Après 10 ans d'existence, les new-yorkais de The Men sortent un nouvel album, Drift, qui les fait prendre nouveau tournant dans leur carrière en laissant de côté les guitares saturées. Toujours aussi radicaux dans leur approche musicale, il retrouvent Sacred Bones Record, leur label de toujours. Après le retour aux sources de Devil Music, le groupe commence une exploration bien plus expérimentale, mais toujours aussi rafraîchissante.
À chaque nouvel album, on découvre un peu plus de la personnalité et des inspirations de Mark Perro et Nick Chiericozzi, les deux compositeurs multi tâches. Après avoir débuté dans le punk ou s'être essayé avec succès au classic rock sur Tomorrow's Hits (aux multiples influences folk, voire country), The Men prend un tour plus expérimental. Excepté le très énervé « Killed Someone », aucun titre n'a pour base un riff de guitare. Ce sont les claviers qui sur ce LP font office d'instruments privilégiés de composition (« When I Held You In My Arms »).
Drift propose aussi une production bien plus simple que ses prédécesseurs en mettant de côté les overdubs et la multiplication des pistes. Cette simplicité accompagne parfaitement le côté légèrement psyché-planant qui sous-tend tout l'album. « Rose On Top Of The World » par exemple, très Love période Forever Changes. Des mélodies et des riffs moins évidents à reconnaître, mais un mix qui les met parfaitement en valeur, c'est la trame de cette album.
Pourtant, on trouve The Men plus que jamais amateur de sons profonds et parfois très lourds (« Maybe I'm Crazy »). Le groupe joue avec la précision de l'enregistrement - sur bande - de Travis Harrison, le producteur qui officie sur cet album. Le saxophone, les claviers, la batterie… tout est joué avec une rage contenue, parfaitement captée par l'enregistrement. On retrouve toujours l'influence fondatrice de Sonic Youth sur quelques titres, mais le grunge-noise rock des début a laissé place à une composition beaucoup plus épurée, quasi acoustique sur plusieurs morceaux (« Come To Me », entre folk et country). Sans jamais tomber dans le simplisme, Drift enchaîne les surprises : « So High » et son harmonica, « Sleep » et sa guitare steel, loin des standards du groupe.
Crédit photo : Josh Coleman
Drift se détache enfin par une cohérence étonnante. Entre la grosse caisse martelée, la voix criée, la basse omniprésente de « Maybe I'm Crazy » et la guitare acoustique de « Come To Me » rien de commun. Pourtant, l'album passe de l'un à l'autre en neuf titres, possédant tous une personnalité propre et affirmée qui donne une force et un souffle rarement proposé par le groupe. À l'aide d'une production millimétrée, l'originalité planante du groupe traverse l'intégralité de l'album.
Toujours en quête de renouveau, The Men réussissent encore à surprendre. Dans un style bien plus expérimental, le groupe pousse toujours plus loin ses idées de composition, sans aucune concession. Radicaux, comme un retour à leurs débuts.
Sortie le 2 mars 2018 sur Sacred Bones Records