La tête à penser du groupe liverpuldien Anathema s'est concentré sur la création d'un album solo, Monochrome, sorti le 13 octobre 2017 via KScope. Profitant de la tournée française du groupe pour présenter The Optimist, le multi-instrumentaliste et chanteur s'est livré à nous à travers dix questions sur cet album, son état actuel et sa façon de voir l'avenir.
Bonjour Dany, et merci d’accorder cet entretien à La Grosse Radio. Pour commencer, nous voudrions savoir comment tu vas ?
"Ca va, ça va". Je vais bien en ce moment. Nous sommes en pleine tournée avec Anathema, pour l'album The Optimist. Je viens juste d'échanger avec un chauffeur de taxi sur ce que c'est que d'être parent. J'ai surtout parlé du contact que je garde avec Ariel, ma petite fille de quatre ans. Je suis content. Tu le sais, j'aime jouer de la musique, j'aime composer. Et pouvoir concilier les deux me rend heureux. Je dors vraiment bien en plus dans le tour bus !
Tant mieux ! Quelques mois après la sortie de The Optimist, tu nous offres un album solo, Monochrome, à la fois psychédélique et personnel. Peux-tu nous en dire plus sur ce projet ? Pourquoi un album solo ?
C'est une excellente question, à laquelle je répondrais par une autre : et pourquoi pas ? (rires) C'est un bon moyen pour moi d'avoir l'esprit occupé, et j'ai besoin d'être occupé ! Tu sais de quoi je veux parler, n'est-ce pas ? C'est bon de rester concentré sur quelque chose ! Plus je suis concentré, mieux j'écris, mieux je compose. En fait, je me suis servi de compositions que nous ne pourrions pas intégrer à la track-list de Anathema. Je les ai présentées à John (Douglas, batteur) et Vincent (Cavanagh, guitariste et chanteur) avec d'autres créations en leur demandant qu'elles étaient les musiques qu'ils ne voudraient pas jouer. Je les ai travaillées pour en faire un album solo. Sauf une, que j'ai voulu garder...et elle se nomme "The Exorcist".
Il y a des morceaux vraiment magnifiques. Je pense à "This Music" ou "Soho". Mais je vais surtout parler de "The Exorcist" puisque c’est pour le moment (au jour de l'interview, NDLR) le seul que les gens ont entendu. À qui s’adresse cette composition ? Pourquoi ce titre “The Exorcist” ?
Je l'ai écrite "pour ma mère" (en français, NDLR). J'ai commencé à écrire des chansons pour ma mère il y a de cela vingt ans. Elle souffrait d'une très longue maladie. Cela m'a beaucoup affecté. Puis elle est décédée lorsque j'avais vingt-cinq ans si je me souviens bien. Je ne veux pas te dire de bêtise...oui, je devais avoir vingt-quatre ou vingt-cinq ans. Toujours est-il que cela m'a profondément marqué, aujourd'hui encore, cela me poursuit, comme tu peux le comprendre. Ce que cette chanson raconte - je ne le dis pas si clairement d'habitude, mais pour cet album solo, je me devais de le faire, car c'est ce que les gens veulent entendre - c'est que je demande tout simplement à ma mère, d'où qu'elle me voit aujourd'hui, si elle est fière de moi...
J’ai lu que lorsque les membres d’Anathema ont entendu ce morceau, ils l’ont adoré ! Et pour l’album complet, qu’en ont-ils pensé ?
Nous sommes une famille, nous sommes toujours très positif sur notre travail. Vincent a toujours pensé que c'était une bonne idée pour moi que de faire un album solo. Cela évite de submerger le groupe avec de nouvelles compositions. Cela me permet aussi d'avoir une porte de sortie pour les musiques que la bande ne veut pas jouer. Qui plus est, il n'y a eu aucune pression dans le cas présent. Vincent a toujours été favorable à ce que je travaille avec Anna Phoebe ou Anneke Van Giersbergen. Tout s'est réellement déroulé dans une ambiance très positive.
Oui, tu t’es bien entouré sur cet album : Anneke Van Giersbergen et Arjen Lucassen apportent une atmosphère différente. Et la violoniste Anna Phoebe est vraiment superbe ! Comment ces collaborations se sont-elles déroulées, comment ont-elles commencé ?
