Après les trombes d'eau de la veille, le Malsaucy s'éveille dans la trop célèbre boue inhérente à tout bon festival. Qui colle, qui pue. Néanmoins pas de stress, ce second jour s'annonce comme un nouveau départ pour les fans de Rock, après celui consacré quasi-exclusivement aux musiques électroniques et au rap. Au programme, Nothing But Thieves, Insecure Men, Beth Ditto, Prophets Of Rage, Warmdusher, Nine Inch Nails et FFF. Sautons dans la gadoue!
Nothing But Thieves
Par Yannick KRockus
Il est encore tôt ce vendredi. 19h, les Eurocks s'éveillent à peine, et la Grande Scène se remplit doucement. Quelques drapeaux tricolores font référence sans doute à la Coupe du Monde de Baballe Sur Gazon Russe, lorsque les anglais de Nothing But Thieves débarquent.
Le show est impeccable, le son très correct, hormis ces infrabasses très désagréables, nous en reparlerons plus tard. Tapis de guitares, alternance de grosse énergie Indie Pop et de Power Ballades, Nothing But Thieves nous propose un set très propre. La voix avec un faux air de Matt Bellamy renforce ce côté british bien léché.
On aura passé un bon concert. Propre et énergique. On restera un peu sur notre faim quand même, l'étincelle Rock, celle qui fait tout disjoncter et transforme un concert en moment de grâce, n'aura pas été allumée. Un hommage aux dieux Led Zep au passage ("Immigrant Song"), sinon des titres tirés essentiellement de leur second album, Broken Machine. Une corde cassée, sans conséquence audible, sera le seul événement non prévu du show.
Insecure Men
Par Yann Landry
Les huit salopards de Saul, Insecure Men ne sont pas les lads les plus énergiques et ponctuels du monde. On pourrait bien dire qu'ils sont l'incarnation du cool, ce qui serait vrai s'ils étaient en place, jouant et chantant juste. Bon, ce ne fut pas le cas. Trois claviers voire quatre quand un des musiciens délaisse sa slide guitare, un saxophoniste, le duo basse batterie mou et Saul, chanteur guitariste amorphe.
"Sérieux les mecs ! Vous êtes huit !" Lancé par un gars dans la foule en le gueulant plus fort que la ligne de chant. Un enchaînement de titres nous faisant travailler le champs lexical de l'indolence. Et bim, comme ils étaient en retard, on file vers Beth Ditto avant de devoir rejoindre Prophets Of Rage, ça enchaîne très vite aujourd'hui !
Beth Ditto
Par Yann Landry
C'est une Beth Ditto ravie, souriante et joyeuse, parlant avec la foule en français (un peu), que nous découvrons sur la magnifique scène de la plage en cette chaude fin d'après-midi. Beth présente ses musiciens puis elle-même - en ne manquant pas d'humour - comme étant Lady Gaga. Beth est assistée d'une guitariste, un bassiste, un batteur et un claviériste ; tous en retrait pour laisser la part belle à la chanteuse.
Le groupe est carré, la musique pulse bien. Le public danse. Beth les ravit avec son chant puissant et soul. Hélas, nous devons déjà filer pour arriver à temps pour se placer dans le pit photo au concert de Prophets Of Rage. C'est le seul jour ont nous avons dû sacrifier de grosses parties de concerts, la programmation des autres journées étant bien mieux calculée. On apercevra tout de même le final du concert, le hit "Heavy Cross" qui fait exploser la foule, en nous rendant à Warmduscher.
Prophets Of Rage
Par Yannick Krockus
Les Prophets of Rage. Le supergroupe par excellence. Rage Against The Machine, Cypress Hill, Public Enemy. Nostalgique des années 90, tu vas être servi! Une sirène monte sur le Malsaucy, et c'est parti. "We're the Prophets Of Rage". Poings levés, les gars sont venus dispenser leur colère anti-Trump sur fond de fusion survitaminée.
Le début du set est clairement dans la veine RATM. Les machines se font discrètes, le son est massif, direct. "Insane in the Brain"... Tom Morello nous montre qu'il n'a rien perdu de sa technique et de son sens du son. La guitare toujours aussi haut perchée, habillée de son désormais légendaire "Fuck Trump" côté pile, il joue toujours autant avec ses effets, ses micros de guitare, et tout ce qui peut servir à générer ce son si caractéristique, tout en finesse, et pourtant tellement puissant.
Quant à la section rythmique... Tim Commerford et Brad Wilk, que demander de plus? Ça claque, ça slappe ce qu'il faut, ça fait un taff énorme... La machine porte les Prophets, bouscule tout sur son passage, envoie valser le Malsaucy.
On trouvera trois parties dans le set. Un début dans la veine RATM, puis un ventre mou, plus rap, avec des titres de Cypress Hill et de Public Ennemy dedans. Ventre mou parce que, même si les trois ex-RATM continuent leur œuvre de démolition massive, ils sont écrasés par les machines, et les voix de B-Real et surtout de Chuck D n'ont pas le mordant qui pourrait refaire monter la sauce. Quelques spectateurs regretteront Zack, mais bon...
On reviendra ensuite dans la veine RATM. Et là, l'évidence saute aux yeux, le Malsaucy saute aussi: basse/batterie/guitare, sec, ça pulse! Pas besoin de machines ni de DJ, bien au contraire, le retour aux bases transformera les Eurockéennes et les fera passer d'un apathisme tranquille à une folie débridée.
