant, besoin de rien d'autre pour faire péter les "bpm" sur leur punk de déglingués sur fond de culture populaire et cotillons. "Hou La La" comme ils disent ! Les quatre semblent s’amuser comme de petits fous après avoir bien profité de l’après-midi dans les coulisses du festival. On vous reparler de tout ca bientôt dans l’interview qu’ils nous ont accordé quelques heures avant de monter sur scène.
Même si le plus gros du public s'en va, soulevant sur son passage un nuage de poussière, les irréductibles massés devant la scène voient les Ludwig débouler costumés, comme à l’accoutumée, dans des tenus de catcheur pour l’un, avec une perruque façon Louis XIV pour l’autre... Punk, ska, Raggamuffin avec un chanteur invité. Chansons engagées contre les armées, la pauvreté, les campings, la Nouvelle-Orléans ravagée par l'ouragan Katrina, le terrorisme... Les thèmes sont traités avec humour, et force de synthé qui fait "pic poc". On danse pieds nus dans la paille, quand on ne slamme pas au dessus du pogo sous le regard étonné des bénévoles qui ne s'attendaient pas à cela. Certains sont nés bien après la vague de punk rock alternatif français qui a vu naitre Ludwig Von 88.
Les paroles pleines de dérision font toujours mouche. Mention spéciale à "Oui Oui dans sa voiture rouge et jaune" pour ouvrir le set. En cette période de Tour De France, ils chanteront les louanges de Louison Bobet avec 'Louison Bobet Forever" . Les fans de punk et de rock alternatif se souviennent de la grande époque et exultent à la relecture de toutes ses pépites de Ludwig Von 88 alors que le public de Sting beaucoup plus conventionnel découvre avec effroi cette musique du diable et raisonnablement préfère prendre la tangente… Hé hé, les Ludwig Von 88 sont toujours punks et ne respectent toujours pas les standards. En plus, ils semblent s’amuser comme des petits fous !
On n’oublie pas "William Kramps", le tueur de bouchers, les "Gerriers Baloubas"… Allez "Fistfuck Playa Club" et vive les Ludwig Von 88 ! Ca c’est fait !!!
Presque deux heures du mat’ ! Il est grand temps de regagner nos pénates avant de revenir en force demain pour vous parler entre autres des anglais de Findlay et surtout de l’Iguane Iggy Pop en personne aux Déferlantes, ça devrait valoir son pesant de cacahouètes !
Textes : Laetitia Maciel, Eric Jorda et Patrick Quinta
Photos : Yann Landry / La Tête De L’Artiste, Patrick Quinta, Eric Jorda
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