En écoutant Dark Matter, le dernier album de Randy Newman, on se sent plongé dans une ambiance théâtrale, entre café-concert et comédie musicale, on se laisse porter par ses histoires rythmées et sa voix grave de conteur-crooner.
Randy Newman écrit depuis toujours des chansons satiriques, mordantes, mettant sa plume sophistiquée au service de paroles acides et engagées. Au début, cela n'a pas semblé plaire au public des années 1970, mais son premier succès (il lui aura fallu 3 albums, note aux musiciens d'aujourd'hui : persévérez !) est tout de même extrêmement connu : « You can leave your hat on », en 1972…
Le 4 août de cette année, le gars Newman, du genre productif, sortait son 17e album (le précédent date de 2008), et en évoluant au fil des 9 chansons de Dark Matter, on se sent comme dans les dessins animés, avec cette ambiance jazzy, ces arpèges intercalés de narrations théâtrales… et pour cause, ce chanteur-compositeur-pianiste a en effet pas mal participé à des bandes originales de dessins animés, se montrant donc indispensable pour poser des ambiances cinématographiques.
L'album commence comme une comédie musicale, avec un côté « Jesus Christ Superstar », par les 8 minutes de « The Great Debate », discussion éternelle entre science et religion où le gospel climato-sceptique cherche des arguments contre les scientifiques.
Randy Newman sait poser les ambiances, on se sent comme au centre de la scène, entouré de danseurs, on pourrait visualiser les effets de lumière, les chorégraphies et les jeux d'acteurs. On trouve des chœurs féminins, un piano enjoué, des plages de dialogues… bien loin des morceaux de musique habituels, l'univers développé ici est plutôt celui d'histoires contées pour les grands.
Père Randy, raconte-moi la science, le deuil, l'amour, la tristesse… Raconte-moi Vladimir Poutine, aussi, fais tonner les percussions comme les chenilles des blindés et claquette des semelles comme les danseurs des chœurs de l'Armée rouge.
Le décor des scènes romantiques est posé avec quelques arpèges de piano, le paysage de plage s'étend grâce à quelques pincements de cordes, et la scène s'anime au son des cuivres ; tout un orchestre est rassemblé pour donner vie aux panoramas que l'on peut imaginer dans effort.
Loin des fioritures post-traitées, on entend un son léché dans un style digne d'un opéra. Dark Matter carbure aux instruments acoustiques, piano, cuivres, cordes principalement, que la version sur scène devrait rendre encore plus appréciables, pour les oreilles et les yeux.
L'auteur a souhaité concevoir un album destiné à divertir. Il n'est pas fait pour danser, ni pour chanter, c'est plutôt un album qui s'écoute comme on regarde un film.
Sortie le 4 août chez Warner.