Le tout finira avec le paroxysmythique* "Killin' In The Name", conclut par un "Mother Fucker" scandé par le public. Au final, un set de feu, qui aura fait la part belle aux titres historiques des trois groupes originaux, en laissant un peu de côté ceux écrits ensemble. Et honnêtement, ça a fait plaisir à tout le monde.
* néologysme assumé, on a tous le droit d'inventer des mots.
Warmduscher
Par Yann Landry
La Fat White Family une seconde fois représentée aujourd'hui. On y retrouve le bassiste de Insecure Men qui a fini de se réveiller. Ici la basse vrombit sur un fond bien barré psyché. Peu de monde devant la scène, forcément il y a Prophets Of Rage qui joue de l'autre côté du site sur la grande scène.
Ce quintette est bien chelou. Un mec en sweat orange se tenant droit au milieu de la scène, à côté du micro du chanteur, avec un bidule entre les mains, un interrupteur ouvrant sur un autre espace temps ? Un bitonio qui ne sert à rien ? Nan, juste une petite pédale à effet électro balançant des nappes folles psychédéliques. Le sobre guitariste à l'allure à la Nick Cave 80's aligne les arpèges et petits riffs saccadés. Le chanteur aux lunettes à lanières, pas toujours juste à pourtant une voix intéressante, chaude comme un thé à toutes heures. L'amour est remplacé par la baise d'une chanson à l'autre nous annonce le chanteur, et pourquoi pas ? Les deux résonnant bien dans l'univers particulier de Warmduscher. Un gros délire où tout peut être ensemble : du Rock, du rock'n'roll, de l'electro, du rap même pour une fusion sans gêne et intensément lourde et palpitante.
Le final est complètement décadent, hallucinant, des projections de musique en tout sens, la foule (les fans présents) palpitante et le cœur en vrac.
Nine Inch Nails
Par Yannick KRockus
23h30, et toujours la forme. Grande scène, c'est au tour de la bande à Trent Reznor de faire parler le metal. Nine Inch Nails, ce ne sont pas des inconnus. 40 ans au service du Metal, une patte bien grasse dans le monde des groupes qui durent.. Deux morcequx mid-tempo pour démarrer, puis c'est parti pour du lourd, du brutal. Métal punkisant, industriel, visuels sobres, sombres, l'univers de Nine Inch Nails s'installe sur le Malsaucy.
Le public est présent en masse, il faut dire que les organisateurs ont eu la bonne idée de ne pas programmer grand chose sur les autres scènes en même temps. Et du coup, le tapis de guitare et de machines déboite la grande scène, un set très dense, puissant, un son très correct, et une réelle envie du groupe, qui ne s'économise pas. Il faut dire que, contrairement à d'autres grosses machines, NIN se concentre sur quelques dates, et ne fait pas la tournée des festoches. Ceci explique peut-être cela...
Nine Inch Nails s'aventurera dans la reprise, avec un morceau de Bowie, "I'm Afraid Of Americans", morceau produit par un certain Trent Razor à l'époque... Le monde est petit, non? Le set sera un de ceux que l'on retiendra, puissant, avec des musiciens heureux d'être sur scène, et un public bien investi. Le Metal a encore sa place aux Eurocks. Ouf.
FFF
Par Yannick KRockus
Vivants. La Fédération Française de Fonk revient aux Eurocks, Leur dernier passage en 1997, avait accouché d'une bombe, un live explosif. Aussi le retour des fonkeux est attendu avec impatience, tant leur puissance scénique est capable de décoller les peintures des pots de cancoillote.
Une chose est sûre, les FFF ont toujours 20 ans. Dès leur arrivée sur scène, on sait que ça va déboiter. Marco Prince arrive au milieu des choeurs cuivrés, Yarol Poupaud, plus Rock'n'Roll que jamais, au sommet de son art. Et cette section rythmique... Niktus, très à l'aise dans son déguisement issu d'un croisement entre un marsupilami et une panthère rose, qu'il ne quittera pas du concert. Le froid, sans doute. Avec son comparse Krichou, ils envoient un fonky-punky-groovy qui décoiffe. Le chapiteau s'en prend plein les oreilles, ça part dans tous les sens. Ca saute partout aussi, Marco Prince a toujours la ouache.
"Est-ce que vous êtes vivants?", la question sera posée souvent. Presque entre chaque morceau, Marco Prince harrangue, part en stage-diving, ou court comme un Mick Jagger qui aurait vu une fan... Les titres ont vingt ans, mais n'ont pas vieilli. "Barbes", "AC2N"... on a tous chanté ça quand on était jeune (pour les plus matures d'entre nous), et cela reste toujours aussi vrai, tant dans la forme musicale que dans les textes. FFF, groupe intemporel.
Côté public, ça danse partout. On aura droit à un pogo à la demande du taulier, un wall-of-death, et sinon à des pieds qui bougent, des sourires, des bananes partout, des couples qui visiblement auront du mal à attendre le camping... Vivants, oui, toujours. Un concert qui aura tenu ses promesses, une énergie de feu, servie par ce qui se fait de mieux parmi les musiciens de la planète rock. Le chapiteau a explosé ce soir. FFF, de la bombe, baby!
Toutes les photos de cette journée dans cet album complet
Crédits photos : Yann Landry
