Une viole de gambe électrique plantant un décor mystérieux, des saturations oppressantes, une voix autoritaire qui sort parfois de cette atmosphère épaisse et lancinante... Machinalis Tarantulae nous piège bien vite à sa toile double-face gluante et mécanique.
À la première écoute, on se semande ce que c'est. Ces sonorités étranges, cet agencement brinquebalant de cliquetis et saturations rouillés... À la deuxième écoute aussi. Et puis à toutes les autres.
Machinalis Tarantulae, pour faire simple, c'est un projet électro-indus gravitant principalement autour d'une viole de gambe électrique.
Depuis 2014, Justine Ribière habite cette création, qui a vu naître Tabularium en 2016. Devenu un duo depuis l'arrivée de Miss Z, Machinalis Tarantulae s'étoffe désormais d'une guitare et de voix rauque, ajoutant un côté plus épais aux sonorités mystérieuses que l'on pouvait entendre avec les distorsions électriques d'un instrument ancien qu'on a peu l'habitude de voir ailleurs qu'en expo ou en foire médiévale.
Sur les 12 morceaux de Diptyque, les sonorités électroniques anoblies par un grincement de viole laissent parfois la place aux chants scandés, lancinants, mais aussi aux grunts assortis de saturations industrielles ajoutant une violence de machine à la légèreté organique.
Les grésillements de moustique électrique mutant de «Hb» font aussi penser aux petits pas furtifs d'une araignée qui tapote, tapie dans son coin et attendant son heure, comme sur «Sable». De manière insidieuse, la petite bête monte, monte, monte, jusqu'à envahir l'oreille et ne plus se décrocher du tympan.
Mention spéciale à «Obsolete», qui réussit avec brio à faire évoluer cette atmosphère, la viole onirique soutenant une ambiance inquiétante sous-jacente, qui se révèle soudain, gonfle, et prend toute la place.
Un aspect plus saccadé et samplé, où l'inspiration électro reprend le dessus, s'entend sur quelques mélodies («They Said» ou «Dark Dark Green»)... très vite contrasté par les voix et les arrangements, sans parler du thème loin de la santé mentale et des paroles, aussi élégantes et délicates que «kills and murder», qui s'éloignent franchement de l'ambiance clubbing et boule à facettes.
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(Photo Facebook)
Ce Diptyque, c'est la cohabitation du sombre avec l'énergique, de la mélancolie et de l'entrain, de l'ancienneté d'un instrument ancient avec le présent des innovations et de l'électronique. Avec cet album dense et aérien, les deux artistes signent un style abouti, sûr et efficace.
Sortie le 4 septembre 2017 chez Audiotrauma