No-Man est loin d'être un parfait inconnu dans le paysage rock, et c'est encore moins un inconnu pour les amateurs de rock progressif et les fans de Steven Wilson, cependant, comme une certaine partie des projets du génie hyperactif No-man reste toujours un peu dans l'ombre de Porcupine Tree et pour cause:
Fondé en 1986 par Steven Wilson en collaboration avec Tim Bowness, le groupe offre une musique que l'on ne saurait qualifier: mêlant le rock progressif, la art-pop, l'art-rock, le jazz, l'electro-pop et tant d'autres styles No-Man parvient à créer un univers musical tout à fait personnel et bien distinct.
Restant de longues années ce qu'on pourrait appeler un projet studio, les deux artistes composent et enregistrent quelques albums ainsi que de nombreux singles et EP, s'entourant comme d'habitude de musiciens de qualité parmi les quels on pourrait citer des anciens et actuels membres de Porcuine Tree: Colin Edwin, Chris Maitland, Gavin Harrisson et Richard Barbieri, mais aussi des personnalités comme Robert Fripp, Steve Jansen, Theo Travis ou encore Steve Bingham. Durant tout ce temps donnant que très rarement des concerts ce n'est qu'en aout 2008 que le groupe donne son premier concert entier.
Cette rareté de prestations scéniques joue certainement en partie sur le fait que No-Man soit moins connu que Porcupine Tree, mais c'est aussi ce qui rend les concerts du groupe si uniques. Ainsi, en apprenant que le groupe allait faire une mini-tournée européenne de seulement 5 dates, sans, à mon plus grand regret, passer par la France je me décide de partir à l'aventure afin d'avoir tout de même l'opportunité de voir No-Man sur scène.
Ainsi le 31 aout 2012 je me retrouve dans la petite salle De Boerderij à Zoetermeer (Pays Bas), où se produit ce soir-là le groupe. Vous êtes certainement en train de vous poser la même question que celle que je m'étais posée avant d'arriver sur les lieux : "Mais pourquoi se produisent-ils dans cette petite ville au nom imprononçable plutôt que dans la capitale?" Et bien tout simplement parce que derrière son air un peu étrange et informe de l'extérieur, le bâtiment abritant ce centre culturel offre une excellente salle de taille moyenne, avec une très bonne acoustique et un dispositif lumières tout simplement impressionnant. Mais en plus de cela il faut savoir que la première prestation que No-Man ait donnée en dehors du Royaume Uni le 3 septembre 2008 était à Zoetermeer même. L'endroit a donc aussi un côté affectif et symbolique comme le préciseront durant le concert Tim et Steven. Impressionnée et agréablement surprise par les lieux j’attends le début du concert.
Plongée à demi dans la pénombre, la salle se remplit progressivement. Un premier spot lumineux s'allume sur le premier musicien arrivé sur scène en même temps que les premières notes retentissent. Ainsi tous entrent un à un, le son s'étoffe, la lumière jaillit et l'intimiste "Together We're Stranger" passe progressivement à "All the Blue Changes".
Chose agréable avec ce groupe sur scène est la différence des arrangements et des interprétations des morceaux en live par rapport aux enregistrements. Je ne parle pas ici de la différence des versions live dues aux fait que la line up soit différente, non chez No-Man les morceaux vivent et respirent, et à chaque fois qu'on les entends de nouveau ils se métamorphosent, comme c’est tout particulièrement le cas ce soir là avec "Lighthouse", morceau qui ne cesse d'évoluer au fil des interprétations.
Sur scène le duo Wilson/Bowness est accompagné de sa talentueuse line-up live composée de Stephen Bennett aux claviers, Pete Morgan à la basse, Michael Bearpark à la guitare, Andy Booker à la batterie et maestro Steve Bingham au violon électrique.
Les musiciens offrent une prestation de qualité, ce qui n’a rien d’étonnant. Je me fais encore une fois cette remarque que Steven Wilson a l’art de s’entourer de musiciens d'exception. On regrettera juste la timidité scénique de Tim qui semble avoir du mal à assumer pleinement son rôle de frontman dans le groupe ainsi que sa prestation un peu tendue sur "Beaten By Love". Mais finalement la musique nous fait pardonner ce petit détail. Dans cette atmosphère intimiste et très conviviale s'opère une sorte de magie créant une osmose entre le groupe et son public à l' accueil très chaleureux.
Durant cet excellent set (qui s'avère être le set le plus long de la tournée) le groupe nous réjouit avec des compositions pour la plupart issues des albums les plus récents, tel le très applaudi "Warm-Up Man Forever" ou encore le superbe "Close Your Eyes", ainsi que l'absolument sublime "Mixtaped" qui clôt le set à un sommet d'émotion, déchainant ainsi une avalanche d'applaudissements faisant revenir le groupe pour un rappel lors duquel retentiront "Things Change", issu de l'album Flowermouth, ainsi que "Back When You Were Beautiful" de l'avant dernier album studio en date, l'excellent Together We're Stranger (2003).
Mais cela ne suffit pas, et la foule ne laisse littéralement pas les musiciens quitter la scène, les rappelant encore et encore. Ainsi le groupe remonte sur scène pour un second rappel lors duquel Tim Bowness propose avec beaucoup d'humour à ses acolytes de tenter l’interprétation d’un morceau que le groupe n'a pas joué depuis des années… ainsi après quelques difficultés à retrouver les premiers accords et paroles du morceau, accompagnés de quelques bons éclats de rire aussi bien sur scène que dans le public, retentit "Housewives Hooked on Heroin" qui fait sensation et clôture ainsi le concert à son apogée.
La soirée ne se termine cependant pas là. À l'issue du concert les musiciens descendent dans la salle afin de discuter avec leur public et signer quelques autographes, après quoi une bonne partie de la foule se retrouve dans le bar de la salle aux intérieurs très agréables, qui lui reste ouvert au moins deux heures après la fin du concert offrant ainsi au public la possibilité de s’y retrouver afin de discuter du concert autour d'un verre sans avoir besoin de se précipiter et quitter la salle dans la dizaine de minutes qui suit la fin du concert, comme cela se passe habituellement dans les salles parisiennes.
C’es peut-être finalement ce genre d’accueil convivial qui manque aux artistes aussi bien qu’au public dans les salles françaises. Cela peut paraitre anodin, mais finalement la différence se fait bien ressentir: l’affluence est plus grande, le concert devient aussi un lieu de rencontre et de communication, les musiciens quant à eux sont plus détendus et ouverts.
Setlist:
1. Together We're Stranger
2. All the Blue Changes
3. Pretty Genius
4. My Revenge on Seattle
5. Carolina Skeletons
6. The Warm Up Man Forever
7. Only Rain
8. Time Travel In Texas
9. Lighthouse
10. Beaten by Love
11. Close Your Eyes
12. Wherever There Is Light
13. Days in the Trees
14. Mixtaped
Encore:
15. Things Change
16. Back When You Were Beautiful
Encore II:
17. Housewives Hooked on Heroin
Je tiens à remercier Rob Palmen et Edgel Groves de Glassville Music qui ont rendu possible ma présence à ce concert.