Kristel avait été un de nos coups de cœur du MaMA 2016. On ne pouvait décemment rater la release party de Irony, leur premier album ce dix neuf septembre à la Bellevilloise. Les trois jeunes natifs de Antananarivo distillent un rock malgache parfois aussi nerveux que leurs compatriotes de The Dizzy Brains, mais perméable aux influences pop et reggae. La révolte est toute aussi présente, chanté en malgache et adoucie par la lumineuse présence de leur chanteuse. Par sa voix puissante et habitée, l'émotion et la fraicheur qu'elle et ses deux complices dégagent sans retenue.
Kristel nous avait donc sacrément tapé dans l'œil et dans l'oreille lors de leur set au Bus Palladium. Energie, groove et cerise sur le gâteau, le format power trio emmené par une chanteuse et bassiste… Et si on virait presse people, on pourrait broder sur le côté familial de l'entreprise. L'évidente complicité sur scène aurait pu nous donner ce prétexte… C'est Andry Sylvano, ci-devant mari de Christelle Ratri qui pénètre le premier sur la scène de la Bellevilloise. Quelques roulements de batterie bien nerveux et sa compagne surgit en compagnie son frangin Ben Kheli. Toute basse dehors. Se lance direct, pas de temps à perdre pour les présentations.
L'urgence d'en découdre l'étreint, comme ses deux comparses. Mais l'émotion rattrape la jeune chanteuse lorsqu'elle évoque ce premier album tout frais sorti. Le titre suivant s'avère plus pop, mais sa voix toute aussi puissante. Tour à tour suave, rauque - elle roule les R à rendre vert de jalousie un bourbonnais - aigüe et juste. Elle donne aussi de sa personne, bondissant à l'unisson de Ben, portée par la frappe de Andry.
Le public, même s'il répond présent, reste pourtant curieusement à distance, formant un arc de cercle autour de la scène. "T.N.M.", un titre extrait de leur premier E.P. aux allures de tube pop, devrait pourtant leur permettre de vaincre leur timidité… A moins qu'il ne préfère "Aiza ho aiza". Intro boucles de clavier en douceur, accélération avec solo de guitare de Ben Kheli et pointe de vitesse au final, pas mal non plus… L'émotion revient en force sur "Akao", transmise par le chant de Kristel qui dédit ce morceau à Marc-Antoine Moreau, leur manager et producteur, décédé en 2017. Le refrain ska speedé autant le couplet lancinant lui permet de déployer sa maitrise de la basse.
Une alternance rythmique que le groupe semble apprécier, "Lazao Izy" a des accents métal autant que reggae… Kristel nous invite alors à nous rapprocher et l'écart se réduit en un clin d'œil ! Elle a sans doute à cœur de faire partager la révolte qui l'étreint lorsqu'elle d'évoquer les richesses de Madagascar et ceux qui en profitent. "Irony" porte bien son titre… Après que Andry Sylvano se soit bien éclaté en mode solo sur "Andeha tsy andeha", Kristel termine par un reggae chaloupé qui s'énervera bien vite. Ils seront le 14 octobre prochain au Théâtre Levi Strauss (au Musée du Quai Branly), ne les ratez pas !