Et bien, nous sommes amis avec Anneke depuis plus de dix ans maintenant. Lors d'un festival metal en Roumanie, je me suis rendu compte que nous avions des points commun, et je lui ai dit que j'adorais sa voix. Nous avons commencé à travailler ensemble sur un projet de concert acoustique, projet qui a abouti. Pour moi, travailler avec Anneke était un choix évident. Elle a bien travaillé, et l'a fait très rapidement. Concernant Anna Phoebe, c'est vrai qu'elle était déjà avec nous au concert de Liverpool. Elle a cette qualité d'improvisation, en quelques heures, elle improvise sur des compositions ! Elle nous a accompagné avec son propre projet lors de notre tournée accoustique dans des cathédrales. Elle fait d'ailleurs une belle apparition sur le DVD Homecoming, lors de la chanson "Anathema", avec un solo au violon. Elle a un son particulier. C'est une chic fille et une excellente musicienne. Elles le sont toutes les deux !
Que penses-tu du résultat final ?
En fait, je ne l'ai plus écouté depuis longtemps. Mais j'aime bien, en particulier "The Silent Flight Of The Raven Winged Hours", c'est la composition dont je suis le plus fier. J'ai eu de la chance de pouvoir travailler avec un maître au mixage. Il a fait exactement ce que je désirais. Il sait y faire, comme avec cette ambiance chaude de piano dans Weather System. Donc, oui, j'adore le résultat que cela donne. Et j'ai hâte d'en recevoir une copie (rires).
As-tu pensé à jouer ces compositions devant un public ? Cela a déjà été le cas pour “The Exorcist” d’ailleurs, je crois me souvenir d’une vidéo YouTube où tu étais seul avec une guitare pour interpréter ce morceau. Tu penses le refaire ?
Oui, je pense le refaire. Pour le moment, nous sommes encore en pleine tournée pour The Optimist, et cela prend déjà beaucoup de temps, et je ne peux malheureusement pas m'y consacrer pour le moment.
On ne peut pas parler de toi, sans parler de Anathema. Comment vois-tu ton parcours musical aujourd’hui, avec Anathema et en solo ?
Je suis assez content du "voyage musical" que nous avons fait avec le groupe, c'est une des choses qui se passe plutôt bien ! (Il réfléchit) Oui, je suis content, j'aime les développements qui prennent du temps, on y éprouve vraiment beaucoup de plaisir, à écrire des albums avec John et Vincent, puis à les enregistrer. Je suis aussi heureux de voir que notre dernier album, The Optimist, soit si bon, malgré cette différence avec ce post-rock qu'il contient. Il est beaucoup plus instrumental, avec des passages quasi sans chant. Je l'aime beaucoup, donc je suis content de ce que nous faisons et j'aime ça. J'ai arrêté de penser uniquement à la formule habituel des albums d'Anathema. Parce qu'il faut différencier deux choses : les fans de rock aiment la musique rock. Mais les fans de metal aiment le metal en général, mais aussi tout un tas d'autres styles que cela englobe. Ils aiment les grosses batteries, avec des riffs de guitares lourds. Et c'est chouette de faire cela. Mais c'est bien aussi de faire différemment. Ce que j'aime en ce moment, c'est que nos concerts commencent avec une musique électronique, et c'est quelque chose dont je suis très fier. Regarde Radiohead par exemple : ils sont prêts à perdre leurs fans en étant différents, mais ils n'ont pas tout perdu, parce qu'ils sont très bons ! Je pense qu'il n'y a rien de mal à changer de style tant que tu écris toujours de bonnes chansons. Je suis assez content que nous ne nous soyons pas vraiment bloqués dans un style, nous devrions en faire un autre genre musical, classique, émotionnel et intense. C'est de ces mélanges musicaux dont je suis le plus fier. Cela ne m'effraie plus, tout comme à John et Vincent. C'est un risque que nous sommes prêts à prendre. Il y a quelques années encore, je ne l'aurais pas fait. Il y a des styles que nous ne jouerons pas, question de goût, mais c'est comme cela que je ressens les choses aujourd'hui. Je suis heureux avec ça.
As-tu des regrets, des ambitions ? Vincent nous disait au mois d’avril que vous aimeriez faire des musiques de films.
Oui, ce n'est encore qu'au stade d'ambition, mais je serais très honoré de composer de la musique de film. Pour un bon film ! J'ai rencontré l'année dernière Hans Zimmer, à un de ces concerts à Tenerife, en compagnie de Stephen Hawking et Brian May. Cela a été pour moi l'une de mes plus grandes expériences. Tu sais ce que cela fait de rencontrer des gens qui ont fait un tel travail et qui ont eu tant de succès dans leur domaine d'inspiration, et je ne m'attends pas à ce que ce soit à ce niveau de mon côté. Mais, ce serait bien de faire quelques pas dans cette direction, ouais, je serais ravi. Si seulement les producteurs de films entendaient cela (rires) !
Merci Dany, et à très bientôt lors d'un concert !
Merci, merci, merci ! Je me souviendrais de vous !
"Au revoir" (en français, NDLR).
Merci à Valérie de JMTConsulting
Merci à Daniel Cavanagh
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