Reverend Beat Man ! Ce n'est pas n'importe qui celui-ci ! Un pédigrée à faire pâlir d'envie tout fan de rock garage et de blues trash. Avec ce nouvel opus, Le patron du label Voodoo Rhythm nous entraine sur les traces des pionniers du blues trash si chers au label Fat Possum. Ici Junior Kimbrough, R.L. Burnside, T. Model Ford sont disséqués et resservis épicés.
Le Beat Man est souvent en one man band mais cette fois-ci, c’est accompagné de The New Wave (composés de sa complice Sister Nicole Izobel Garcia au chant, de Mario Batkovic à l'accordéon, de Julian Sartorius derrière les fûts et du multi-instrumentiste Resli Burri) qu’il nous livre ce nouvel effort sorti sur son propre label.
"I have Enough" ou "I'm Gonna Tell You" posent les bases de ce blues minimaliste au son lo-fi puissant, gorgé de fuzz violente et explosive. Le concept est bâti autour du riff blues roboratif. La science du riff, c’est la base. Parlez-en à Pascal Comelade et aux Limiñanas qui sont des experts du genre. Sur que ces derniers adoreraient "Looking Right Through"
"I Have Enough"
Le Beat Man sort son épingle du jeu quand il faut triturer la six-cordes et se rapprocher de ce blues punk façon Blues Explosion comme sur "If I Knew" . Rappelons d’ailleurs que Jon Spencer dans un style similaire a sorti un album exceptionnel sur Fat Possum avec R.L. Burnside…
A coté de ce blues trash, le Beat Man et ses complices sortent des sentiers battus en ralentissant le tempo et en laissant s'exprimer la vois velouté de Sister Nicole Izobel Garcia. Avec "But I Love You", le timbre suave et grave de Nicole vient rajouter un coté soul jazz à l’édifice. La voix en espagnol apporte une nuance limite flamenca puis lorsque le Beat Man lui répond avec sa voix rocailleuse, on atteint des sommets au niveau du feeling.
"Today is a Beautiful Day" démarre plus soft, un tempo lent. Avec des guitares qui résonnent avec beaucoup de reverb. La ballade de l’album... On pense à Keith Richards lorsqu’il supplée Mick Jagger aux seins des Rolling Stones. La voix n’est pas techniquement exceptionnelle mais le feeling qui s’en dégage compense efficacement. "You Are On Top" est plus une ballade soul. Le Beat Man se laisse aller à des envolées guitaristiques proches du jazz et les orchestrations donnent une ambiance lounge un peu triste digne d’un lendemain de grosse cuite.
Un petit coté plus groove et des sonorités klezmer nous accueillent sur "I’ll Do It For You". On pensera aux excellents Kabalas qui sortaient il y a une vingtaine d'année de magnifiques albums chez Dionysus Records.
Sur "The White Wolf Is Back In Town", le Reverend fait admirer toute sa maitrise du registre underground et des monstres en tous genres. Rappelons que lorsqu'il officie en bande, il est le leader des Monsters. Forcement, coté hurlements lycanthropiens, il s’y connait.
Avec "Lass Uns Liebe Machen", on découvre ici le groupe dans un univers germanique dans le texte. Les instruments anciens en font une version façon Amélie Poulain mais des bas-fonds, des entrailles d’une vieille ville suisse. Les chœur de Nicole Izobel rajoutent à la magie du morceau. C’est inattendu. Fallait oser mais ça a totalement sa place dans cet album de blues trash décalé.
Très souvent ancré dans des ambiances délétères, un rien dérangeantes, le Reverend prêche l’amour perdu. "Love Is Simply A Dream" nous dit-il de sa voix grave et rocailleuse comme le Bourbon Kid du Livre de la Mort pour les fans de littérature rock. Comme sur beaucoup de titres de l’album, lorsqu’il estime que sa seule vois ne suffit pas, le Prêcheur envoie la fuzz et fait rugir sa six-cordes pour faire passer le message en force. Histoire que ca rentre bien le crâne des plus réfractaires ! Hé hé ! On s’en fout, nous on a adhéré de suite à ce très bon album de blues trash bien barré.
Sorti le 20 avril 2018 chez Voodoo Rhythm Records