La soirée au Point éphémère pour le concert de Pyrit le 11 avril dernier a commencé sous le bruit de l'électro pure, d'un style fort éloigné de celui habituellement présent sur notre webzine, mais qui faisait vibrer jusque dans les os. Pour les curieux, il s'agissait de Somaticae.
Somaticae, groupe formé d'une personne fusionnant avec son clavier électronique. Les sonorités qu'il en faisait sortir impressionnaient vraisemblablement les auditeurs arrivant dans la salle, car ils laissaient un respectueux périmètre de sécurité autour de lui.
Il faut dire que c'est peu commun de voir un musicien au milieu de la piste tout seul. Il se sentait d'ailleurs très isolé, et a demandé un rapprochement, aussitôt suivi en bloc, ce qui a permis de laisser entrer le reste des spectateurs qui poireautaient désespérément dans la fumée tabagique devant la salle.
Eh oui, du fait d'une organisation architecturale très ouverte et enchâssée, le Point éphémère c'est un retour avant 2007, quand les lieux de débauche étaient encore enfumés. Sera jeté un sort de désagrégation asthmatique des poumons au premier qui regrette.
Après l'entracte où l'on pouvait acheter des cassettes et des vinyles (dommage, j'avais oublié mon sac banane et rasé mon mulet), le groupe également formé d'une seule entité biologique et de multiples appareils Pyrit s'est matérialisé sous les cris de joie de ses admirateurs, dont votre serviteur.
Personnalisé par Tomas Kuratli sous la forme d'un humanoïde vêtu d'une cape lui donnant l'allure d'une chauve-souris, Pyrit s'est avancé sur la scène enfumée, éclairé par derrière, et se cachant derrière un spot éblouissant au ras du public.
Et la magie a opéré, dès les premières mesures de « I don't » tout le monde a embarqué dans un voyage planant. La voix de l'artiste se faisait tantôt aigrelette, tantôt grave, au gré des modulations. Son corps, agité de soubressauts, rythmait les sonorités psychédéliques rendues palpables par l'emploi d'antennes converties en thérémines, ou bien faisant, plus probable, partie d'un arsenal musical extraterrestre dont ce multi-instrumentiste seul a le secret.
Maniant la guitare, les cymbales, la batterie, le pied de micro (ça sonne bien !) et surtout les synthétiseurs cosmiques, Pyrit n'arrête pas une seconde sur scène, lançant ses membres par saccades pour atteindre la bonne commande au bon moment. Il ressemble au commandant d'un navire dont lui seul a le secret, dont lui seul connaît la disposition et le fonctionnement.
Pas de sauts, pas de bras en l'air, pas d'interaction avec le public pour exhorter les gens à danser ou crier. Pas besoin de tout cela pour planer, la musique s'Pyrituelle se ressent avant tout de manière personnelle et intime. Tout le monde dodeline de la tête en rythme, mouvement ondoyant sous des impulsions invisibles. C'était la première fois que j'assistais à un concert sans pogo dans la fosse. Déstabilisant.
Un concert où la majorité du public avait les bras croisés, et où pourtant tout le monde appréciait, sourire aux lèvres, dans les spots de lumière. La délectation personnelle des sons cosmiques n'a pas besoin de démonstration extérieure.
Et puis il a disparu. Extraterrestre repris par les siens dans un nuage de fumée. Les hauts-parleurs ont continué à égrener la musique, et c'était tout. Comment aurait-il pu en être autrement ?
Photos : Jérôme Brody / Point Ephémère. Gros merci à lui !