The Damned, c’est le groupe qui a participé à la naissance du mouvement punk, du rock gothique, de la new wave, qui a influencé le punk hardcore aussi bien que le glam rock, et qui peut se vanter d’une discographie extrêmement variée. Plus de quarante ans après leur formation, les vétérans tiennent toujours la route et continuent de proposer des albums indéfinissables.
Cela faisait exactement dix ans que le groupe britannique The Damned n’avait pas sorti d’album studio. Cela n’a pas empêché les vétérans du mouvement punk d’être très occupés, continuant d’arpenter les scènes du monde entier, et notamment la Warzone du dernier Hellfest.
Si le groupe s’est assez naturellement éloigné du punk très brut et radical de ses tous débuts, on ne sait jamais à quoi s’attendre avec lui : punk, gothique, new wave, teenage rock, punk ou hardcore…. Leur album précédent, So, Who’s Paranoid, était déjà extrêmement divers, travaillé, et au final, convaincant.
Evil Spirits continue le mélange des genres : on a droit à de la pop, du rock progressif, de la new wave… Et il faut bien reconnaître que ce n’est pas un animal qui se laisse apprivoiser facilement. Les premières écoutes peuvent susciter de la perplexité : c’est très bien effet, mais on ne sait quoi en penser.
Le premier morceau, "Standing on the Edge of Tomorrow", démarre tout en chœurs pop et en voix aux accents, aux choix, new wave ou rock progressif. L’ambiance est sombre et légère en même temps, la mélodie accrocheuse avec quelque chose d’assez rétro, la voix du chanteur David Vanian se fait par instants suaves, la sonorité des guitares de Captain Sensible et Paul Gray évoque des paysages cinématographiques, et l’on se retrouve d’un instant à l’autre dans un James Bond puis dans un Western.
La suivante, "Disguise", prend le contrepied en proposant un rock beaucoup plus brut et direct, avec quelque chose d’assez groovy. On admire la facilité des musiciens à passer d’un genre à l’autre, à mélanger plusieurs influences au sein d’un même morceau, et celle du chanteur David Vanian à jouer sur plusieurs registres vocaux, du plus doucereux au plus punchy.
Le groupe enchaîne ensuite avec une ballade assez pop-rock au charme désuet, "We’re so Nice", où les chœurs sont de nouveau à l’honneur, de belle facture, même si elle semble plus anecdotique que les deux premiers morceaux.
Le groupe montre ainsi qu’il maîtrise toujours son sujet et ne se repose pas sur ses lauriers, il explore plusieurs voies au sein d’un même album, n’a pas peur de proposer, tout en gardant une patte un peu old school qui le différencie du reste de la production musicale actuelle. Les riffs de guitare changent d’un titre à l’autre pour faire changer d’univers, les claviers new wave alternent avec les cuivres plus chauds. Certains morceaux sont de vrais OVNI dont on ne sait trop que penser, comme "Look Left", qui semble un mix entre la chanson de crooner et le rock progressif, ou la chanson titre "Evil Spirits", très axée rock progressif elle aussi, mais avec une approche beaucoup plus directe. "Shadow Evocation", quant à elle, a quelque chose d’une rêverie sous acide.
Pourtant, durant les premières écoutes, il manque quelque chose pour que l’adhésion soit totale. Peut-être qu’à trop vouloir jouer sur des registres différents et chercher à montrer qu’ils sont capables de tout, les musiciens ont un peu oublié d’injecter de la cohérence et des émotions dans l’album : au fond, on ne sait pas vraiment où ils veulent nous emmener.
Les légendes du punk restent cependant au-dessus de la moyenne musicale et l’album se laisse écouter, avec une certaine perplexité par moments, mais également une forme d’addiction. Et imperceptiblement, au fil des écoutes, les pièces du puzzle se mettent en place, et l’on finit par percevoir, de façon un peu confuse, le lien qui unit les morceaux, donnant alors à l’ensemble une harmonie qui manquait jusque-là. Et les envolées lyriques des chœurs, l’énergie de "Sonar Deceit", les cuivres, la variété des arrangements, le côté décalé dans l’interprétation de "Procrastination", la construction de "The Daily Liar" aux accents jazzy ou le final prenant qu'est "I Don't Care", convoquant une dernière fois la chaleur des cuivres dans un sentiment d'urgence, finissent par convaincre définitivement.
Tracklist
Standing on the Edge of Tomorrow
The Devil in Disguise
We’re so Nice
Look Left
Evil Spirits
Shadow Evocation
Sonar Deceit
Procrastination
The Daily Liar
I Don’t Care
Sortie le 13 avril chez Spinefarm Records
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