La Danse du Chien + Boucan – FGO Barbara – 28/06/18

Quel Boucan d'chien ce 28 juin à FGO… Et comment ça a dansé ! Ce n'est pas tous les soirs qu'une telle déflagration de groove tripal - et pointue musicalement - embrase une salle de Paname. Des concerts à haute teneur énergétique, il y en a treize à la douzaine, chaque soir ou presque. Mais rares sont ceux qui allient performance habitée et maîtrise inspirée. C’est bien pour cela qu'on se répète, au risque de passer pour un radoteur ou pour un piètre chroniqueur. Un sentiment du en partie à la présence cuivrée chez chacune de ces deux formations… Au jeu de chacun de ses membres, tous excellents mais ne se regardant pas jouer pour autant… Au chant que se partage les trois membres de Boucan, même si le staccato de Mathias Imbert domine… Au brio avec lequel Eric Letinier-Simoni assure son rôle du frontman charismatique à cette voix, ce grain unique.

Boucan donc. Drôle de blaze pour un groupe de fines lames musicales. Sur leur page Facebook, est mise en avant une citation d'un certain Bilou : "Boucan, c'est un bruit qui n'existait pas avant". Une définition lapidaire, mais on ne peut plus juste. Boucan, c'est également une manière de jouer, intense et contenue à la fois. Ce sont des instruments improbables ; le conque qu'arbore Piero Pepin lors du premier morceau. Le clavier Theremin dont il tire des sons étranges et envoûtants. Voire son bugle, pas si courant sur scène au final. On pourrait même ajouter la contrebasse de Imbert Imbert, tant ce dernier la détourne de son usage classique. Il la cogne avec vigueur, compensant ainsi des percussions absentes, slape sans vergogne. Bref, il la maltraite avec amour… Brunoï Zarn le troisième larron n'est pas en reste et alterne banjo et guitare, posture empreinte d'une sévérité feinte et riffs précis et rageurs.  

Boucan, La danse du chien, FGO Barbara, Jazz punk
Photo © Milla Morisson

"Ça va déborder !" nous assène avec conviction Piero Pepin, aussi tonique au chant qu'il l'est au bugle… Boucan n'avait beau être qu'au second titre de leur set, nous étions convaincus dès le premier titre qu'effectivement, "ça envoyait du lourd". Comme le veut une expression un poil galvaudée. Du lourd au sens musical et non pas seulement parce que les potards sont à donf ou les voix hypertrophiées. Le chant lead - même si Imbert Imbert le prend le plus souvent - ils se le partagent et s'en sortent tous les trois haut la main. Sans effets, ni fioritures. Tout en force et en conviction, tranquilles et efficaces les boucaniers… C'est qu'ils ont de faux airs de pirates, de frères de la côte version punk. Aussi libres dans leurs têtes que dans leurs inspirations. Et dans leurs textes, subtilement provocateurs et libertaires ; "ton état naturel, la sodomie", "on sera vieux quand on sera morts pas avant", "les hommes naissent cons, aucune raison que ça change…" Ils se payent même le luxe de reprendre "Juste le temps de vivre" de Boris Vian. Un cousinage qui va de soi… La voix éraillée et ensoleillée de Piero fait merveille. Tout comme le final "Ari Zone A". Une compo basée sur une boucle d'une simplicité, d'une limpidité déclinée jusqu'à plus soif. Qu'ils reprennent en chœur et à laquelle on se joint tout naturellement. On veut en faire nous aussi du boucan comme celui-là…

Boucan, La danse du chien, FGO Barbara, Jazz punk
Photo © Milla Morisson

Lorsque l’on tombe en amour avec une première partie, vient parfois le doute. Va-t-on se laisser également emporter par ceux qui prennent le relais, ceux-là même pour lesquels on a fait le plus souvent le déplacement… Pas de risques que cela nous arrive ce soir à FGO, c’est pour la paire que nous avons fait le déplacement. On avait pu écouter l’opus de Boucan et il nous avait le même effet que lors de notre première rencontre discographique avec La Danse du Chien. Le troisième album, auquel, quelques quatorze ans plus tard, vient de succéder le frétillant Monsters and Mermaids. Leur fameux Jazz Punk Circus, au titre qui illustre bien le son inclassable et la démarche iconoclaste des franciliens. Ces amateurs de gombo musical ne font pas l’unanimité chez les puristes du blues, qui n’apprécient guère leur vision faussement foutraque de leur genre favori. Qu’importe, ce qui prime, c’est qu’elle suscite une envie, un besoin fondamental… "Shake your body" en gros. Ça tombe bien le titre du premier morceau.

Boucan, La danse du chien, FGO Barbara, Jazz punk
Photo © Milla Morisson

Si Eric Letinier-Simoni subjugue d’entrée, pas seulement au chant car sa maîtrise de l’harmonica à l’inverse de certains frontmen est bien réelle, ses acolytes font également dresser l’oreille, avoir l’oeil et le bon. On s’amuse de la posture de Bruno Le Bris, gagné dès le second morceau par la free attitude et qui fait littéralement corps avec sa contrebasse. Si son collègue Imbert Imbert l’aime d’amour vache la voluptueuse, Le Bris lui semble la prendre pour sa partenaire de danse. Sébastien Teulié semble s’entendre comme larron en foire avec Paul Melnotte aux drums. Et Guillaume Christophel au saxo baryton ? Disons tout net qu’avec le phrasé si particulier du frontman, c’est lui qui donne l’une de ses couleurs principales à La Danse du Chien. On se souvient d’avoir eu des réminiscences de Morphine lors des premières écoutes, en mode jazz punk donc. 

Boucan, La danse du chien, FGO Barbara, Jazz punk
Photo © Milla Morisson

Le set a été bien entendu l’occasion de découvrir nouveaux titres - déjà bien assimilés côté scène - de réentendre les anciens et de savourer des reprises. "Primitive" de The Groupies, une petite merveille garage sixties qu’ils remettent au goût du jour. Le somptueux "Strange Fruit" magnifié par Billie Hollyday. Sans parler de l’inévitable "I wanna be your dog" des Stooges (et Eric Letinier-Simoni n’a franchement pas à rougir de son interprétation de ce standard du père Iggy Pop…). L’invitation faite à Boucan de les rejoindre, confirme la proximité qui règne entre les deux formations. Mais la véritable surprise du show, délicieuse cerise sur le gâteau, aura été la prestation fascinante de la charmeuse Lia Vinova et de Django son serpent de partenaire. Frissons garantis et touche "circus" de La Danse du Chien !

Suivez l'actu de Boucan et de La danse du chien
Découvrez le monde sinueux et langoureux de Lia Vinova charmeuse de serpents



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